Le président de la Commission de l’Union africaine, Jean Ping, a accusé hier la Cour pénale internationale (CPI) d’« acharnement sur l’Afrique », après la nouvelle inculpation pour génocide visant le président soudanais, Omar El-Bachir.
« Nous ne sommes pas contre la Cour pénale internationale, nous constituons une bonne majorité (des Etats signataires de son statut), mais nous disons que les jugements semblent être des jugements à deux vitesses et un acharnement sur l’Afrique », a déclaré M. Ping à la presse, à l’avant-veille d’un sommet de l’UA, prévu de dimanche à mardi à Kampala. Sous le coup d’un mandat d’arrêt international depuis 2009 pour crimes de guerre et crimes contre l’Humanité au Darfour, province de l’Ouest du Soudan, le président El Bachir vient d’être inculpé de « génocide » par la CPI. Il est accusé d’être responsable du meurtre d’au moins 35 000 civils des trois ethnies au Darfour entre 2003 et 2005, et de l’expulsion et du viol de centaines de milliers d’entre eux. M. El Bachir effectue actuellement une visite au Tchad, où les autorités ont prévenu qu’elles ne comptaient pas mettre à exécution le mandat d’arrêt de la CPI contre lui, alors que N’Djamena est signataire du Traité de Rome fondant la CPI.
Omar El Béchir est théoriquement invité au sommet de l’UA de Kampala à partir de dimanche, même s’il avait renoncé à se rendre dans la capitale ougandaise pour un précédent sommet en octobre dernier. Les diplomates s’attendent à ce qu’il ne vienne pas davantage cette fois. Jean Ping a une nouvelle fois reproché à la CPI et à son procureur, Luis Moreno-Ocampo, de ne se focaliser que sur l’aspect juridique de la situation au Soudan, sans prendre en considération la nécessité de maintenir la paix, notamment à l’approche d’un référendum crucial du Sud-Soudan à propos de son indépendance en janvier prochain. « Nous devons trouver un moyen pour ces entités (Sud et Nord Soudan) de travailler ensemble et de ne pas recommencer la guerre, et c’est ce que nous faisons, mais M. Ocampo n’en a rien à faire », a déclaré M. Ping. « Il veut simplement arrêter Béchir. Eh bien, qu’il l’arrête », a lancé Jean Ping, en rappelant « qu’une majorité de pays de l’UA avait décidé de ne pas appliquer la politique à deux vitesses de la CPI » menée contre l’Afrique selon lui.
L’UE rappelle le Soudan à ses obligations internationales
L’Union européenne compte appeler lundi le Soudan à coopérer pleinement avec la justice internationale, qui a émis contre son président, Omar El Béchir, deux mandats d’arrêt pour crimes et génocide au Darfour, selon un texte obtenu hier par l’AFP. Ce projet de déclaration, déjà adopté par les ambassadeurs des pays de l’UE, doit encore être officiellement approuvé par leurs ministres des Affaires étrangères quand ils se réuniront lundi à Bruxelles. Le texte souligne que « les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et les crimes de génocide sont ceux qui préoccupent le plus la communauté internationale et que l’impunité pour ces crimes ne pourra jamais être acceptée ». L’UE y réaffirme son « soutien à la Cour pénale internationale (CPI) et appelle le gouvernement soudanais à coopérer pleinement avec la CPI, conformément à ses obligations internationales ».
Cette nouvelle admonestation européenne survient au moment où le président soudanais se trouve actuellement au Tchad pour un sommet régional. La décision du Tchad de ne pas inquiéter Omar El Béchir à cette occasion a suscité une vive polémique dans la mesure où il fait l’objet de deux mandats émis contre lui par la CPI pour crimes et génocide au Darfour, une région de l’ouest du Soudan en proie à des affrontements depuis sept ans. Dans sa déclaration, l’UE appelle en outre toutes les parties soudanaises à accélérer les préparatifs en vue du référendum sur l’indépendance du Sud du Soudan prévu en janvier 2011, dans le cadre de l’accord de paix ayant mis fin en 2005 à deux décennies de guerre civile entre le Nord et le Sud du pays.
El Watan, 24/7/2010
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