La majorité des pays n’a pas reconnu l’indépendance du Kosovo

Par Kamel Boudjemil
Philippe Moreau Defarges. Chercheur à l’Institut français de relations internationales : La majorité des pays n’a pas reconnu l’indépendance du KosovoLa Cour internationale de justice a estimé, hier, dans un avis consultatif rendu à la Haye, que la déclaration d’indépendance du Kosovo n’a pas violé le droit international. Juste avant cette déclaration, El Watan Week-end a contacté un expert.

Cet avis était très attendu, particulièrement par les groupes minoritaires et organisations séparatistes qui vont y chercher un précédent légal pour asseoir leurs revendications. Qu’en pensez-vous ? Tout d’abord, il est important de dire que c’est un avis. Ce qui veut dire qu’il est juridiquement non contraignant. Il est fourni et constitue une analyse juridique du dossier, sur lequel le deux parties ont des avis totalement divergents. Ensuite, il est certain que, comme l’avis consultatif sur le Sahara occidental, cet avis sera prudent et balancé. Il prendra en compte les liens historiques entre la Serbie et Kosovo et le fait que le Kosovo fasse partie de la République serbe. Il prendra aussi en compte le droit du Kosovo à prendre en main son propre destin. Ce qui donnera du grain à moudre à tout le monde.

Est-ce que cet avis consultatif, repris par les organes des Nations unies, pourra jouer en faveur de la reconnaissance totale de l’indépendance du Kosovo ?

Tant que nous n’avons pas analysé le contenu de l’avis, on ne peut rien dire. Mais compte tenu du fonctionnement de la Cour internationale de justice, elle donnera un avis ouvert, en reprenant les deux points de vues. L’ONU ne donnera pas d’aspect contraignant à cet avis, ce n’est pas sa pratique. Les 192 membres sont très divisés sur la question. A ce jour, 69 pays ont reconnu l’indépendance du Kosovo, ce qui veut dire que la majorité ne l’a pas reconnue. La communauté des Etats membres est donc très divisée sur la question. Il sera très difficile que le Conseil de sécurité ou que l’Assemblée générale adopte un texte juridiquement contraignant.

A l’image de l’avis consultatif rendu sur le Sahara occidental en 1975, celui-ci peut-il donner une base de revendication plus forte aux Kosovars ?

Ce qui est sorti de l’avis de 1975, c’est qu’il fallait demander aux Sahraouis comment ils voulaient prendre en main leur destin. Veulent-ils être indépendants, rattachés au Maroc ou bien devenir autre chose ? Cela implique la mise en place d’un référendum qui n’a jamais eu lieu. Le cas du Kosovo est plus compliqué. Un référendum a déjà eu lieu, dont le résultat a été la volonté d’indépendance des Kosovars. La Serbie, rappelons-le, est composée à 90% d’Albanais et redemander un référendum, c’est déjà prendre partie, puisqu’on en connaît déjà la réponse positive. La demande d’un référendum ne peut que déplaire à la Serbie. Cet avis a été provoqué par cette dernière, à travers lequel elle veut voir reconnue l’appartenance historique du Kosovo à la Serbie. Ce qui n’a aucune chance d’aboutir. L’avis ne peut que confirmer la volonté des Kosovars à disposer d’eux-mêmes.
El Watan, 23/7/2010

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