Pour une compréhension éclairée du présent

A PREMIÈRE VUE, IL EST MAL À L’AISE, IL SE FAIT PIÉGER PAR LE REGARD D’UN AUTRE, JE PRENDS LE RISQUE DE LE PHOTOGRAPHIER AVEC UN MOBILE. L’ARROSEUR ARROSÉ !!! IL DÉPASSE MALGRÉ TOUT SA TIMIDITÉ ET ESQUISSE QUELQUES VAGUES SOURIRES APRÈS SES RICTUS GÊNÉS. 
L’analyse des pathologies sociales et politiques, comme le racisme et le colonialisme de Frantz Fanon, a dépassé le contexte dans lequel elle a été élaborée pour être d’actualité au vu de la pensée et de l’action de ce grand homme. Avant sa disparition, Frantz Fanon a continué à porter haut et fort dans son âme et son esprit, la cause du peuple algérien dans sa lutte de libération du joug colonial français. Il écrit, peu avant sa mort, une lettre à son ami Roger : «Je veux que vous sachiez que même au moment où les médecins avaient désespéré, je pensais encore, oh dans le brouillard, je pensais au peuple algérien, aux peuples du Tiers Monde et si j’ai tenu, c’est à cause d’eux». Son fils, Olivier Fanon, a souligné, lors de son intervention au cours de ce colloque organisé par CNRPAH, en commémoration de la cinquantième année de sa disparition, consacrée à l’œuvre de F. Fanon : «Mon père est né colonisé et il est mort libre.» 
Le défunt Frantz Fanon a embrassé la liberté dès le moment où il a pris conscience de sa condition humaine et entamé sa longue et riche marche sur la voie de la destruction des chaînes établies par le système colonial sur les plans socioculturel et politico-économique. Frantz Fanon était et demeure incontestablement celui qui a psychanalysé le système colonial, condamné à disparaître sur le fond, quelle que soit la forme par laquelle il se manifestait. 
Les deux journées d’études, les 6 et 7 décembre, consacrées à Fanon, ont été une opportunité pour porter un regard sur l’œuvre de cet intellectuel qui a su faire la jonction entre la pensée et l’action, au profit de la lutte de son peuple contre une colonisation française de peuplement. Celui qui croyait dur comme fer que la destinée de l’homme debout est d’être libre, continue d’être une référence et une lanterne «pour les peuples en lutte encore colonisé, comme la Palestine, le Sahara Occidental», a indiqué Olivier Fanon. Les Damnés de la terre (1961) et bien avant Peau noire, masques blancs (1952) de Frantz Fanon continuent de nous interpeller autant qu’avant, au vu de l’état actuel du monde. Le système des ex-puissances coloniales a emprunté aujourd’hui d’autres masques et d’autres voies pour dominer des peuples entiers sous d’autres formes. Si les penseurs de la colonisation d’hier, inscrivaient cette machine d’oppression et de négation des peuples pour leur porter la civilisation, de nos jours, il est question de porter les valeurs humaines, par la promotion des droits de l’homme et de la démocratie. Ceci au moment où des peuples continuent de subir les affres de la colonisation. C’est le cas des peuples palestinien et du Sahara occidental. 
La pauvreté, le sous-développement, la dilapidation des richesses du Sud par les pays riches, les inégalités entre le Nord et le Sud étaient déjà là hier. Et depuis ces fléaux se sont approfondis au rythme de la mondialisation galopante au cœur de la pensée fanonnienne qui, tout en étant un des fondateurs de la pensée tiers-mondiste, laisse une œuvre d’une étonnante actualité. Une pensée qui demeure pertinemment d’actualité pour accéder à une compréhension politique juste et lucide de notre présent. Relire de nos jours les Damnés de la terre, cela peut se révéler d’un précieux éclairage pour construire des lendemains de justice, de liberté et de dignité humaine pour lesquels Fanon a consacré sa vie.
KARIMA BENNOUR

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