Un an après son lancement, l’Union pour la Méditerranée (UPM) n’a pas emporté l’adhésion des Algériens. Alors que certains partis politiques n’ont pas hésité à demander aux autorités de se retirer de cette union, le monde économique se questionne encore sur les possibles apports de l’UPM.
Parmi ces personnalités réservées figure l’un des principaux représentants du patronat algérien, Slim Othmani, directeur général de NCA-Rouiba, le leader algérien des boissons et jus à base de fruits. Ce jeune chef d’entreprise dit ne pas avoir d’a priori sur l’UPM qui doit, selon lui, être « bâtie sur des projets concrets auxquels nous, en tant que nation, sommes libres d’adhérer ou non ».
Précisant que « l’UPM n’est ni une association ni un accord obligatoire », ce membre fondateur de l’APAB (Association des producteurs algériens de boissons) dont il est actuellement le vice-président rappelle qu’« un projet se fait sur une base équitable excluant de facto certains rapports de forces liés au profil pays, émergents versus non émergents ».
Autre figure symbole de la société algérienne, Farid Cherbal, enseignant-chercheur en biologie à l’Université des sciences de la terre Houari Boumediene (USTHB) dans la banlieue d’Alger, ne cache pas son opposition à l’UPM « en raison de la situation politique et géostratégique qui règne en Méditerranée actuellement ».
Le biologiste ne se focalise pas sur le seul conflit du Moyen-Orient, puisqu’il précise qu’«un deuxième Etat signataire de ce document fondateur, le Maroc, continue aussi de coloniser le Sahara Occidental depuis 1976, de réprimer le peuple sahraoui à qui est refusé à ce jour l’organisation d’un référendum d’autodétermination pourtant stipulé par de multiples résolution du Conseil de sécurité de l’ONU. »
Partant de là, Farid Cherbal constate que les fondateurs de l’UPM sont rattrapés par le réel géostratégique et historique et qu’ils ne peuvent se dérober plus longtemps à une question fondamentale qu’il formule ainsi : « Peut-on construire un espace de paix et de prospérité en Méditerranée tant que le colonialisme israélien occupe la Palestine et opprime, depuis 60 ans maintenant, le peuple palestinien, et tant que l’on refuse au peuple sahraoui son droit à l’autodétermination ? »
Le généticien, qui représente une nouvelle génération de syndicalistes algériens à travers son militantisme dans le syndicat CNES (conseil national des enseignants du supérieur), considère à partir de là « que le projet de l’UPM n’est pas viable. »
Rappelant que la guerre d’indépendance du peuple algérien a posé comme principe fondateur à la politique étrangère algérienne postcoloniale « le soutien permanent et la solidarité agissante à l’égard de tous les peuples du monde en lutte pour leur indépendance », Farid Cherbal se déclare partisan de « la construction d’un nouvel espace géostratégique, politique et économique méditerranéen au service exclusif des droits politiques, sociaux, économiques et culturels des peuples de la Méditerranée. »
Une autre personnalité, politique celle-là, dénonce sans détour l’UPM. Il s’agit de Hocine Ait Ahmed, chef du Front des forces socialistes (FFS), qui considère que « cette union, fondée sur la complicité et la compromission avec les dictatures, enterre les peuples et prend en otage la démocratie.»
Accusant sans détour Nicolas Sarkozy de développer une conception de l’UPM datant de « la guerre froide des années 70 et 80 qui avait gelé le grand mouvement de décolonisation en faisant proliférer la dynamique des dictatures indigènes, ghettoïsant peuples, sociétés et individus du Sud, les condamnant ainsi à toutes les formes de violences, de misère et d’aliénation », le vieil opposant au régime conclut par une critique virulente des dirigeants du Nord : « Au lieu de se gargariser des droits de l’homme et de la ‘’civilisation’’, il faut d’abord et avant tout civiliser le politique en garantissant l’indépendance de la justice dans les deux rives. Les peuples maghrébins méritent mieux. Le peuple français mérite mieux aussi. »
Source : www.econostrum.info
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