Candidature de l’ Égypte au poste de membre permanent du conseil de sécurité : Le Caire sollicite l’appui d’Alger

La présentation des condoléances au président algérien après le décès de son frère n’était qu’un prétexte pour Hosni Moubarak pour venir à Alger.
La tradition orientale veut que la mort et le malheur réconcilient les adversaires. En janvier 2006, Hosni Moubarak était le premier chef d’Etat étranger à venir s’enquérir de l’état de santé de Abdelaziz Bouteflika après une intervention chirurgicale en France. Cette fois-ci, le chef d’Etat égyptien a choisi la « bonne période » pour venir discuter avec Abdelaziz Bouteflika de questions « lourdes ». Au-delà de la page tournée des événements post-Omdurman, liés aux matchs qualificatifs à la Coupe du monde du football, l’homme fort du Caire est venu avec des idées bien précises. Ce déplacement dépassait, et de loin, la simple visite de courtoisie.
Les discussions de Zéralda, lieu de résidence du président algérien, portaient essentiellement sur un projet stratégique que Le Caire défend depuis des mois. Il s’agit de la candidature de l’Egypte au poste de membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, à la faveur d’un futur élargissement lié aux réformes onusiennes. Le Caire veut un soutien ferme de l’Algérie à cette candidature au nom de l’Afrique. Comme l’Egypte ne peut pas se présenter au nom du groupe arabe ou du monde musulman, une candidature au nom du continent africain, le deuxième plus peuplé après l’Asie, non représenté au sein de l’instance onusienne, paraît la plus appropriée. De nombreux diplomates de haut rang sillonnent l’Afrique pour collecter le maximum d’appuis à ce projet. Les sous-régions arabophone et francophone sont les plus ciblées. A titre d’exemple, Mona Omar, conseillère au ministère égyptien des Affaires étrangères, était en mai dernier à Ouagadougou pour plaider cette cause en termes clairs.
Le Nigeria, le plus grand pays musulman d’Afrique avec 150 millions d’habitants, et l’Afrique du Sud, l’économie la plus avancée du continent, sont sur la même ligne de départ que l’Egypte. Aussi, un soutien de l’ensemble maghrébin et de l’Afrique de l’Ouest sera d’une grande importance pour l’Egypte lorsqu’il faudra trancher. L’Algérie, qui est engagée avec l’Afrique du Sud et le Nigeria dans l’initiative du Nepad, appuiera-t-elle l’Egypte au nom de « la fraternité arabe » ? Ou choisira-t-elle de défendre la cause de l’Afrique du Sud, un pays avec lequel elle entretient des relations politiques traditionnelles ? La diplomatie algérienne ne dit rien pour l’instant. Des observateurs avertis s’interrogent sur les raisons du retrait de l’Algérie, puissance émergente médiane au nord de l’Afrique, de cette course vers le Conseil de sécurité. Cette ambition, réduite à la portion congrue, est-elle liée à une absence de vision stratégique pour le pays ? En dépit des contre-performances économiques et des carences démocratiques, l’Algérie a, autant que l’Egypte, des moyens convaincants pour prétendre à porter la voix de l’Afrique au Conseil de sécurité. Cet organe exécutif de l’ONU ne sera plus un simple club atomique parce que le monde d’après 1945 a cessé d’exister. L’Afrique aspire à avoir deux sièges de membres permanents et deux autres non permanents au sein de ce Conseil, au même titre que l’Europe, avec accès au droit de veto.
En ce sens, un appel a été lancé en 2005 à partir du Swaziland par quinze pays africains, dont l’Algérie, le Nigeria, la Libye, le Congo et l’Angola. L’Inde, le Brésil, le Japon et l’Allemagne travaillent également pour avoir un siège permanent au Conseil de sécurité. Après Alger, Hosni Moubarak est allé à Paris pour rencontrer Nicolas Sarkozy. Lors du dernier sommet Afrique-France à Nice, fin mai-début juin 2010, le président français avait déclaré qu’il était « absolument anormal » que l’Afrique n’ait pas de membre permanent au Conseil de sécurité. Il a promis un soutien de la France pour que l’Afrique prenne « toute la place qui lui revient » dans les organisations internationale. Un appui de Paris à la candidature du Caire n’est pas à écarter. L’action diplomatique française compte beaucoup sur la contribution de l’Egypte pour relancer l’Union pour la Méditerranée (UPM) qui devra tenir son sommet en novembre 2010 à Barcelone. Paris rêve de faire jouer à l’UPM un rôle diplomatique plus grand dans la région.

El Watan, 6/7/2010

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