Hassan II & Driss Basri : Conférence de presse à titre posthume

Pour cette mission délicate, nous avons dépêché notre éternel stagiaire/pigiste/responsable caféine.  Il avait déjà brillé en interviewant l’auguste feu Sa Majesté Hassan II. Voici son compte rendu
le CJDM a été invité à la conférence de presse exceptionnelle, organisée par feu Hassan II -contributeur contractuel à la dépêche MAPlol- défunt Roi du Maroc et Commandeur des Moutons Croyants et feu Driss Basri, défunt Ministre d’Etat, Ministre de l’Intérieur et Statisticien à ses heures perdues (on lui doit notamment la démonstration de la loi Bassrya, en vertu de laquelle la probabilité qu’un quartier de nihilistes (ou agitateurs) peut se retrouver à voter à la droite du Makhzen tend vers 1 au fur et à mesure que sa population s’étoffe d’électeurs décédés, de cousins éloignés et de bidonvillards cravachés par le Moqadem. (Disclaimer: la description plus longue et plus exhaustive du Ministre Basri ne manque en rien au respect dû au Père (fouettard) de la Nation, dont la description prendrait une dizaine de volume, à l’image du « Registre du Génie Hassanien »).
Ces deux augustes personnages -le premier étant plus auguste que l’autre- ont tenu à convoquer une conférence de presse, de l’au-delà, afin de commenter les résultats du Référendum et son issue heureuse pour le peuple marocain, son Roi Sa Majesté Sérénissime et Royale Mohammed VI que Dieu le glorifie et lui garde ses costards rayés très classe de la mort qui tue. Ils ont tenu à s’exprimer sur un autre virage hist… on me glisse à l’oreillette qu’il s’agit d’un tournant (plutôt qu’un virage) tout aussi historique que l’indépendance, ou la signature du traité du protectorat.
Dans la grande salle comble de journalistes -certains décédés, d’autres bien vivants- venant du monde entier, le Roi et son Ministre-homme de main s’installent derrière un somptueux bureau, décorés de lourdes draperies de couleur verte, brodées d’or et ornementés de petits drapeaux marocains. Sur le mur derrière, deux gigantesques portraits de Hassan II et de son auguste fils confirment l’aspect solennel de cette conférence.
Hassan II muni de son attribut ministériel
Le Défunt, Sa Majesté Hassan II Ben Mohamed Alaoui, commence par lire un bref communiqué:
« Mon Cher Peuple,
Avec l’aide de Dieu, j’annonce la tenue d’un référendum constitutionnel. Permets-moi de mettre ce discours aseptisé de côté, et de te parler, les yeux dans les yeux.
Ceci est la quatrième réforme constitutionnelle que notre royaume bienheureux engage depuis son indépendance, la première depuis mon départ pour un plus grand royaume (où je suis Roi aussi, sauf que Dieu a fait ses valises, et se retrouve maintenant dans la Capital des Roses de l’au-delà) et je puis te dire, en toute honnêteté, que j’espère franchement que tu continueras dans la voie de servir ton Roi, ta Patrie et Ta Religion, en Votant Oui à cette constitution; Et je suis certain et serein, cher Peuple, que tu voteras Oui (autrement, il y en aura qui visiteront la Capitale des Roses, celle de l’au-delà et celle sur terre) »
à ce moment, il repose la feuille sur le bureau, puis, reprenant son coupe-papier favori, se mit à expliquer son sentiment:
Et je ne peux qu’exprimer ma joie, mon cher peuple, à la suite de ton empressement à voter Oui. Certes, cet empressement vil, obséquieux et servile à répondre aux désir du maître peut être jouissif, mais je te le répète, cher peuple, 98% de Oui… Grand Dieu! Mais ce plébiscite, cher peuple, tu n’as pas été le seul à le réaliser: nous saluons le travail minutieux et méticuleux de notre serviteur Driss Basri, ses subordonnés au Ministère de l’Intérieur, les Moqadems et Chioukhs, pour leurs efforts soutenus et patriotiques pour convaincre, vous citoyens, mon cher peuple, de voter POUR cette constitution. Une nouvelle page a été écrite dans l’histoire glorieuse de notre royaume. »
Driss Basri, à l’écoute de son maître, a le visage radieux, l’œil mouillé et la bouche tremblotante devant l’hommage que lui rend, en direct, son Roi.
« Votre Majesté. les mots me manquent pour décrire ma gratitude. Mais sachez, Sire, que je le suis, et bien plus que vous ne le pensez -à ce moment, Driss Basri se jette sur la main Royale qu’il badigeonne de sa salive, ce qui semble amuser et satisfaire Hassan II- Je disais donc que la nouvelle constitution a été voté oui par 98% des voix, avec un taux de participation de 72% des inscrits. Sire, vous n’avez peut être pas écrit cette constitution, mais Par Dieu, il était de mon devoir, il était du devoir de la famille du Ministère de l’Intérieur et des forces vives de la nation, de faire voter massivement  ce merveilleux document. Sire, vous être bon, généreux, et vous êtes formidables.
Comme vous pouvez le constater messieurs, le Oui est uniforme sur toutes les régions du Royaume. C’est la preuve d’abord qu’il y a un consensus national autour de ce document, car écrit par le peuple (exclamation de journalistes, promptement dégagés de la salle) et que les Marocains se sont levés, comme un seul homme pour faire entendre leur enthousiasme pour la nouvelle constitution. Les bureaux de vote ont fait le plein dès 8h du matin, ce qui illustre bien l’exaltation générée par ce texte, et je pèse mes mots de policier défenseur du trône, révolutionnaire. Majesté, Sire, vous êtes un génie, et le vôtre a inspiré les « agnag » qui ont mis en forme vos idées et celles de votre fils. Je suis à votre service même mort, Sire »
Après cette brève introduction, la première question émane de M. Fahd Yata, de la Nouvelle Tribune:
– « Votre Majesté, Monsieur le Ministre: allez-vous enfin engager une campagne de purge à l’encontre des ennemis de la nation, ces homosexuels, lesbiennes, athée et pro-polisarios membres du ci-devant « 20 Février »? Et Merci. »
Driss Basri: « Votre question objective et impartiale me semble pertinente. Au regard de la pression internationale, nous nous réfrénons d’avoir l’air de les remettre sur le droit chemin, celui tracé par notre lumière à tous, Sa Majesté Hassan II, et perpétué par son glorieux fils, Sa Majesté Mohamed VI. Nous laissons les bons citoyens marocains les convaincre de leur déviance, et bon, ce zèle patriotique peut parfois déborder. Après, c’est aux représentants des forces de l’ordre d’apprécier la situation, et de considérer si elle porte atteinte à l’ordre public ou pas.
De toutes façons, nous observons bien que le résultat du référendum est un cinglant échec de leur projet d’instaurer une république soviético-islamiste. La vigilance du peuple Marocain a, encore une fois, été honorable. »
Hassan II: « Votre père vous passe le salut, Mr. Yata. Effectivement, ces agitateurs subiront très bientôt le courroux des sujets marocains. Et je crois qu’en continuant votre travail de journaliste, exposant et démontrant leur hargne contre ce Royaume, ils seront de plus en plus isolés et ridicules. A ce sujet, je souhaite d’ailleur saluer le travail de nos serviteurs sur internet, qui, en dénigrant, insultant, détournant les propos des agitateurs, les font apparaître sous leur vrai jour, celui de mauvais musulmans, d’impies et de traîtres à la nation. Certes, internet donne aux agités et agitateurs le moyen de cracher leur venin, mais c’est aussi grâce à nos loyaux sujets serviles que le débat est maintenu au niveau que nous considérons suffisant pour notre bon peuple. »
Khalil Hachimi Idrissi, ancien d’Aujourd’hui Lol Makhzen, nouveau Wali de Lol-MAP, prend la parole:
« Ma question est pour au Ministre de l’Intérieur: comment avez-vous réussi à mobiliser les électeurs à 72%? »
Driss Basri: « Ce n’était pas une mince affaire. Les ‘agnag’ se révélaient très tenaces. Mais voyez-vous, la machine de l’intérieur était encore intact: nos relais locaux, chefs de tribus, notables, moqadems, chioukh, walis, merdas et autres serviteurs obéissant de notre administration se sont levés comme un seul homme pour faire voter les marocains. A mort. Nous n’avons pas lésinés sur les moyens, et, suprême source de fierté pour notre ministère, tout cela n’a même pas nécessité de circulaire centrale, ni d’orientations. Sa Majesté me disait tout à l’heure à quel point elle était impressionnée par la capacité de prise d’initiative de nos valeureux cadres locaux. Je suis particulièrement fier d’avoir apporté ma modeste contribution à l’édifice qui nous fait gagner depuis plus de 40ans des référendums à 97% et plus. »
KHI: « Pouvez-vous être plus spécifiques dans la description les méthodes utilisées?« 
Driss Basri (qui s’énèrve soudainement): « Baghi n5li darbouk? hem. Excusez-moi Votre Majesté; ces journalistes semblent avoir oublié les bonnes manières! »
Hassan II: « mais allez-y, racontez-leur. Nous pensons que les agités gagneraient à comprendre que nous sommes bien plus forts ».
Driss Basri: « vos désirs sont des ordres, Sire. Mr Idrissi, nous procédons comme suit: l’avancement du Moqadem dépend du bon vouloir de son supérieur hiérarchique. Pour bien se faire voir de son chef, il fouette le Merda pour lui récupérer certains individus sur sa liste: ceux ayant droit aux aides locales, les associations de quartier bénéficiant d’un financement comme celui de l’INDH, les jeunes présents dans les maisons de jeunesse, etc.. à toutes ces personnes, le Moqadem leur propose de voter. Juste voter. Ces citoyens marocains, doublement obligés par leur devoir civique et l’insistance de l’agent d’autorité, se déplacent en masse (avec l’aide d’une logistique préparée par la commune) pour voter Oui au bureau de vote. Au besoin, les absents votent aussi. Je précise que l’usage du vote des décédés se réduit de plus en plus car la population ‘volontaire’ est plus que suffisante.
Au niveau supérieur, le Cheikh et Caid interviennent dans le cas où la population n’est pas ‘coopérative’ notamment dans les régions de M’sa5it Sidna. L’intervention est rarement visible au niveau du Wali ou du 3amil. J’insiste sur le fait que grâce à la grille de rémunération unique allouée aux Moqadems, Chioukhs et Caids, la participation des populations -avec le soutien désintéressé des notables locaux- est assurée. D’autres questions? »
Hassan II: « Messieurs, vous nous excuserez, les résultats des prochaines élections législatives nous attendent. Il nous faut du temps pour redécouper les circonscriptions. Au bon plaisir de vous voir couvrir l’expression de notre démocratie marocaine. »
Le délégué presse du CJDM est allé vomir un peu plus loin

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