C’est aujourd’hui que la CIJ (Cour internationale de Justice) fera connaître son avis sur la légitimité de l’indépendance du Kosovo proclamée unilatéralement le 17 février 2008. L’avis de la CIJ n’est certes pas contraignant, mais devra avoir des répercussions sur la stabilité des Balkans. Toutefois, au-delà du cas spécifique de la province serbe, l’avis fera sans doute jurisprudence pour d’autres cas similaires (cf; le cas du Biafra au Nigeria dans les années 70) ou qui peuvent se répéter (singulièrement en Afrique) lequel auront ainsi une réponse argumentée de la part du législateur du droit international (DI), la CIJ, qui agit au nom et dans le cadre de la Charte de l’ONU. De fait, le cas du Kosovo est exemplaire dans le sens où la proclamation de l’indépendance de la province serbe a été immédiatement reconnue par des grandes puissances (France, Grande-Bretagne et les Etats-Unis, notamment, toutes membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU) qui ont constitué un grave et périlleux précédent dans la procédure juridique internationale et la préservation de l’intégrité territoriale des Etats. En effet, les séparatistes ossètes et abkhazes, se sont promptement infiltrés dans cette brèche, proclamant à leur tour leur autonomie vis-àvis de la Géorgie. Or, les mêmes qui ont légitimé le processus indépendantiste au Kosovo, le condamnent pour ce qui est de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie, deux territoires de la Géorgie. Ce sont là deux cas caractéristiques de l’interprétation qui est faite par les puissants du droit international. Une interprétation à connotation clairement idéologique. Or, le droit international a défini les principes protecteurs d’inviolabilité et d’intangibilité des frontières conventionnellement reconnues. C’est justement de ce point du droit international que découle la position de l’Afrique sur l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation, clause adoptée lors de la fondation de l’Organisation de l’Unité africaine (OUA) en 1963 et remise en cause par le Maroc avec l‘occupation du Sahara occidental en octobre 1975. Pour revenir au cas du Kosovo, son problème essentiel était sa reconnaissance par la société internationale, laquelle est restée très partagée sur cette question, et généralement sur les questions ayant trait à la souveraineté territoriale d’un Etat. Le droit international tel qu’appliqué, actuellement – dans l’optique de surmonter les difficultés inhérentes à cette dichotomie – distingue la reconnaissance de l’Etat de celle du gouvernement. Le Kosovo est ainsi reconnu actuellement par 69 pays sur les 193 membres des Nations unies. Cela n’implique pas pour autant sa légitimité ou sa légalité vis-à-vis du droit international. C’est sur ce point que la CIJ est appelée aujourd’hui à se prononcer, à la demande de l’Assemblée générale de l’ONU. Toutefois, quel que soit cet avis, on est en droit de rester sceptique au regard du peu d’effet qu’ont eu auparavant les avis de la CIJ et les suites qui leur ont été données par la «communauté internationale». Une sorte d’exercice de style sans incidence sur la réalité du terrain, modulée au gré de l’intérêt des grandes puissances. Ainsi, le 16 octobre 1975, la CIJ, si elle reconnaît l’existence de «liens juridiques d’allégeance de certaines tribus avec le sultan du Maroc», les estiment en revanche «insuffisants» pour établir un «droit territorial». Ce qui n’empêche pas la France de soutenir la «marocanité» du territoire sahraoui. A la demande de l’ONU, la CIJ rendait son avis sur la question du mur de séparation israélien. Dans sa réponse, la CIJ affirme: «L’édification du mur qu’Israël, puissance occupante, est en train de construire dans le territoire palestinien occupé, y compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem-Est, et le régime qui lui est associé, sont contraires au droit international». Sans commentaire! Mais tout cela reste un jeu d’ou sont exclus les peuples et les Etats. Un avis? C’est en fait le Droit international obsolète, qui est à réformer.
L’Expression, 22/7/2010
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