Le dernier toz (*) de Mouammar

Terrifiant. Mouammar Kadhafi a été capturé vivant et lynché suivant le mode troglodyte sur l’autel du monde dit libre, sanctuaire supposé des valeurs humaines universelles. Un lynchage on live, en sus, relayé par des chaînes télévisuelles en course pour «le scoop de la charogne» qui restait à inventer pour l’Homo sapiens neanderthalensis , plus prononcé encore chez les médias de la Oumma arabe et musulmane, qu’ailleurs. Le précepte religieux en la matière prit l’allure, ici, d’un impudique phallus menaçant les musulmans d’aujourd’hui. 
 
À ce propos, les animateurs de la chaîne qatarie Al-Djazira, qui a fait sien le combat des hordes de rebelles, sans jamais dire, au passage, qu’il fut mené en bonne et due règle par les forces de l’Otan, ont manqué de peu emboîter le pas de danse macabre auquel se livraient les rebelles libyens comme dans un vrai bal des hyènes. Il est vrai que la chaîne de l’émir ne pouvait que souscrire aux désirs de son altesse. 
 
Kadhafi fut, certes, un tyran de la pire engeance, méritant de ce fait les plus grands châtiments. Cela, nul ne peut en redire mais, prisonnier de guerre authentique, il devait être protégé par la Convention de Genève, apanage des maître – pensants de l’Otan qui a pris sur elle de tirer la bombe, huit mois durant, sur la tête hirsute du guide libyen, allié objectif de bon nombre d’Occidentaux, il y a seulement peu de temps. Et pas seulement. L’éthique, au niveau des médias – au niveau de l’image notamment- a été par trop écrabouillée pour ne pas lever quelques légitimes suspicions sur les motivations réelles de leur diffusion. 
 
Remembrer la capture et l’exécution de Saddam Hussein, l’image de Moubarak sur une civière au tribunal.Vous avez dit croisades ? Le fou de Tripoli a donc été froidement achevé. 48 heures seulement après le message (signal ?) de la secrétaire d’État US lancé à partir de la capitale libyenne lors d’une visite surprise (Sic !). Pourquoi un tel lynchage ? Nombre d’observateurs ont relevé que cette issue arrangeait tout le monde car vivant Kadhafi aurait non seulement retardé le processus de la stabilisation – et le partage du gâteau donc pour les coalisés en butte à de sérieux problèmes socio économiques chez eux- du pays mais aurait gêné aux encolures, voire compromis bien des dirigeants impliqués dans la question libyenne. 
 
Il fallait des thèses farfelues dévalorisantes à souhait à la capture et le lynchage de l’ancien maître de la Libye. Il en a foisonné. Parmi elle ce scénario incroyable d’ineptie tendant à faire accroire que ce dernier a été ramassé dans un égout. Et un égout, forcément, ça sent mauvais. En vérité, et en dépit de sa cruauté et du dédain d’une bonne partie de son peuple, sur quatre décades, Kadhafi a fini sa dernière bataille suivant son esprit et son caractère. Il fallait être fou pour braver la puissance de l’Otan. Il l’a fait en l’humiliant pour avoir résisté pendant huit mois à une guerre réelle qui lui a été livrée sans merci. Une façon, bien à lui, d’afficher un dernier mépris envers les veules dirigeants arabes, entre autres, qu’il faisait souvent tourner en bourrique. 
 
« Toz » aurait-il dit ! Il reste que l’Histoire retiendra que les maîtres du monde actuels qui font des droits de l’Homme une belle poudre aux yeux, se soient rendus coupables de non assistance à prisonnier en danger au nom de desseins inavoués. De ce point de vue, il est à souligner avec force la vista de l’Algérie qui a eu l’instinct d’honneur d’accueillir la famille Kadhafi pour des raisons humanitaires, au risque des critiques subjectives qui en ont découlé alors. Après avoir vu l’horreur de la fin de Mouammar on live, l’on ne peut qu’être glacé d’effroi à la perspective d’imaginer Aïcha Kadhafi, enceinte, tombée entre les mains de ses ennemis si elle n’avait pas été autorisée à entrer en Algérie.

N. B.
Le Courrier d’Algérie, 22/10/2011

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