Sa démonstration de force devrait rendre plus circonspects dans leurs analyses et affirmations les commentateurs qui, à l’annonce des chiffres officiels du référendum, se sont empressés de qualifier ceux-ci de succès pour Mohammed VI et de conjoncturer sur l’essoufflement du mouvement, voire sa probable extinction.
Ce n’est pas son chant du cygne qu’a fait s’élever le Mouvement des jeunes du 20 février en cette soirée de dimanche passé, mais l’affirmation de la poursuite d’un combat pour la démocratie qui ne se satisfait pas du fardage fait à la Constitution marocaine. Bien sûr, le Roi et le Makhzen vont prendre prétexte du « plébiscite » dont la consultation référendaire donne l’illusion pour tenter de casser la dynamique de ce mouvement. Ils bénéficieront, à n’en point douter, de la compréhension et du silence complice des milieux politico-médiatiques étrangers, qui ont déjà fermé les yeux sur les résultats proprement staliniens annoncés officiellement et applaudi à « l’entente » entre le Roi et le peuple qu’ils sont censés avoir démontrée.
Les grands perdants du référendum au Maroc, ce sont ces partis et syndicats dits d’opposition qui se sont prêtés à la mascarade référendaire organisée par le Trône, par laquelle le Roi a reconfirmé la totalité de ses pouvoirs exorbitants, alors que le peuple marocain, dans sa grande majorité, demande une constitution qui établit le principe que le monarque règne mais ne gouverne pas. Pour s’être faits les auxiliaires de la mascarade, ils en payeront le prix fort, celui de perdre le peu de crédit dont ils disposent encore parmi le peuple marocain
L’autre enseignement qu’il faut tirer du référendum qui vient d’avoir lieu au Maroc, c’est qu’il rend pratiquement impossible la solution négociée sous l’égide des Nations unies du conflit sahraoui. En faisant inscrire dans sa nouvelle constitution un chapitre consacrant la «marocanité» du Sahara Occidental, le Roi a signifié à la communauté internationale que l’occupation marocaine de ce territoire est un fait accompli qui n’est plus discutable pour le trône et le peuple marocain. Il ne faut par conséquent nullement s’étonner si le Polisario et les Sahraouis décident, après cet acte royal, de réviser leur stratégie de lutte contre l’occupant de leur pays.
Comme tous les monarques et chefs d’Etat arabes confrontés à la contestation de leurs peuples, Mohammed VI croit gagner du temps en ayant octroyé au sien un semblant de réformes et en jouant sur sa fibre patriotique. Deux ficelles qui ne règlent en rien le fond des problèmes contre lesquels les Marocains sont de plus en plus nombreux à se mobiliser derrière le Mouvement du 20 février. Problèmes qui sont la monarchie absolue, la corruption, les inégalités sociales toujours plus criantes, l’absence de démocratie, de liberté d’expression et les atteintes aux droits des citoyens.
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