Tempête politique fraîche pour le Sahara occidental

Suite à l’enlèvement de trois travailleurs humanitaires dans les camps de réfugiés sahraouis dans la frontière algérienne du sud, Konstantina Isidoros est sceptique quant à la narrative du Maroc au sujet de qui est derrière l’attaque.

Suite au numéro spécial récent dédié au Sahara occidental sur Pambazuka News, une nouvelle tempête politique a éclaté dans le conflit du Sahara occidental
, avec l’enlèvement de trois travailleurs humanitaires dans les camps de réfugiés sahraouis à la frontière sud du désert algérien, près de Tindouf, pendant la nuit du samedi 22 Octobre 2011. C’est la première fois qu’une prise d’otages se produit dans les environs des camps des réfugiés sahraouis. (Voir: «Trois travailleurs humanitaires européens enlevés en Algerie » et « travailleurs humanitaires européens enlevés en Algérie »

Rossella Urru du Comité international italien des ONG pour le Développement des Peuples (CISP), Ainhoa ​​Fernández de Rincan de la Asociación de Amigos del Pueblo Saharaui de Extremadura et Enric Gonyalons de l’ ONG espagnole Mundobat ont été kidnappés et l’un de leurs guides sahraouis blessé à Rabuni, l’un des camps de réfugiés, qui sert de centre principal de protocole pour la réception et le logement des visiteurs étrangers.

La machine diplomatique et de propagande du Maroc s’est mise en action à nouveau, agitant ses allégations favorites sur des liens entre le Front Polisario (mouvement de libération des sahraouis et reconnue par l’ONU représentant politique légitime du peuple sahraoui) et Al-Qaïda au Maghreb (AQMI) .

Depuis samedi, la ministre espagnole des Affaires étrangères, Trinidad Jimenez est apparue à Rabat, permettant à la flatterie du Maroc de déclencher un échange de discours de coopération mutuelle entre les deux gouvernements, et de permettre à la machine de propagande du Maroc de faire le focus des médias traditionnels sur les allégations favorites du Maroc contre le Front Polisario.

Pourtant, une partie importante de la société civile espagnole reste sensible au sort des sahraouis et représente la majorité des visiteurs des camps des réfugiés, en particulier sous la forme de groupes régionaux espagnols d’aide, familles d’accueil des programmes d’échange et des équipes médicales. Le contexte historique est que l’Espagne était la puissance coloniale au Sahara occidental et a fait peu pour empêcher que le Maroc viole les principes du droit international et de défier l’opinion juridique de la Cour internationale de Justice en envahissant le Sahara occidental suite au retrait de l’Espagne en 1975.

Les lecteurs de Pambazuka peuvent entendre deux points de vue alternatifs à l’histoire préférée du Maroc, par la voix d’un écrivain sahraoui qui a écrit cet article à partir de Rabuni, où les trois travailleurs humanitaires ont été enlevés dans la nuit de samedi. Premièrement, nous entendons de Malainin Lakhal une ligne de raisonnement qui ouvre la possibilité d’une main occulte du Maroc comme une tentative orchestrée d’ajouter davantage de pression politique sur l’Algérie, de discréditer le Front Polisario, effrayer les militants humanitaires des Sahraouis dans le monde entier et de continuer à ancrer l’idée que le Front Polisario ne peut pas contrôler son propre territoire. Ce dernier point est d’importance nuisible à l’objectif du Front Polisario de sécuriser le processus d’autodétermination dirigé par les Nations Unies dans le but d’octroyer au peuple sahraouie le droit de voter et choisir l’indépendance de l’invasion illégale du Maroc et l’occupation du Sahara occidental – la thèse vicieuse du Maroc ici est de présenter les sahraouis comme incapables de gérer leur propre pays. Une gamme de questions similaires est aussi souvent discuté parmi les cercles d’analyse des observateurs du Sahara occidental et des universitaires. Par exemple l’article d’Anthony Pazzanita de 1994 [PDF] et mis à jour en 2011 qui explore les différentes techniques de relations publiques que le Maroc utilise pour s’introduire dans son public, et l’article de Carlos Ruiz Miguel [espagnol] qui analyse la stratégie du Maroc dans l’utilisation du terrorisme pour concevoir « mille et une opérations » dans le but d’introduire cette variable dans le conflit.

Enfin, nous entendons de Sabrina Tucci, une visiteuse des camps des réfugiés sahraouis qui travaille pour l’organisme de charité britannique Sandblast. Sabrina présente un aperçu de l’hospitalité et la sécurité des visiteurs dans les camps, y compris, paradoxalement, les contrôles serrés sur nos mouvements dans les camps pour assurer notre sécurité dans une région qui est politiquement tendue à cause de l’invasion illégale du Sahara occidental par le Maroc. Sabrina exprime beaucoup de nos pensées, que nous restons fermement convaincus que le Front Polisario et le peuple Sahraoui ont toute raison d’assurer notre sécurité de la même manière qu’ils exigent de l’Organisation des Nations Unies d’assurer que leur droit humain fondamental à l’autodétermination soit exaucé, dans cette « dernière colonie » d’Afrique.

Comme Malainin a écrit dans son article, dans l’hypothèse de l’implication d’individus sahraouis dans l’enlèvement du samedi, il s’agirait d’individus rares et «fragiles», convaincus par les ravisseurs d’une manière ou d’une autre – il est bien connu que le Maroc utilise une autre tactique d’incitations financières et matérielles pour encourager les défections des sahraouis. L’histoire de Sabrina montre comment résolument la majorité des visiteurs étrangers continuera à confier leur sécurité au Front Polisario et au peuple sahraoui. J’ai déjà écrit un article en 2010 pour le Bulletin d’ACAS de Jacob Mundy (« La militarisation américaine du Sahara et du Sahel» [PDF}) exposant pourquoi le Front Polisario a peu de bénéfices à tirer des liens avec Al-Qaïda, contrairement aux notions imaginaires du Maroc.

PRÉSENTÉ PAR PAMBAZUKA NEWS

* Konstantina Isidoros est chercheuse à l’Université d’Oxford.

Traduction non-officielle deDiaspora Saharaui

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