La remarquable complaisance dont bénéfice en Occident la Monarchie et le Makhzen marocains au sein des classes politiques, des intelligentsias et des médias n’a pas manqué de s’afficher à l’occasion du scrutin des élections législatives anticipées qui s’est déroulé vendredi dans le Royaume. Aussitôt les bureaux de vote fermés, ces milieux, pour qui le Maroc est pour des raisons multiples un pays de cocagne, ont entonné la scie du «test démocratique réussi» pour le roi Mohammed VI, «sage initiateur de réformes historiques».
Selon eux, le scrutin a confirmé l’adhésion du peuple marocain aux réformes royales, ce que démontrerait indubitablement la «forte» participation des électeurs à la consultation. Et de mettre en exergue la comparaison du taux de participation à ce scrutin «réussi» avec celui de 2007, dans lequel il n’avait pas atteint les 37%. Avec donc le 47% arrêté de votants officiellement déclaré, la consultation électorale de vendredi devrait être considérée comme étant un succès à mettre au compte de la confiance que susciterait la politique de réformes engagée par le monarque.
Le «hic» est qui si comparaison est à faire en termes de taux de participation, ce n’est pas entre ceux des scrutins de 2007 et de vendredi, mais entre celui de ce dernier et le taux enregistré pour le référendum constitutionnel convoqué par le Roi pour faire entériner ses réformes. Les impénitents encenseurs de la Monarchie se sont bien gardés de cette comparaison, car il leur est difficile d’expliquer pourquoi les électeurs marocains ont été officiellement plus de 73% à se rendre aux urnes au tout récent référendum et seulement 47% à celles des élections de vendredi.
S’ils s’en tiennent pour leurs analyses et commentaires sur l’enjeu de la participation à la seule première comparaison, c’est qu’elle a l’avantage de ne pas fixer un seuil très élevé de crédibilité à partir duquel ils peuvent, sans ridicule, soutenir que le scrutin de vendredi est une totale réussite. Pourtant il, il faut bien expliquer pourquoi le taux de participation à ce scrutin n’a pas connu les hauteurs de celui du tout récent référendum, qui leur avait fait clamer sans retenue à la confiance tissée et manifeste liant le peuple marocain à son Roi.
Encore une fois, la majorité des Marocains a marqué sa défiance au Trône et au Makhzen en se réfugiant dans l’abstention, démontrant ainsi qu’elle s’est faite à la conviction que les réformes octroyées par le monarque n’induiront pas de changement en termes de source et de détention du pouvoir dans le Royaume. Les 47% d’électeurs qui ont tout de même participé au scrutin ne mettront pas longtemps à se rendre compte qu’ils ont été dupés par des réformes ayant en apparence instauré de l’équilibre entre les institutions du pouvoir marocain. Même la victoire des islamistes modérés du PJD et leur participation au gouvernement ne changera en rien la donne dans le Royaume, dès lors que les dés ont été préalablement pipés par des réformes ayant maintenu intacte la primauté indiscutable du pouvoir royal, qui en a même été renforcée.
Les thuriféraires marocains et étrangers de la Monarchie se sont empressés de qualifier «d’historique» les premières élections législatives d’après les réformes royales. Concédons-leur ce qualificatif, mais pour la raison qu’elles ont fait apparaître que tout reste à faire au Maroc en termes de changement et de démocratie
Le Quotidien d’Oran, 27/11/2011
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