Jusqu’à ces dernières années, les relations entre Alger et Bamako n’étaient pas au «top», du moment que, le voisin malien avait commis plusieurs erreurs irréparables: d’abord, en relâchant des terroristes dangereux, affiliés à Al Qaïda au Maghreb, puis en fermant l’œil sur la présence massive des groupes d’Al Qaïda sur son propre territoire, ainsi que sur le paiement de rançon aux terroristes et trafiquants de drogue, et enfin en laissant librement les prises d’otages sur son sol.
Ce qui était considéré , non seulement par Alger, mais également par d’autres voisins de la région, comme étant le véritable «maillon faible» dans la lutte contre le terrorisme et le crime organisé dans l’ensemble.
Aujourd’hui, et avec la visite du Président malien, Amadou Toumani Touré, les relations entre les deux pays se sont améliorées. A signaler, en effet, qu’une stratégie de lutte contre le terrorisme vient d’être adoptée par les deux capitales, visiblement résolues à metre le paquet pour venir à bout de ce fléau. L’assassinat de Mouaâmar Kadhafi et les répercussions qui en découlent avec, notamment la circulation très inquiétante des armes de guerre dans la région, et le retour des ex-combattants maliens de Libye, ont poussé les deux pays à revoir leurs relations «sécuritaires», avant tout, puis bien entendu les relations bilatérales en général.
Avant ce rapprochement entre les deux pays voisins, Alger avait traité, et cela avec toute la logique, son voisin Bamako de maillon faible concernant la lutte contre les groupes terroristes d’Al Qaida. Mieux, en février 2010, Alger avait rappelé son ambassadeur de Bamako, après la libération, par les autorités maliennes, de quatre membres terroristes, dont deux Algériens, revendiqués pourtant par Alger, pour la libération de l’espion français Pierre Camatte. Cette altitude, qualifiée d’irresponsable, par Alger a été accompagnée par le gel des relations diplomatiques entre les deux pays. Aujourd’hui, on assiste à un changement de style depuis que les armes lourdes libyennes ont envahi le Sahel et le retour des ex-combattants pro-Kadhafistes dans la zone de Ten Zawatten. Pour cette raison, la visite qu’effectue, depuis lundi dernier, le président Amadou Toumani Touré en Algérie, à l’invitation de son homologue Bouteflika, a permis un réchauffement des relations, et ce qui devait être fait avant la crise en Libye, car en face, la puissance d’Al Qaïda ne fait que grandir.
Avant la visite du ministre malien des Affaires étrangères, en septembre passé, les relations entre les deux pays étaient au plus bas. Il est bon de rappeler dans ce sens, qu’en juillet 2010, les relations entre Alger et Bamako, et Nouakchott et Bamako avaient frôlé la rupture, lorsque les autorités algériennes et mauritaniennes avaient, à tour de rôle, rappelé leur ambassadeur après la débâcle malienne. Profitant de cette situation, il y a plus d’un an, le Président français, Nicolas Sarkozy, avait effectué une escale improvisée à Bamako pour féliciter le Président, ATT pour son engagement avec la France, en relâchant quatre dangereux activistes en contre-partie de la libération de l’espion français, Pierre Camatte, détenu par Al Qaïda, notamment par le chef notoire, Abou Zeid. Cet engagement malien avec la France a été récompensée par les autorités françaises, d’autant que plusieurs millions d’euros ont été mobilisés par Nicolas Sarkozy, dans le cadre de soutien au Mali dans son combat contre la pauvreté qui règne dans les régions de Kidal, Gao et Tombouctou. Pis, la libération de l’ex-otage français, Pierre Camatte, a été très bénéfique pour Al Qaïda, laquelle avait reçu une valise débordant d’ d’euros. Il s’agit là du paiement de la rançon, ce qui représente, également, une grosse infraction à la résolution 1904 de l’Onu, adoptée par le conseil de sécurité en décembre 2009, à la demande de l’Algérie. Cette complicité malienne avec le terrorisme, notamment dans le versement de rançons qui ne font que renforcer les capacités opérationnelles d’Al Qaïda, et du coup, aggraver la situation au Sahel et prolonger, donc, son existence, avait été vivement condamnée par les pays de la région de Sahel, et à leurs têtes, l’Algérie et la Mauritanie.
ATT reconnaît ses erreurs à Alger
La visite d’Amadou Toumani Touré à Alger en est un signe fort. Le Président malien reconnaît, avec sa visite officielle de quatre jours, à Alger, ses erreurs faits tout au long de ces cinq dernières années, voire depuis qu’Al Qaïda au Maghreb avait décidé de prendre position au nord du Mali. Mieux, le Président malien s’est entretenu, durant deux heures, avec son homologue algérien, Bouteflika. Des discussions qui ont porté sur l’aspect sécuritaire. A cet effet, il y a lieu de rappeler qu’Alger, veut se lancer avec un partenaire sérieux dans la lutte contre le terrorisme et faire face, par la même occasion, au dossier très inquiétant des armes libyennes, qui circulent en masse dans l’ensemble de la région de Sahel. Du côté malien, ATT veut rattraper le retard concernant les relations entre Alger et Bamako, d’autant qu’il connaît très bien le rôle primordial de l’Algérie dans la région, voire dans le continent africain et dans le monde. Ce poids lourd de l’Algérie et ses aides qui peuvent être apportées au Mali dans le domaine de développement économique, sécuritaire et politique sont autant de sujets dominants de cette visite d’ATT.
Et pour rassurer Alger, le président malien s’est montré, très coopératif, surtout dans le domaine de la lutte contre le terrorisme. Un changement de politique de la part d’ATT qui obéit aux nouveaux enjeux qui pèsent dans la région. Le président malien a, tout d’abord, peur du retour massif des ex-combattants maliens en Libye, d’autant que ces derniers avaient regagné le Mali avec leurs armes. Cette situation avait poussé, ATT, à se retourner vers Alger afin d’avoir l’aide des autorités algériennes. De peur qu’une révolution des Touaregs ne déclenche sur son propre sol, ATT veut avoir un soutien de l’Algérie et ce, à travers l’engagement de l’Algérie dans le développement dans le nord et le Sud du Mali. En contre-partie, Alger s’est montrée favorable à la demande du Mali, toutefois, les autorités algériennes veulent des «garanties» du Mali. En effet, les responsables algériens veulent des engagements dignes de ce nom de la part des Maliens, surtout concernant la lutte contre le terrorisme qui représente une menace pour Sahel.
Par Sofiane Abi
Les Débats, 27/10/2011
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