En tant que croyant au Coran et en la Sunna et animé par le Nationalisme Panarabiste, je me permets de vous adresser ce télégramme, au moment où je crois qu’il mérite d’être envoyé.
Pour être tout à fait clair, je dis, dès le début, que le sujet de ce télégramme est le Sahara Occidental, qui comprend la Saguia el-Hamra et le Rio de Oro.
Respectable Roi,
Le 11 juin 1972, j’ai déclaré, moi-même, dans un discours public que la République Arabe Libyenne assumera sa responsabilité panarabe et soutiendra une guerre populaire de libération au Sahara Occidental si l’Espagne ne se retire pas de cette contrée. Personne, à l’époque, ne m’a dit que je m’immisçais dans une question d’un territoire marocain. Je n’ai pas parlé de Sebta et Melilla, jusqu’à maintenant encore occupés par l’Espagne, parce que cela concerne la souveraineté nationale marocaine.
Au début de l’année 1973, il y avait une véritable guerre de libération sur le territoire du Sahara Occidental mené par le Front Populaire pour la Libération de Saguia el-Hamra et Rio de Oro (Front POLISARIO). La République Arabe Libyenne a accompli son devoir panarabe en soutenant le POLISARIO avec des armes et en lui ouvrant un bureau à Tripoli.
Il convient de rappeler que les pays aujourd’hui concernés par cette question n’ont pas coopéré avec la République Arabe Libyenne dans l’approvisionnement du POLISARIO et ils n’ont pas coopéré dans d’autres aspects. Ces pays ont plutôt confisqué les armes qui étaient envoyées de la République Arabe Libyenne au POLISARIO.
Jusqu’à 1975, quand vous êtes devenu une partie déclarée dans cette question, je vous ai confirmé, par la voie des représentants que vous avez envoyés à cette époque, que la capacité militaire de la République Arabe Libyenne était à votre disposition si vous décidiez de libérer le Sahara Occidental du colonialisme.
Cependant, ce qui est arrivé c’était que vos forces sont entrées dans une opération d’octroi et de réception du Sahara de la part de l’Espagne, « et que Dieu puisse épargner les fidèles de la guerre ». Jusqu’à présent, je déclare pour l’histoire, que je ne suis pas contre le Maroc. Je croyais que les habitants du Sahara, dirigés par le POLISARIO, n’étaient pas contre l’intégration au Maroc et j’ai remercié Dieu pour le fait que le rôle de la République Arabe Libyenne ait fini couronné par la sortie du colonialisme d’un pays arabe.
Dieu sait combien j’ai essayé de convaincre la direction du POLISARIO de vous joindre après l’indépendance. Vous vous rappelez, sûrement, des garanties que j’ai eues de votre part pour les membres du POLISARIO. Je ne nie pas que vous m’avez confirmé ces garanties via vos envoyés et via l’ambassadeur marocain à Tripoli.
Respectable frère, Roi,
Ce qui est arrivé au Sahara Occidental aujourd’hui est très dangereux, indépendamment de la nature des nombreux dérapages qui ont mené à cela. Les habitants du Sahara, dirigés par le POLISARIO, ont maintenant déclaré au monde qu’ils ne sont ni Marocains, ni Algériens, ni Mauritaniens et que ce sont les fils du Sahara qui ont pris les armes et ont libéré leur pays, et personne d’autre.
L’opération d’annexion du Sahara au Maroc est ainsi devenue, sans équivoque, une opération d’annexion obligatoire. Je parle ici de la réalité et les résultats, pas des raisons et des causes. Je ne me suis pas opposé, jusqu’à maintenant, à l’annexion du Sahara Occidental au Royaume du Maroc ou à la Mauritanie et je ne peux être contre le peuple marocain frère ou contre l’armée marocaine dont le sang coule toujours sur le Golan.
Au contraire, je suis parmi ceux qui croient en la nécessité de l’unité arabe de l’Océan au Golfe et parmi ceux qui œuvrent avec acharnement pour cela et qui prêchent pour son inévitabilité. Mais il est peu raisonnable d’ignorer la volonté d’un des peuples arabes, qui s’est battue contre cette annexion jusqu’au point de se jeter dans les frontières algériennes. Tindouf est maintenant concentrée de tentes de Sahraouis qui ont fui cette annexion, comme des tentes de pèlerins à La Mecque. Qui peut nier, cher Frère, cette tragédie ; et qui peut nier la volonté des habitants du Sahara ; et qui peut nier le droit de ceux qui, seuls, ont pris les armes pour libérer leur pays ?
Je ne parle que de vérités tangibles, je ne suis pas partie concernée dans cette dispute territoriale. Je ne parle pas de l’annexion ou du contraire, car l’annexion est maintenant devenue forcée et son succès ou son échec dépend de l’extermination du peuple sahraoui ou de l’armée marocaine – et les deux choses seraient catastrophiques pour nous tous. « Celui-ci est mon père quand je l’appelle et celui-là est mon oncle ». Si nous commençons à utiliser cette méthode, la méthode de l’unité par la force contre les peuples, la carte de la nation arabe changerait et cela inclurait la carte de mon pays et celle du vôtre.
Majesté, si vous étiez en guerre contre des séparatistes à l’intérieur du Royaume du Maroc, nous nous battrions à côté de vous ; et si vous vous battiez contre des colonisateurs étrangers au Sahara, nous nous battrions à côté de vous ; mais maintenant que vous vous battez contre un peuple qui dit non, alors nous ne serons pas de votre côté.
La voix que le monde doit entendre est celle du peuple sahraoui, soit-elle pour l’unité avec vous ou pour l’indépendance à côte de vous.
[Finalement, je ne peux rien dire de plus, sauf ce que Dureid Ibn el-Simma a dit à son peuple : (un poème)]
Votre frère, le Colonel Mouammar el-Kadhafi, le 28 février 1976.
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