En un peu plus d’un mois, l’Algérie s’est redéployée sur tous les fronts, avec en prime, une meilleure gestion des conflits régionaux et la mise en échec des tentatives de l’isoler au plan arabe, maghrébin et international. Le président de la République a fait travailler sa diplomatie en continu, avec «un plan de charge et des obligations de résultats». Les projets qui la visaient étaient par trop dangereux pour les ignorer : Israël, en premier, avait clairement souhaité voir l’Algérie isolée au Maghreb et coupée de ses voisins. Le conflit libyen est venu à point nommé pour raffermir les plans de Tel-Aviv, et les rebelles, tout comme le CNT, n’avaient pas encore les visions assez claires, ni les articulations nécessaires pour évaluer le danger, et tombaient chaque jour dans le jeu qui se faisait ailleurs, et dont ils n’étaient que les instruments.
Début octobre 2011. À cette date-là, Alger paraissait coupée de son environnement géopolitique immédiat. Les querelles avec le Maroc continuaient, quand elles n’augmentaient pas en volume, les islamistes tunisiens s’apprêtaient à prendre le pouvoir et menaçaient l’Algérie de contagion, Tripoli tombait entre les mains de Abdelhakim Belhaj, l’ancien émir du Groupe islamique combattant libyen, proche du GIA, et les armes volées dans les casernes des loyalistes de Kadhafi et acheminées vers le Sud, pour terminer entre les mains d’Aqmi, créaient de nouvelles menaces dans tout le Sahara et le Sahel.
Dès lors, Alger commence à faire jouer sa diplomatie, ses coulisses, son pétrole, ses marchés et ses cartes pour, d’abord, déjouer les plans sournois qui tentaient de l’isoler, pour, ensuite, reprendre son rôle de leadership dans la triple région maghrébo-saharo-sahélienne, et pour, enfin, faire en sorte d’évoluer à l’aise dans son environnement naturel et immédiat, en compagnie de voisins avec lesquels il fallait trouver le compromis. Les rencontres Mourad Medelci- Mahmoud Jibril, puis Abdelaziz Bouteflika-Mustafa Abdeljalil ont lissé un tant soit peu les aspérités. Les humeurs de certains chefs rebelles se dissiperont avec le temps. Les ultras de ces chefs seront confrontés d’abord à un peuple libyen qui n’a pas vocation à devenir une base de radicaux.
Les contacts soutenus avec Bamako et Niamey ont définitivement amarré le Niger et le Mali à l’Algérie dans des projets politiques, sécuritaires et de développement qui s’inscrivent dans la durée. La Mauritanie aussi, est revenue à son environnement immédiat, composé principalement de l’Algérie, et entretient avec Alger des relations privilégiées. La main tendue entre Bouteflika et le souverain chérifien semble apaiser les tensions, et fait entrer les relations entre les deux pays dans sa « phase favorable ».
Bien que les relations entre Alger et Tunis ont toujours été excellentes, la récente visite du président du mouvement tunisien Ennahda, Rached Ghannouchi, et l’accueil qui lui a été réservé en Algérie promet aussi de dépasser le «noeud islamiste». Il y a moins de deux mois, en pleine liesse de « sa » victoire en Libye, le président français Nicolas Sarkozy chuchotait dans l’oreille de Mahmoud Jibril que l’Algérie « allait suivre ». L’axe Paris-Tel-Aviv-CNT fonctionnait alors à plein régime. Mais, le monde va vite, et les choses ont changé depuis lors, et les zones de turbulence ont largement changé de camp…
Fayçal Oukaci
Le Courrier d’Algérie, 23/11/2011
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