La France prise au piège sahélien

Officiellement lâchée par les Américains dans sa hasardeuse entreprise : La France prise au piège sahélien
Par Mohamed Abdoun
Paris, désormais, ne sait plus quelle partition jouer, ni sur quelle musique danser. Le président Nicolas Sarkozy, depuis que Washington l’a officiellement désavoué et lâché dans sa hasardeuse entreprise qui visait à  » envahir  » le Sahel, fait beaucoup moins le fier. La  » vengeance  » qu’il avait promise à la suite du décès tragique de l’otage français Michel Germaneau a été facile à dire, mais sera autrement plus difficile à faire.
La presse hexagonale, qui suit de très près la pathétique tournée du chef de la diplomatie française dans trois pays du Sahel, à savoir la Mauritanie, le Mali et le Niger, s’était déjà demandé si ce n’est pas l’intervention musclée et ratée des troupes françaises qui avait scellé le sort de cet otage. C’est désormais chose acquise. Germaneau a bel et bien été sauvagement décapité samedi passé, c’est-à-dire deux jours après le raid manqué des troupes spéciales françaises. Le GSPC, dans une déclaration sonore (authentifié) de son émir national, Abdelmalek Droudkal et diffusé sur les ondes de la chaîne qatarie Al Jazeera, avait souligné avoir éliminé l’otage à cause de ce raid manqué, durant lequel sont morts six contrebandiers travaillant plus ou moins en sous-main pour le compte des groupes terroristes qui écument ces régions. Ce raid, mené avec un rare amateurisme, semble avoir poursuivi deux buts principaux, dont aucun ne consistait à libérer l’otage. Bien au contraire, le plan, pour ne pas dire le complot, devait comporter l’élimination par le GSPC de son otage français. Le président Sarkozy cherchait en effet à faire oublier le scandale L’Oréal qui risque de le toucher directement une fois que son ministre du Travail et ancien directeur de campagne lors des présidentielles de 2007 aura été auditionné par la police. Il souhaitait également prouver à tous la main mise de Paris sur sa « France-Afrique ».
Germaneau est mort deux jours après le  » raid spectacle  » de Sarko
Le prélude à cette  » folie  » diplomatique avait été donné lors du défilé du 14 juillet où pas moins de 13 pays des anciennes colonies françaises avaient fait défiler des troupes sur les Champs Elysées.
L’attaque, a-t-on pu apprendre par la suite a été menée à l’aide de véhicules tous terrains.
Les troupes ont fait à pied les 10 derniers kilomètres vers le campement des contrebandiers. Mais aussi bien préparée qu’eut été l’opération, elle n’en a pas moins permis à quatre criminels de s’échapper, alors que l’otage était demeuré introuvable.
La problématique du renseignement se pose avec acuité dès qu’il s’agit de traiter des affaires aussi délicates. La France le sait mieux que personne qui avait déjà eu à recourir à la méthode douce quand elle souhaitait sauver coûte que coûte son précieux otage détenu par le même groupe. Pierre Camatte, espion de son état, avait ainsi été libéré parce que la France avait donné suite à l’ensemble des  » doléances  » des terroristes.
La France, qui a agi de bout en bout en cavalier seul, espérait naïvement que les Américains et, avec eux, tout l’OTAN, allaient sauter à pieds joints dans la brèche ainsi ouverte pour poser le pied (militairement parlant) dans cette partie du monde, si riche et si pauvre à la fois.
Les Américains, particulièrement échaudés par leurs deux malheureuses expériences irakienne et afghane, se sont empressés de laisser la France se débrouiller seule, poussant l’  » élégance  » jusqu’à s’aligner intégralement sur les positions algériennes en ce qui concerne la lutte contre le terrorisme transfrontalier.
Voilà bien des éléments à même de refroidir les plus fortes ardeurs, même par cette période de grandes chaleurs, et en plein milieu des no man’s land sahélo-sahariens. De fait, c’est ce qui semble en passe de se passer.
La vie des otage espagnols suspendue à un fil !
Se rendant brusquement compte qu’elle n’a ni les moyens ni la volonté d’ouvrir un front direct avec ces insaisissables terroristes que seuls connaissent et peuvent traquer les gens du terrain, Paris, par la voie de son premier ministre François Fillon qui s’exprimait sur les ondes de RTL, mais aussi de son chef de la diplomatique, qui se trouvait hier à Bamako et s’improvisait  » porte-parole  » du président Amadou Toumani Touré, opère un repli stratégique en se contentant juste d’assurer les pays visités de son soutien et de son éventuelle aide sur les plans militaire et logistique.
Le Sahel, pendant ce temps, devra compter sur lui-même, de préférence en revenant aux thèses et méthodes depuis toujours soutenues par l’Algérie.
L’urgence est là, aussi bien parce que la vie des deux otages espagnols ne tient plus qu’à un fil, que parce que le GSPC, à cause des faux pas français, mais aussi de la misère qui sévit dans ces régions, y acquiert un poids de plus en plus important. Les experts soulignent que ses effectifs auraient quasiment doublé en l’espace d’une année seulement, passant de 200 à environ 400 criminels. Le plus gros des nouvelles recrues, croit-on savoir encore, viendrait des tribus touaregs. Ces derniers, oubliés par le régime de Bamako, qui refuse toujours de mettre en application le fameux accord d’Alger.
Des sources nous donnent ainsi le chiffre de quelque 100 touareg déjà intégrés dans les rangs du GSPC.
A cause de leur parfaite connaissance du terrain, ces éléments risquent de doter le groupe terroriste d’une force de frappe nouvelle.
Ainsi, quand la France aura fini de  » jouer  » et de faire diversion, il ne sera que temps de reprendre la lutte antiterroriste là où elle avait été malencontreusement interrompue… 

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