Des accusations sans preuves aux objectifs évidents

La décision du gouvernement algérien de ne pas s´impliquer aux côtés de l´une ou de l´autre des deux parties au conflit libyen et de plaider en faveur d´une solution pacifique par la voie du dialogue lui a valu, décidément, bien de l´hostilité dans le camp des partisans de la guerre à outrance et de l´instabilité de ce pays frère et voisin.

L’opposition libyenne relayée généreusement par des médias levantins et occidentaux aux ordres et jusqu´au gouvernement marocain par le biais de son lobby juif aux Etats-Unis a tout tenté pour faire accréditer d´abord la thèse du «transport» puis du

«financement» des mercenaires africains pour épauler les partisans du colonel Kadhafi. Ni les communiqués et déclarations répétées du gouvernement algérien démentant de telles accusations infondées et tendancieuses, ni même l´absence de la moindre preuve sur ces allégations n´ont réussi à calmer cette campagne de dénigrement contre l´Algérie qui a su conserver son self-control face à de telles provocations.

Il aura donc fallu le démenti ferme du commandant en chef américain d’Africom sur le bien- fondé de ces accusations pour que cette conspiration anti-algérienne observe enfin un recul, tactique toutefois. A voir pourtant les choses de plus près, la conspiration vient plutôt du camp opposé, celui des partisans de l´instabilité au Maghreb et au Sahel.

Le vrai trafic d´armes
Premier indice vérifié sur le terrain par les experts de la CIA qui encadrent les insurgés à Benghazi, parmi lesquels des «anciens» d´Irak et d´Afghanistan, le trafic de guerre vers le nord du Mali. Un lot de Sam 7 de fabrication russe a été acheminé sous les yeux (fermés) des espions français qui pullulent dans la région, les seuls à n´avoir pas vu ce convoi de matériel militaire ultra sophistiqué dont rêvent les armées africaines.

C´est ce moment que le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, a choisi, en avril dernier, pour, selon son expression, «s´informer» auprès de son homologue algérien, Mourad Medelci, de ce qu´«on dit dans des cercles de presse à Paris sur le trafic d´armes pour le compte des partisans de Kadhafi à travers les frontières du sud-est algérien.

Une diplomatie à l´écoute de la rumeur publique. La démarche de M.Juppé dont le pays est impliqué résolument dans les bombardements en Libye présidait, en fait, d´une autre intention que celle du simple souci de s´informer.

Le relais marocain
Le gouvernement marocain se saisit de cette initiative pour activer ses relais juifs aux Etats-Unis pour tenter de nuire aux solides relations de coopération antiterroriste entre Alger et Washington dans la région du Maghreb et du Sahel. Les autorités marocaines soutiennent que les hommes du Front Polisario (mouvement de libération du Sahara Occidental, ndds) «contrôlé par l´Algérie» assistent les partisans de Kadhafi.

Une accusation qui se fonde sur de simples allégations là encore, mais que les Etats-unis n´ont pas prise au sérieux. C´est de ce climat de provocation que les autorités marocaines ont multiplié, paradoxalement, leurs appels à l´ouverture de la frontière terrestre entre les deux pays fermée à l´initiative de l´Algérie depuis 1974, au plus fort d´une autre campagne encore plus insidieuse mettant en cause les services de sécurité algériens dans l´attentat terroriste contre un hôtel de Marrakech qui avait coûté la vie à deux touristes espagnols.

Il est notoire que le Maroc trouverait largement son compte dans la réouverture de cette frontière qui deviendrait dans les conditions actuelles la voie privilégiée pour le trafic d´armes et de drogue en provenance de ce pays voisin. «Cette question n´est pas à l´ordre du jour !» a tranché le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, dans sa conférence de pesse de dimanche dernier.

Dommages collatéraux ?
La prudence de l´Algérie qui a renoué avec la stabilité au prix le plus fort se justifie, sans toutefois rien enlever à sa conviction de mise en place d´un ensemble régional fondé sur la paix et la solidarité. Cette solidarité s´exprime à travers ses appels répétés à une solution pacifique au conflit libyen à travers la voie du dialogue. Car, aujourd´hui, ce sont les Libyens eux-mêmes qui paient le prix de l´intervention militaire étrangère qui fait des victimes par dizaines, tous les jours, dans les deux camps.

Les «alliés» qualifient leurs bavures qui ont tendance à se reproduire de «dommages collatéraux», comme dans le cas de la dizaine de victimes civiles de l´intensification des bombardements de Tripoli. Ces «dommages collatéraux» prennent différentes formes et tout aussi tragiques que les bombardements des zones urbaines.

La tragédie qui s´est produite jeudi au large des côtes tunisiennes et qui a fait 200 morts parmi les 800 personnes, la plupart originaires de pays subsahariens qui fuyaient la guerre en Libye pour se rendre dans la petite île italienne de Lampedusa n´est pas inédite.

C´est une conséquence évidente de cette guerre dont personne n´ose imaginer pour le moment l´issue et qui risque d´être encore plus coûteuse en vies humaines. Une difficulté pour l´Europe qui paie la facture de son engagement militaire en Libye. Les partisans de la guerre de Libye sont ceux qui ont fait campagne pour tenter d´impliquer l´Algérie dans ce conflit, pour d´autres objectifs que ceux qu´ils prétendent défendre.
Le Temps d’Algérie, 03/06/2011

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