Rares pourtant sont les analyses qui intègrent dans la dynamique de la mondialisation capitaliste l’essor des marchés sexuels et leur impact sur les femmes et les enfants. La mondialisation trouve pourtant là l’une des ses pires formes d’incarnation. La victoire du néolibéralisme dans les années 1980 va de pair non seulement avec une accélération de la soumission à la monétarisation des rapports sociaux, visible particulièrement dans les industries du sexe, mais également avec une légitimation accrue de l’aliénabilité des corps, de leur marchandisation. La prostitution et son corollaire, la traite des femmes et des enfants à des fins de prostitution, sont considérés par nombre d’Etats comme des moyens de développement économique. Ce « secteur » de l’économie mondiale est en pleine expansion. Il produit des déplacements importants de population et génère des profits mirobolants. Des millions de femmes, d’adolescents et d’enfants vivent dans les districts « chauds » des métropoles de leur propre pays ou dans ceux de pays voisins ou lointains. Les plus touchés proviennent principalement des pays du Sud et plus récemment, de l’Est. Ils constituent la source des rentes les plus profitables de l’économie mondiale.
La pauvreté au Maroc est le premier facteur qui pousse certaines femmes à vendre leur corps mais le poids de l’analphabétisme lié aux revenus est également très lourd. C’est un facteur d’exclusion sociale et professionnelle. 31,5% des prostituées ne sont jamais allées à l’école. Pourtant un résultat détonne : 21,1% d’entre elles sont arrivées jusqu’à l’enseignement supérieur et possèdent parfois même un diplôme. Comment expliquer cela ? Le chômage des jeunes diplômées et le temps d’inemploi avant le premier travail semblent être les raisons les plus pertinentes. Alors qu’on pensait que la prostitution était réservée aux plus illettrées, il semble que la faiblesse des bourses universitaires pousse certaines étudiantes à trouver dans la prostitution une alternative financière.
La situation familiale des prostituées marocaines est assez révélatrice. 39,5% d’entre elles sont divorcées. Outre les problèmes économiques, la difficulté sociale à retrouver un mari est grande. De nombreuses femmes divorcées sont rejetées par leur famille ou leur entourage, accusées d’avoir causé le divorce. 4% sont mariées. Ce chiffre est faible mais pourtant éloquent. Elles se prostituent généralement en cachette pour subvenir aux besoins de la famille quand le mari est pauvre ou absent. Cependant certaines reconnaissent être poussées par leur conjoint ou leur famille dans cette voie-là. Le cliché de la femme qui vend son corps sous le regard honteux et accusateur de sa famille est égratigné. La prostitution est parfois encouragée par une famille complice voire coupable. Pour de nombreux touristes formule « tour operator » la tentation est également grande face à ce fléau qui touche l’ensemble des villes marocaines.
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