Même si certains médias occultent d’en parler comme les journaux télévisés des chaînes publiques, le continent africain concentre beaucoup de territoires à risque et de conflits encore non résolus. Ruedesinfos.fr va donc mettre en lumière ces zones d’ombre pendant quelques semaines.
Le premier sujet est un conflit très méconnu en Europe et pourtant il est aux portes de ses frontières. Le Sahara Occidental est une région du Maroc qui réclame son indépendance depuis le départ des Espagnols en 1976. Non reconnu indépendant juridiquement par l’ONU (Organisation des Nations Unies), ce territoire est revendiqué par le Maroc et par la République arabe sahraouie démocratique qui est soutenue par l’Algérie.
Une situation tendue
Deux autorités s’affrontent pour ce territoire : le Maroc et le Front Polisario qui est à la tête de la République arabe sahraouie démocratique (RASD). Ce mouvement politique et armé a d’abord été créé en 1973 pour lutter contre l’occupation espagnole. Puis, en 1976, il s’est opposé au Maroc qui voulait annexer le Sahara Occidental à son territoire.
La guerre au Sahara Occidental commence le 6 novembre 1975 par la marche Verte qui symbolise la volonté du Maroc à avoir ce territoire après le départ des Espagnols. Ces derniers décident de faire les accords de Madrid qui confirme le partage du Sahara Occidental entre le Maroc et la Mauritanie. L’Algérie qui est aussi un pays frontalier n’a pas été consulté pour ce partage. Mais, le front Polisario ne veut pas se laisser faire et fonde la République arabe sahraouie démocratique le 27 février 1976. L’armée de ce front attaque alors les forces marocaines et mauritaniennes et cela se traduit par les guerres d’Amgala qui voient, en plus du Maroc, de la Mauritanie et du RASD, l’Algérie en prendre part en soutien à la RASD. Sous fond de Guerre Froide, l’Algérie qui est du côté de l’URSS se met en guerre face au Maroc qui est soutenu par les Etats-Unis.
En 1979, le front Polisario profite d’un coup d’Etat en Mauritanie pour signer un traité de paix avec ce pays et ainsi récupérer le territoire donné par les Espagnols. Le front Polisario reste donc en guerre avec le Maroc qui dresse un « mur de défense » en 1981 cédant 20% du Sahara Occidental. La guerre prend fin en 1991 avec un cessez-le-feu initié par l’ONU.
Depuis, les négociations sont au point mort car le Maroc ne veut pas faire de référendum sur la question de l’indépendance du Sahara Occidental. Mais, l’ONU cherche maintenant à accélérer le mouvement car de nouveaux incidents commencent à raviver les passions. En Février, lors du Forum Social Mondial à Dakar, des femmes sahraouies ont été pris pour cible par de jeunes marocains suite à une conférence sur ce conflit et elles ont ensuite été mises sous protection policière tout au long de cet événement. Auparavant, un raid des forces de sécurité du Maroc contre un camp d’opposants près de la capitale du territoire, Laayoune, en novembre dernier a mis en lumière de nouvelles frictions. Le Polisario a affirmé que 36 personnes avaient été tuées et 700 autres blessées. Le Maroc a indiqué pour sa part que 11 agents de sécurité marocains et deux civils avaient été tués.
L’ONU en renfort
Suite aux révolutions arabes dans de nombreux pays, l’ONU veut éviter que le conflit du Sahara Occidental soit un sujet sensible supplémentaire. Le Conseil de Sécurité a donc décidé à l’unanimité de prolonger le mandat de l’ONU sur ce territoire. Depuis maintenant 20 ans, cette institution internationale renouvèle sa mission au Sahara Occidental même si les pays membres de l’ONU ne sont pas tous en accord sur la marche à suivre et que les pays concernés ne trouvent pas de solution. Le Maroc ne veut pas entendre parler d’un référendum sur une auto-détermination proposé par l’ONU et les négociations semblent au point mort comme l’a indiqué Ban Ki-moon, le secrétaire général de l’ONU dans un rapport : « Aucune des parties n’a accepté la proposition de l’autre en tant que seule base de négociation et aucune n’a pris à ce jour des mesures qui indiqueraient qu’elle est disposée à avancer sur la voie d’un compromis acceptable ». Pour autant, le Maroc a fait un premiers pas en créant un Conseil des Droits de l‘Homme au sein du pays ce qui permet à des enquêteurs des droits de l’Homme de l’ONU d’aller sur le territoire du Sahara Occidental
Dans le but de « continuer de montrer une volonté politique et à travailler dans une atmosphère propice au dialogue dans le but d’entrer dans une phase de négociations plus intensive et substantielle », l’ONU est sur le terrain grâce à MINURSO (Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental). Cette mission a pour responsabilité de surveiller les activités militaires des deux parties et à travailler en vue de l’auto-détermination.
Une position internationale loin d’être claire
Evidement, le monde entier donne leurs avis sur ce conflit et ces derniers divergent. Par exemple, la France est dans le camp du Maroc alors que l’Afrique du Sud soutient le RASD ce qui donne lieu à des débats houleux à l’ONU. D’ailleurs, la France en a pris pour son grade en ce mois d’avril : « La France intervient militairement en Côte d’Ivoire, en Libye, en invoquant la protection des populations civiles, mais refuse l’établissement de mécanisme au Sahara occidental, pouvant aider à protéger les populations des violations et des abus. Le peuple sahraoui défend des principes universels, que sont la liberté, la démocratie et le droit de déterminer librement et sans contrainte son destin. Beaucoup pensent que le conflit du Sahara occidental serait réglé depuis belle lurette, n’eût été l’attitude manifestement hostile de l’Etat français à l’endroit des revendications légitimes à l’autodétermination du peuple sahraoui » a déclaré M. Mohamed Abdelaziz le président de la RASD. C’est en Afrique que ce conflit a le plus de répercussions car le Sahara Occidental ainsi que le RASD sont reconnus par l’Union Africaine depuis 1982 ce qui a poussé le Maroc de s’en retiré. Le pays maghrébin est alors le seul de l’Afrique à ne pas faire partie de cette organisation régionale.
De son côté, la Ligue Arabe soutient de tout son poids le Maroc et ne reconnaît à aucun moment l’existence de la RASD. Ce conflit est d’ailleurs le principal frein à la construction de l’Union du Maghreb Arabe qui l’organisation économique et politique formée par cinq pays (Maroc, Algérie, Tunisie, Libye et Mauritanie).
Outre les enjeux territoriaux, le conflit entre le Maroc et le Sahara Occidental cache un enjeu économique puisque la zone tant convoitée est riche, voire très riche en phosphate. Sans cette ressource, le Sahara Occidental n’aurait sans doute pas été autant désiré. En mai, l’ONU organise une nouvelle session de discussions entre le front Polisario et le Maroc afin d’essayer de faire avancer le dossier.
Rue des Infos, 02/05/2011
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