La fumée qui s’élève au-dessus de la ville de Laâyoune n’est pas celle d’un immense barbecue auquel a été conviée, avec les honneurs, une population sahraouie sollicitée dans les règles des droits de l’Homme, à adopter le plan d’autonomie proposé par le roi du Maroc. Un tel scénario nous aurait sans aucun doute réjouis. Hélas, ce n’est malheureusement pas le cas. Laâyoune brûle. Laâyoune est sinistrée. Laâyoune vit de tristes moments dominés par la peur et la haine, dans un climat de terreur sans précédent. En dépit du huis clos qui couvre cette tragédie, la gravité de la situation a fini par alerter l’opinion publique occidentale qui ne cesse de se mobiliser afin de contraindre les gouvernants à s’enquérir personnellement et en urgence des évènements.
Des milliers de personnes se sont rassemblées récemment à New York, à Paris, à Madrid et à Rome pour exprimer leur inquiétude grandissante vis-à-vis des violations flagrantes des droits de l’Homme commises par l’armée et la police marocaines, sans compter les nombreux « supplétifs », ces exécutants de l’ombre. Cette mobilisation représente la conscience du monde qui s’éveille, nous en sommes persuadés. Et le Maroc a grandement intérêt à regarder la réalité en face en arrêtant de voir la main de l’Algérie partout où le soleil se lève. L’armée nationale populaire, que nos voisins accusent à tort et à travers en fabriquant des histoires l’impliquant dans le conflit du Sahara occidental, s’est toujours élevée au-dessus de ce genre de débat destiné à faire diversion.
L’ANP n’a pas d’avis politique à donner sur ce thème. Ce n’est ni sa mission ni ses prérogatives. En réalité, et nos voisins le savent mieux que quiconque, l’armée algérienne est suffisamment imprégnée des hautes valeurs humaines plantées par la glorieuse ALN et les grands idéaux portés par une génération de moudjahidine guidés par la lumière de la première Etoile nord-africaine pour qu’elle s’engouffre dans des sentiers parallèles et des pratiques déloyales condamnées sur les plans humain, politique et réglementaire. Elle est née dans les entrailles de la nuit coloniale et a combattu pour les mêmes objectifs voulus par l’Emir Abdelkader, Abdelkrim El Khettabi et tous ceux qui sont venus après. Les Algériens sont très bien placés pour exprimer une révulsion sans limite vis-à-vis du colonialisme, et c’est partant de ce puissant et légitime sentiment qu’ils se sont engagés à faire du droit des peuples à l’autodétermination l’un des principaux fondements de leur politique étrangère. Cette position est aujourd’hui partagée par de nombreux pays qui ont reconnu la légitimité de la lutte du peuple sahraoui. Et les voix qui s’élèvent pour demander au Maroc de se conformer aux différentes résolutions de l’ONU se multiplient, au grand désarroi des partisans du statu quo.
Du point de vue du droit international, le cas sahraoui relève des problèmes de décolonisation. Il est donc tout à fait déraisonnable de croire ces affabulations autour d’un prétendu rôle obscur qu’aurait joué l’Algérie. Notre pays a une réputation en or massif dans ce domaine. Il a toujours soutenu en clair et avec force tous les peuples en lutte pour leur liberté. De Tlemcen à Tébessa et de Bejaia à Bordj Badji Mokhtar, la majorité écrasante des Algériens n’entretient ni haine ni rancœur à l’encontre des frères marocains. Les affinités entre les deux peuples sont tellement fortes que toutes les tentatives de les mettre dos à dos sont vouées à l’échec. Ici en Algérie, les noms d’El Khettabi, Mohamed V, Abraham Serfati, Mehdi Benbarka, Benbarka et Saïd Aouita, entre autres, trônent toujours en bonne position, indifférents aux aléas de la politique. Chez nos voisins, c’est pareil, en ce qui concerne nos héros et nos symboles, et cela n’a rien d’extraordinaire aux yeux des millions d’Algériens et de Marocains qui rêvent de construire un Maghreb serein et à l’abri des « tempêtes de sable » qui balayent aujourd’hui tout le territoire du Sahara occidental.
Le droit à l’autodétermination n’étant guère une « invention algérienne », combien de temps faudrait-il donc au Maroc pour qu’il se libère de ses contradictions internes qui l’empêchent de répondre favorablement à cette exigence historique posée par un peuple à l’appartenance bien ancrée ? Y a-t-il une voie plus salutaire que l’option référendaire ? Une bonne partie de la réponse à ces questions se trouve chez les Sahraouis. Aux Marocains de faire preuve d’une bonne écoute. Du prophète Mohamed (que le salut soit sur lui), aux dirigeants contemporains de toutes les races, tous les conflits ont été réglés de manière consensuelle. L’Histoire a toujours été une suite de concessions qui ne sont en fait que la juste réplique à notre propre orgueil
Par Ammar Khelifa
El Djazair, Décembre 2010
Par Ammar Khelifa
El Djazair, Décembre 2010
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