La vie sexuelle des Saoudiennes… racontée par une Marocaine
Les pays du Golfe intensifient leurs attaques contre nos concitoyennes qu’ils assimilent à des prostituées ou à des sorcières. Un livre choc, bientôt disponible dans nos librairies, révèle la réalité des alcôves de la péninsule arabique.
Une Marocaine a osé le faire ! Sex and the medina est un livre témoignage édité chez Plon, écrit par une hôtesse de l’air marocaine qui a préféré garder l’anonymat. Souvenez-vous, en 2004, ces mêmes éditions Plon avaient réalisé un coup de maître en publiant le premier roman érotique écrit par une Arabe, L’Amande de Nedjma, suivi de La Traversée des sens, du même auteur. Les deux livres ont été traduits dans une douzaine de langues, mais pas en arabe. Et aujourd’hui, voilà cette Marocaine qui lève le voile sur les femmes saoudiennes, leurs longues journées oisives, les bavardages incessants autour de leur vie sexuelle, leurs recettes de beauté pour captiver leurs maris, leurs rêves, leurs fantasmes, leurs liaisons secrètes, et surtout leur regard sur les Marocaines, « ces putes sorcières aux mœurs débridées, voleuses de maris ». Elles leur font peur mais les Saoudiennes ne peuvent s’empêcher de les envier. Elles ont le droit de conduire des voitures, de travailler, de parler avec des hommes sans lien de parenté avec elles, de voyager seules, sans tuteur. Un privilège qui ne leur est pourtant pas accordé par l’Arabie saoudite, la Jordanie ou la Syrie. Le PJD a même appelé le ministère des Affaires étrangères marocain à intervenir pour faire cesser un tel abus dans le traitement des Marocaines et rendre la dignité aux familles touchées par cette exclusion. Il a demandé cet été aux autorités marocaines d’ouvrir le dialogue avec leurs homologues saoudiens pour éclaircir la situation (voir nos questions à Bassima Hakkaoui). Pour les Saoudiennes rencontrées par l’auteur de Sex and the medina, les Marocaines sont avant tout « le pétrole de leur pays ».
Retraitée à 25 ans
Sex and the medina, c’est Sex and the city version arabo-musulmane. Si Carry Brad-show, Samantha, Charlotte et Amanda ont été choquées par les mœurs et la culture d’Abu Dhabi, les quatre drôles de dames saoudiennes de Sex and the medina ne s’intéressent pas aux Américaines ou autres Occidentales jugées trop caricaturales. Elles se passionnent davantage pour leurs « sœurs » de la nation musulmane qui se sont émancipées, troquant les traditions pour une modernité à la thaïlandaise mêlant alcool, drogue et prostitution. Elles n’arrivent pas à croire que notre narratrice, hôtesse de l’air dans une compagnie saoudienne, soit vierge et ne se contente, à 28 ans, que de flirts, se préservant pour son futur époux. Elles fantasment sur le collègue marocain de Leila, stewart, qu’elles imaginent viril, doux et conciliant. Mais surtout, elles ont peur de ces jeunes filles prédatrices, prêtes à tout pour se faire épouser en raflant la mise.
Nous avons rencontré l’une d’entre elles à Casablanca. A 25 ans, Badria est propriétaire d’un appartement dans un quartier plutôt chic, porte des vêtements de marques et arbore des bijoux que seules les grandes bourgeoises casablancaises peuvent s’offrir. Belle, grande, claire, séduisante à souhait, elle est pourtant déjà à la retraite. « Les Saoudiens aiment les filles jeunes, très jeunes », dit-elle en riant. « Moi, je suis déjà hors circuit. Je suis allée en Arabie saoudite à l’âge de 15 ans. Et j’ai découvert un monde souterrain que les musulmans qui vont en pèlerinage sur cette terre sacrée ne peuvent même pas imaginer. Là-bas, il n’y a pas de boîtes de nuits ou de bars, mais des caves de villa aménagées comme les plus belles discothèques du monde. Quand il y a une soirée, les filles arrivent à la porte et sont sélectionnées à l’entrée. Une caméra à l’intérieur permet aux hôtes saoudiens de faire le casting », poursuit-elle. Dans le contrat de ces filles, elles sont obligées de boire, fumer et se droguer. La plupart passeront la soirée à parader sans résultat, d’autres plus ou moins chanceuses, feront l’objet de la réalisation des fantasmes de quelques vieux pervers.
L’homme idéal
Pour la grand-mère saoudienne dans Sex and the medina, l’homme idéal est « celui qui s’intéresse à toi et aux tiens, qui essaie de s’approcher de ta famille. Celui qui te fait des compliments pour une belle chose que tu viens d’entreprendre. Celui qui ne compte pas l’argent avec toi et n’oublie jamais de te faire des cadeaux. » Plutôt cupide comme approche pour des femmes qui traitent les Marocaines de prostituées ! Ce à quoi répond Joumana, la plus moderne de nos amies saoudiennes : « Un bon mari est celui qui ne prend pas une seconde épouse, qui encourage sa femme à s’épanouir hors de la cuisine et à exercer un métier, qui ne voit aucun inconvénient à ce qu’elle fraie avec ses amis garçons, qui est capable d’élever la voix pour lui épargner toute loi qui la brime ou touche à sa dignité, qui marche à côté d’elle et pas devant, qui ne fait pas rire le monde entier en la présentant sous les traits de l’esclave, qui n’a pas peur de sa sexualité et apprécie son appétit comme un signe d’amour et non de débauche, qui ne la tue pas parce qu’il a découvert qu’elle n’était pas vierge. » Il est vrai que cela ressemble beaucoup à une plaidoirie de femme marocaine. Finalement, aussi bien au Maroc qu’en Arabie saoudite, les rapports du couple se noient dans la tradition, comme l’explique Abdelbaki Belfqih, sociologue (voir interview). Et les femmes en sont à la fois les principales instigatrices et les premières victimes.
Les meilleures clientes de nos fqihs
Elles sont prêtes à payer le prix fort nos Saoudiennes pour bénéficier des services de nos fqihs, de nos voyantes ou des recettes des Marocaines, amulettes et aphro-disiaques propres à enchaîner les maris. Dans son ouvrage, notre hôtesse de l’air raconte : « Ma cousine Nora s’est proposée de motiver la bande à magie qu’elle avait recrutée, composée de deux anciennes femmes de ménage en leur promettant un visa pour l’Arabie et la moitié des frais du pèlerinage. Elles ont mis la main sur une sahhara à la mode, une certaine Zineb que l’on disait mariée à un être de l’au-delà, instigateur de ses formules et de ses remèdes censés venir à bout de tous les maux. Elle aurait reçu les plus grands de ce monde sous sa modeste tente, certains citant le président français Jacques Chirac en personne. »
Nous vérifions la cote des sorciers marocains auprès de Mohamed, un fqih en vogue qui tient boutique à Derb Sultan. « Je me rends à la Mecque régulièrement, trois à quatre fois par an, tous frais payés », dit-il fièrement. « Ces dames saoudiennes sont extrêmement friandes de nos compétences. Elles payent très cher pour domestiquer leurs époux, jusqu’à 40 000, voire 50 000 dirhams uniquement pour les mater », poursuit-il. Ce sont, de loin, les meilleures clientes de nos enchanteurs en tout genre.
Nuits barbares
Les nuits de noces des Saoudiennes ressemblent aux nôtres… Il y a 30 ans, dans les centres urbains et aujourd’hui, dans les campagnes. Plutôt barbares, saignantes et mettant en valeur la virilité des hommes. « Il a mis sa main sur ma tête et il a lu la sourate : “Quiconque parmi vous acquiert une femme, un serviteur ou une bête, qu’il pose sa main sur son front et dise : O Allah, je te quémande son bienfait et sa prédisposition à faire du bien et protège-moi contre sa malfaisance et sa prédisposition à faire du mal’’ », raconte Salma, l’une des quatre Saoudiennes. Il l’a ensuite possédée sauvagement. Il s’est avéré par la suite qu’il était homosexuel. Quant aux autres, ce n’est pas mieux, le rituel est le même. Visiblement aux yeux des Saoudiens, leur femme est avant tout la future mère de leurs enfants. Leur plaisir, ils vont le chercher ailleurs. Leila B. nous livre un récit cru, réaliste et sans concessions. Sex and the medina est un ouvrage à ne pas manquer !
Bahaa Trabelsi
Trois questions à Bassima Hakkaoui, députée PJD et militante associative
« Le gouvernement doit réagir »
ACTUEL. Dans les médias comme auprès de l’opinion publique arabe, la Marocaine est souvent assimilée à une prostituée. Comment expliquez-vous cette image négative ?
BASSIMA HAKKAOUI. Nous assistons à une véritable campagne stigmatisant les femmes marocaines et les réduisant à une seule fonction, celle de filles de joie. Il y a certes du vrai, nombre de Marocaines, chez nous comme dans les pays du Golfe, ont fait de la prostitution leur métier, mais cet a priori est nourri davantage par une totale ignorance de la société marocaine.
Cette perception se traduit malheureusement par des restrictions telles que l’interdiction pour une jeune Marocaine de se rendre à Al Omra…
Ce sont de pures injustices. Je me réjouis cependant de la réaction de nombreuses associations et des médias marocains quant à cette stigmatisation. C’est pour moi l’occasion de nous poser la question quant aux véritables raisons de cette perception et d’essayer de rectifier le tir. Pour cela, il faut, à mon avis, commencer par présenter le vrai visage de la femme marocaine.
Que pensez-vous de la timidité de la réaction de nos officiels ?
L’image de la femme marocaine est une affaire d’Etat. Le gouvernement doit assumer toutes ses responsabilités de cette perception dans la mesure où il n’a pas su protéger ses citoyennes. Sinon, comment expliquer qu’on ait laissé des Marocaines partir dans les pays du Golfe avec de faux contrats pour qu’elles se retrouvent otages de réseaux mafieux, dans des situations de quasi-captivité, sans passeport et sans droits ? Le tout au vu et au su de nos services consulaires. Qui a permis à des mafias de s’installer au Maroc et d’y recruter des prostituées ? Et qu’est-ce qui empêche notre ministère des Affaires étrangères de réagir ?
Propos recueillis par Tarik Qattab
Entretien de Leila B.
« J’espère que le fait d’avoir levé le voile sur un pan de leur vie pourra les aider à s’émanciper »
Elle a la plume alerte et pas la langue dans sa poche. Ce n’est pas une œuvre littéraire, mais un témoignage. En exclusivité, Leila B. répond à actuel.
Les héroïnes saoudiennes du récit vont-elles se reconnaître ?
LEÏLA B. : Le contraire m’étonnerait. Cela dit, elles n’iront pas le crier sur les toits. Si ça doit animer leurs conversations secrètes, elles n’ont pas intérêt à divulguer qu’elles ont été mes amies. Ni qu’elles ont lu le livre, si elles l’ont lu. Ce qui ne veut pas dire qu’elles renient cette amitié. Car, au fond d’elles-mêmes, elles savent que c’est dans leur intérêt que j’ai écrit. Par ailleurs, j’ai pris la précaution de changer les noms, de forcer certains traits et de confondre ou d’intervertir les destins afin de les protéger. Et puis, ce qui leur arrive est assez courant dans la société saoudienne, les cas de ce genre sont légion et beaucoup de bourgeoises saoudiennes pourraient se reconnaître dans mon témoignage.
Que pensez-vous des réactions de certaines Marocaines qui vous reprochent de dévoiler la vie secrète de leurs sœurs musulmanes ?
Est-ce qu’on me reprocherait, à moi ou à d’autres, de parler de la vie secrète des Marocaines ? Non ? Alors ? Les Saoudiennes seraient-elles plus sacrées ou plus musulmanes que les Marocaines ? Et, d’une façon générale, pourquoi est-ce que les musulmanes devraient être les seules au monde à demeurer secrètes et leur vie cachée, si ce n’est pour conforter l’obsession des hommes de nier leur existence. Les Saoudiennes, comme toutes les femmes, ont des sentiments, un corps, un sexe, des envies, des défauts, des qualités et des fantasmes. Leur vie n’est pas plus à préserver que d’autres. Et le harem, c’est fini ! Enfin, expliquez-moi ce qu’est cette vie secrète à cacher ? On cache les délits, les coups tordus, mais pas la vie au quotidien de femmes qui, au fond d’elles, aspirent à vivre au grand jour comme tout le monde.
Le fait que les Saoudiennes pensent que les Marocaines sont « des putes sorcières, voleuses de maris» les empêche-t-il de les envier ?
Les Saoudiennes qui ne sont pas instruites, celles qui adhèrent aux convictions de leur mari et ne voient qu’à travers leur ornière, croient peut-être à cette version qui porte atteinte aux femmes de mon pays. D’autres aiment faire aux Marocaines cette réputation, parce qu’elles ont véritablement peur pour leurs maris. Il faut bien trouver des défauts à des femmes libres et perçues comme des rivales. Il faut bien aussi que les Saoudiennes fassent croire qu’elles sont un modèle de vertu. Je crois, enfin, que c’est leur façon de se consoler de ce que les autres ont et qu’elles n’ont pas. Mais au fond, je pense que si elles avaient le choix, elles opteraient pour le mode de vie des Marocaines. S’il leur était possible d’avoir notre liberté de mouvement, notre accès au travail, notre volonté de gagner notre vie, elles ne se feraient pas prier. Vous connaissez l’histoire de l’animal qui ne réussissant pas à attraper le bon fruit préfère penser qu’il est pourri…
La modernité n’a-t-elle pas touché les nouvelles générations de Saoudiennes ?
En apparence et à en juger par le rythme de vie des plus aisées, si. Beaucoup de jeunes filles sont éduquées, d’autres étudient à l’étranger et tant qu’elles sont loin de leur pays, elles se comportent en femmes modernes. Beaucoup sont conscientes des droits qui leur manquent, également. Mais, revendiquer, militer est une autre affaire. Certaines rentrent avec l’intention de tout changer, mais la pression masculine est telle, le poids de la charia est si grand qu’elles ont peur de défrayer la chronique et donc de se faire désigner du doigt ainsi que leur famille. Au final, on a l’impression que les Saoudiennes ne se raccordent à la modernité que lorsqu’il s’agit de progrès technologiques ou de produits de consommation et non lorsqu’il s’agit de révolutionner les mentalités ou de réclamer leurs droits.
Comment le livre a-t-il été accueilli dans les pays du Golfe ?
Je ne cherche pas à savoir. Je veux seulement que mes amies restent anonymes et j’espère que le fait d’avoir levé le voile sur un pan de leur vie pourra les aider à s’émanciper.
Que pensez-vous de la montée du fondamentalisme dans les pays arabo-musulmans ?
En Arabie, on a l’impression que le fondamentalisme a toujours été là, qu’il se maintient et n’aura aucun mal à perdurer. Le problème est qu’il s’exporte chez nous par le biais d’aides économiques, d’opportunités de travail offertes, de supports médiatiques et de prêches en tout genre. C’est pour ça que nous tombons dans le piège. J’en suis sortie édifiée. Je ne mettrai jamais le voile après avoir vu là-bas à quel point ce vêtement n’a rien à voir avec la religion et combien de vices il cache. Si le fondamentalisme guette du côté de chez nous, je sais, personnellement, où jaillit sa source. A laquelle je ne boirai pas.
Propos recueillis par Bahaa Trabelsi
Interview Abdelbaki Belfqih, sociologue et anthropologue
« Un Saoudien veut une épouse certifiée halal »
Pour le sociologue et anthropologue Abdelbaki Belfqih, professeur à l’université de Ben Msik spécialisé en communication et en interculturalité, cloisonnement social et excès sont les deux faces d’une même médaille… Avec des hommes dominateurs d’un côté et des femmes qui se « distraient » comme elles peuvent de l’autre, l’expression « faire avec les moyens du bord » semble prendre tout son sens dans les pays du Golfe. L’autre mauvaise nouvelle, c’est que les choses ne sont pas vraiment près de changer.
Beaucoup de Saoudiennes sont peu désireuses de changer leurs conditions sociales. Pourquoi selon vous ?
ABDELBAKI BELFQIH : On dit très souvent que les femmes sont les premières gardiennes de la tradition. Cette affirmation vient du fait qu’un bon nombre d’entre elles envisagent le respect et l’entretien des coutumes comme les seuls moyens d’assurer la pérennité de leur « pouvoir ». Une mère de famille par exemple aura l’impression que son influence sur son époux, ses enfants et ses domestiques passe nécessairement par la reconduction des choses d’hier, quelle qu’en soit la contrepartie…
Comment décririez-vous les rapports de couple dans une famille saoudienne ?
Encore une fois les rapports sont noyés dans la tradition. Ce qu’un homme souhaite, c’est une épouse certifiée « halal ». Une femme docile et irréprochable qui assurera l’éducation de ses enfants et se pliera à ses quatre volontés. Toutes ces femmes acceptent d’être commandées pourvu que quelques prérogatives leur soient conférées (possibilité de faire du shopping, de mener la belle vie et d’avoir des domestiques).
Quelles sont les « échappatoires » dont disposent ces femmes ?
C’est simple, il y a de tout. D’un côté, elles vont se distraire en dépensant de grosses sommes d’argent sur leur corps, et de l’autre on pourra aussi observer certaines déviances sexuelles. Les femmes vont parfois avoir recours à des attouchements entre elles, parce que les contacts avec le sexe opposé sont réduits à leur minimum pour ne pas dire prohibés.
Comment les hommes saoudiens justifient-ils les excès (recours aux prostituées, alcool) auxquels ils s’adonnent ?
L’intensité des interdits a été atténuée par l’invention et la légitimation de certaines pratiques. Plusieurs types de mariages ont été créés pour permettre aux hommes aisés de faire des choses en principe bannies. Le « jawaz moutâa » (mariage de plaisir à durée déterminée) en est la parfaite illustration. Ce sont surtout les classes sociales élevées qui sont les plus sujettes à de tels comportements, car moins soumises aux contrôles que les autres. L’alcool est la seule chose qui n’ait pas été légitimée, mais là encore, qui viendra vérifier à votre domicile ?
D’où vient la triste réputation des Marocaines dans les pays du Golfe ?
Ce phénomène a débuté dans les années 70. Ils ont commencé à nous prêter de l’argent et leurs ressortissants se sont mis à venir chez nous en tant que touristes. Le fait est que tous ces gens n’avaient pas de culture touristique à proprement parler. Visiter le Maroc voulait dire visiter des cabarets remplis de danseuses et d’ouvreuses. Petit à petit, de nouveaux métiers ont vu le jour, marquant le début du tourisme sexuel khaligien et des clichés sur les Marocaines. A partir du moment où l’on exerce une certaine domination économique sur quelqu’un, on se croit tout permis et surtout on s’autorise à le traiter légèrement. En somme, je dirai que cette réputation est pour beaucoup inhérente au développement des pratiques touristiques.
Sabel Da Costa
Vécu : Bienvenue à Tartuffe City
La bigoterie poussée à son paroxysme apparaît paradoxalement… diabolique. Intolérance, ignorance et perversion : c’est aussi ça la terre du Prophète.
***
Il est trois heures du matin. Après trois heures de route sous une chaleur torride à partir de Koweït City, le minibus s’arrête au poste frontière qui mène à Hafr Al Batin en Arabie saoudite. Bien que l’aube qui marque le début du jeûne soit encore loin, les policiers sont de mauvais poil : un enseignant égyptien qui avait osé hausser le ton pour protester contre la lenteur des procédures se fait passer un savon sous nos yeux avant de voir son passeport jeté au loin. Notre chauffeur, un Yéménite, nous demande de ne pas intervenir. Cela n’a pas empêché les policiers en rogne de démonter notre véhicule. « Marocains ? » La question avait suffi au douanier de service pour exiger de vérifier si on n’avait pas aménagé des caches pour le convoyage de haschich. L’opération va prendre trois bonnes heures durant lesquelles les policiers et les gabelous narquois, sirotant un thé noir, nous observaient à travers les vitres d’un bureau climatisé. « Vous allez effectuer la Omra, pourquoi vous ne portez pas des vêtements décents ? » Le reproche est fait à une dame d’un certain âge qui avait juste un fichu porté négligemment sur la tête. On aura régulièrement droit à des remarques désobligeantes de ce style ; un barbu de service va même nous reprocher de porter pantalon et chemise. C’est « makrouh » explique-t-il avec force hadiths, autrement dit, ce n’est pas complètement haram mais c’est tout comme.
Un ghoulam de service
On redémarre, direction Buraydah, on nous avait prévenus : la traversée du désert de Dahna est particulièrement ardue même si les autoroutes dans le saint des saints feraient pâlir de jalousie n’importe quel bolide américain. Le problème, c’est le paysage, un paysage sidéral, aucune espèce de végétation si ce n’est des ronces et des cailloux à perte de vue ; et de temps à autre une aire de repos. La station service, couplée avec une gargote, et la mosquée transpirent la saleté. « C’est le fief des camionneurs qui ne sont pas particulièrement portés sur la propreté », explique l’un des passagers qui nous précise que, souvent, les chauffeurs de poids lourd sont accompagnés d’un jeune adolescent : « C’est le ghoulam de service, il est bon à tout faire, il fait fonction autant de graisseur que d’exutoire sexuel pour des chauffeurs qui sont parfois obligés de s’absenter du domicile conjugal plusieurs jours », renchérit Rachid, un prof qui a passé près de quinze ans à Oman. Effectivement, on ne verra pratiquement pas de femmes durant notre séjour. Juste quelques silhouettes fantômes enveloppées de noir au détour d’une ruelle, spectres sans visage.
Plus d’une journée pour traverser cette région inhospitalière avant d’arriver à Médine. La ville est plutôt agréable et les gens sont d’une chaleur incroyable. La cité du Prophète semble avoir gardé une sérénité à toute épreuve, les cafetiers vous servent le sourire aux lèvres et les gens se plient en quatre pour vous être agréables. Trois jours plus tard, nous allons déchanter. De Médine à Jeddah, il nous faudra endurer presque douze heures de route avec les mêmes paysages de désolation. De multiples contrôles policiers nous font perdre jusqu’à une demi-heure par arrêt. Une fois dans la ville sainte, nous voilà la proie des requins de l’immobilier, des Asiatiques à la solde de patrons saoudiens. Après de sordides marchandages, nous sommes obligés de nous entasser à dix dans une maison de quatre chambres, payée l’équivalent de 3 000 dirhams la nuit.
Le lendemain, à trois heures du matin, la ville sainte est particulièrement animée ; les commerçants chinois ont du mal à satisfaire la demande. Quand tout ce beau monde trouve-t-il le temps de se consacrer aux rituels ? Un hôtelier, ayant pignon sur rue à Marrakech, a eu le malheur d’accompagner sa maîtresse dans le quartier des bijoutiers. Il baisse les yeux, contrit, car il espérait passer incognito. A la porte Ibn Abdelaziz, sur l’escalier qui mène à l’intérieur de la Mosquée sacrée, un « moutawaa » (agent de la police religieuse) m’arrache violemment le journal que je tiens à la main : « Haram ! » C’était pourtant un quotidien en langue arabe.
Abdellatif El Azizi
Extraits de Sex and the medina
« Mon bourreau n’est pas le GI ni le juif, c’est mon propre frère de sang ! »
[…] Le Maroc n’est certes pas le meilleur pays où il fait bon vivre, mais il est l’éden à côté de certains pays du Golfe. Bienvenue dans l’enfer des Saoudiennes. […]
Nuit de noces saoudienne
[…] Vous devez vous en douter, ce fut un vrai cauchemar ! Sitôt qu’il a prononcé la formule : « Bénis-la pour moi et bénis-moi pour elle », il m’a foncé dessus et m’a arraché mes vêtements. J’ai voulu fuir dans la chambre d’à côté, mais il m’en a empêchée. Je ne savais même pas à l’époque comment était fait un sexe de femme, ni comment Dieu l’avait scellé. Il m’a coincée au fond de la chambre et m’a portée de force jusqu’au lit. En deux mouvements, il a arraché ma robe et il s’est rué sur moi. J’ai crié, il a mis une main sur ma bouche et de l’autre il a relevé son thobe. Il y est allé de plus en plus fort, avec des gestes de sauvage. Je criais mais il ne voulait pas savoir qu’il me faisait mal, seul le tenaillait le souci d’assouvir son appétit. Je me suis évanouie. Quand je me suis réveillée, j’ai vu le sang qui coulait entre mes jambes et j’ai vomi. Je me suis dit : si c’est ça faire l’amour, eh bien, je n’en veux plus. […]
Saoudiennes au lit
[…] Farah : Et comment le voulez-vous au lit ?
Joumana : Empressé et patient à la fois.
Soha : Respectueux et poète en ce qu’il peut me dire des mots d’amour.
Salma : Qui n’a jamais couché avec une autre, je serais sa première.
Farah : Ça vous en fait un couple, ça ? Deux puceaux au lit, avec un prospectus si ça se trouve ! […]
Objet sexuel
[…] —Les hommes aiment aussi les filles expérimentées et qui savent s’occuper d’eux, a avancé Soha sur un ton d’hésitation.
—Oui, mais pas trop, comme dit belle-maman. Il faut toujours leur laisser croire qu’ils sont les maîtres à bord. Et que ton expérience, elle vient de te tomber dessus, comme ça, par magie, parce que c’est lui, ton inspirateur suprême. A partir du moment où un homme croit que tu consommes comme lui, il se cabre. S’il s’aperçoit qu’il sert d’objet sexuel, sa virilité en prend un coup. […]
Chirurgie esthétique
[…] Tu verras, tu auras la plastique de Haïfa Wahbi, en mieux », a assuré Farah. Soha, qui adorait la chanteuse libanaise, a eu l’air satisfait.
Il faut dire qu’elle n’est pas la seule à être fascinée par ces femmes refaites, blanches et dodues, qui chantent à l’écran comme on fait l’amour sur une banquette, avec mimiques et simulations lascives, vêtues de robes échancrées jusqu’à la raie des fesses, parfois de nuisettes transparentes, sans pour autant être dotées d’un vrai talent. […]
Politique
[…] Joumana : Vous suivez le feuilleton le plus sordide des vôtres, en vous plaignant d’être des victimes. Moi, mon ennemi ce n’est pas l’Amérique, c’est la bande à Saddam. Mon bourreau n’est pas le GI ni le juif, c’est mon propre frère de sang ! Cette fois, même moi, je me suis sentie mal à l’aise et j’ai eu des soupçons quant à la fibre arabe de mon amie. […]
Aphrodisiaques
[…] J’exposais tout le savoir sexuel de mon pays sous les yeux de mes amies, comme on exhibe les preuves de bonne santé ou les bonnes références d’un candidat à l’embauche. Nous étions assises autour de la petite mallette dont je sortais et nommais au fur et à mesure les produits, avant d’en détailler la composition et les conseils d’usage. Il y avait là de quoi faire lever les verges les plus paresseuses, m’avait juré Nora, du lamsakhen (à base d’écorce de noix de muscade) à profusion, du sanouje (nigelle) sous forme de miel, du gingembre, à cuire de préférence avec un hérisson, du sellou, gâteau bourré d’amandes et de graines de sésame. Sans oublier le carvi et le poivre à semer en abondance dans les mets. […]
Les beurettes
[…] Celles que les Français appellent les « beurettes » sévissent dans les lieux de débauche comme à Damas, je l’avais vu de mes propres yeux. Elles vous arrachent un client en deux tours, leur font perdre l’esprit en dignes héritières des sortilèges de harems, se font glisser les dollars entre les seins, s’installent sur les genoux des vieux du Golfe afin de mieux les plumer, le vin coulant jusqu’à leur nombril ! […]
Copyright Plon 2010
Editing actuel
Comment garder un mari, selon une grand-mère saoudienne
[…] Pour garder son mari, il convient de bien faire la cuisine, les hommes, on les tient par le ventre, le sexe vient après. Y aller des compliments, les hommes sont des narcissiques et leur image compte plus que le reste, il faut leur faire croire qu’ils sont les meilleurs. S’intéresser à ce qui intéresse son époux, fût-ce par hypocrisie. Que ce soit la politique, l’argent ou le foot, faire semblant d’être passionnée parce qu’il l’est d’une de ces activités. Lui donner l’impression qu’il est le plus beau, le plus sympathique, le plus intelligent. Lui offrir le cadeau qui le lui prouve. L’encourager dans ce qu’il entreprend pour montrer que sa réussite vous importe plus que la vôtre. Etre aux petits soins avec sa famille, il n’aura plus de problèmes de conscience. Aimer sa mère, même du bout des lèvres. Lui montrer que l’homme c’est lui, pour tout ce qui est prise de décision, travail pénible et toute autre initiative de responsabilité déclarée. Au lit, lui faire croire que c’est lui le chef d’orchestre et que votre talent ne relève pas de la pratique mais d’une sorte de révélation que vous lui devez.[…]
Source : Actuel, 18/9/2010
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