Proposition de résolution sur l’accord agricole entre l’UE et le Maroc

Résolution du Parlement européen sur l’accord entre l’Union européenne et le Royaume du Maroc sur les mesures de libéralisation réciproques en matière de produits agricoles, de produits agricoles transformés, de poissons et de produits de la pêche (2012/2522(RSP)
Le Parlement européen,
– vu la déclaration de Barcelone du 28 novembre 1995 qui établit un partenariat entre l’Union européenne et des pays du Sud de la Méditerranée,
– vu l’accord euro-méditerranéen établissant une association entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et le Royaume du Maroc, d’autre part,
– vu la décision du Conseil du 14 octobre 2005 autorisant les négociations avec le Maroc sur la libéralisation réciproque en matière de produits agricoles, de produits agricoles transformés, de poissons et de produits de la pêche,
– vu la communication conjointe de la Commission européenne et de la haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 25 mai 2011, intitulée « Une stratégie nouvelle à l’égard d’un voisinage en mutation » (COM(2011)0303),
– vu sa résolution législative du 14 décembre 2011 relative au projet de décision du Conseil sur la conclusion d’un protocole entre l’Union européenne et le Royaume du Maroc fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues par l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la Communauté européenne et le Royaume du Maroc,
– vu ses résolutions précédentes sur le Sahara occidental,
– vu le projet d’accord sous forme d’échange de lettres entre l’Union européenne et le Royaume du Maroc relatif aux mesures de libéralisation réciproques en matière de produits agricoles, de produits agricoles transformés, de poissons et de produits de la pêche, au remplacement des protocoles n° 1, 2 et 3 et de leurs annexes et aux modifications de l’accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et le Royaume du Maroc, d’autre part,
– vu la procédure d’approbation conforme à l’article 207 et à l’article 218, paragraphe 6, deuxième alinéa, point a), du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (C7‑0201/2011),
– vu l’article 110, paragraphe 2, de son règlement,
A. considérant que l’Union européenne conserve un excédent commercial avec le Maroc, qui a atteint 5,4 milliards d’euros en 2010;
B. considérant que l’Union dispose d’un important excédent commercial pour les produits agricoles, les produits de la pêche et les produits transformés avec les pays du Sud de la Méditerranée de plus de 4 milliards d’euros, alors qu’elle affiche, avec le Maroc, un déficit commercial bilatéral pour ces mêmes produits, qui était de 871 millions d’euros en 2010;
C. considérant que l’agriculture représentait 16,4 % du PIB marocain en 2009 et emploie plus de 40 % de la main-d’œuvre du pays; considérant que l’agriculture représentait 5,1 % du PIB de l’Union européenne en 2009 et emploie 1,1 % de la main-d’œuvre européenne;
D. considérant que l’accord libéralise immédiatement 55 % (augmentation par rapport aux 33 % initiaux) des tarifs douaniers sur les produits agricoles et de la pêche de l’Union européenne et 70 % (contre 1 % précédemment) des tarifs douaniers sur les produits agricoles et de la pêche du Maroc en l’espace de 10 ans;
E. considérant que l’accord permettra aux exportateurs européens d’accéder plus facilement à un marché voisin grâce à des modèles de consommation évoluant rapidement et au contexte de démographie croissante;
F. considérant que le Maroc est l’un des quatre pays du Sud de la Méditerranée pour lesquels le Conseil a autorisé des directives de négociation en vue de signer un accord de libre-échange complet et approfondi; considérant que le commerce de produits agricoles fera partie de ces négociations;
G. considérant que le Sahara occidental est exclu uniquement de manière implicite des dispositions commerciales de l’accord et qu’il est possible que les produits du Sahara occidental puissent en fait bénéficier, grâce au présent accord, d’un accès préférentiel au marché intérieur de l’Union européenne et vice-versa;
H. considérant que tout accord commercial concernant le Sahara occidental doit être conclu au profit du peuple sahraoui et en fonction de leurs souhaits, conformément au droit international;
Considérations d’ordre général
1. estime que l’ouverture des marchés et l’intégration progressive sur le marché intérieur de l’Union européenne peuvent constituer de puissants instruments pour le développement des pays du Sud de la Méditerranée et contribuer à réduire la pauvreté et le chômage généralisés qui causent des problèmes économiques ainsi qu’au niveau des migrations et de la sécurité dans la région; considère que pour que ce potentiel puisse se concrétiser, l’Union européenne doit être prête à faire des concessions commerciales dans les secteurs sensibles, comme l’agriculture par exemple;
2. souligne qu’au lendemain du printemps arabe, l’Union européenne a la responsabilité de faire plein usage de ses capacités commerciales et économiques en vue d’aider la transition de ces pays du Sud de la Méditerranée qui sont récemment devenus des démocraties, ou, ceux, comme le Maroc, qui progressent largement vers la démocratisation; salue les efforts consentis par le Maroc en faveur de la démocratie et du développement durable; invite l’Union européenne à soutenir ces mesures et à créer une synergie étroite entre ces efforts et le présent accord et l’approfondissement de sa stratégie commerciale avec le Maroc;
3. estime qu’il est essentiel que toutes les couches de la société, et notamment les PME et les petits exploitants agricoles, puissent tirer parti des initiatives en faveur du commerce et des investissements; fait observer, dans ce contexte, que plus de 80 % des agriculteurs marocains possèdent moins de cinq hectares de terrain; salue dès lors le soutien apporté par la Confédération marocaine de l’agriculture et du développement rural (COMADER) à cet accord; rappelle que la sécurité alimentaire comporte, en plus de ses aspects économiques, une dimension sociale, environnementale et culturelle;
4. souligne que, conformément au traité de Lisbonne, le Parlement doit participer à toutes les étapes des négociations commerciales et donner son approbation aux accords; invite dès lors la Commission et le Conseil à respecter ces obligations pour les prochains protocoles conclus avec le Maroc au titre de l’accord d’association et de l’éventuel accord de libre-échange approfondi et complet;
L’accord
5. souligne que cet accord fournira des opportunités à l’industrie agricole de l’Union européenne, notamment en ce qui concerne les denrées alimentaires transformées; souligne que les exportateurs de l’Union européenne bénéficieront au final de la levée des droits de douane marocains pour 70 % des lignes de produits agricoles et issus de la pêche, ce qui permettra d’économiser, selon les estimations, quelque 100 millions d’euros de droits de douanes par an, une fois que le présent accord sera pleinement mis en œuvre;
6. s’inquiète des conséquences sur certaines régions agricoles d’Europe septentrionale et invite l’Union européenne à entreprendre de véritables réformes en vue de préserver la compétitivité de l’agriculture euro-méditerranéenne; prend acte des inquiétudes de certains secteurs agricoles, notamment ceux des tomates, des concombres, des pêches et des abricots, soumis à une augmentation des quotas à droit nul pour les importations de fruits et légumes délicats; souligne toutefois que l’augmentation des quotas à droit nul représente un pourcentage infime de la production européenne (à savoir à peu près 0,65 % pour les tomates), et que ces importations sont par ailleurs limitées par les quotas saisonniers et le système des prix d’entrée;
7. accueille favorablement les autres mesures non tarifaires comprises dans l’accord, telles les négociations visant à améliorer la protection supplémentaire des indications géographiques européennes, le renforcement des mécanismes de sauvegarde et les mesures sanitaires et phytosanitaires; invite la Commission à fournir de plus amples explications à l’industrie européenne au sujet du processus et des mécanismes destinés à activer les clauses de sauvegarde; rappelle en outre que l’Union et le Maroc ont convenu d’un mécanisme de règlement des différends qui permet à l’une des parties d’obtenir réparation si l’autre ne respecte pas les conditions de l’accord;
Questions commerciales et économiques plus larges
8. exprime son inquiétude quant aux plaintes émises par des groupes industriels européens alléguant des fraudes dans le système des prix d’entrée; prend acte à cet égard des propositions destinées à aligner les modalités de mise en œuvre du système des prix d’entrée sur le code des douanes communautaire lors de la dernière réforme de la PAC; souligne, dans le même temps, qu’aucune plainte officielle n’a été déposée auprès de l’OLAF depuis 2005;
9. souligne que l’accès au marché intérieur de l’Union devrait être subordonné au respect de certaines normes sanitaires, phytosanitaires et environnementales et se félicite du rapport positif de l’Office alimentaire et vétérinaire attestant le respect de ces normes par le Maroc en 2011; se félicite de l’accent mis par l’accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires et demande que l’assistance technique constitue un élément central des négociations destinées à aboutir à un accord de libre-échange approfondi et complet; invite la Commission à aider le Maroc dans la gestion de l’eau afin d’éviter toute perte en termes de quantité et de qualité, de permettre un meilleur accès à l’eau potable et d’améliorer la gestion des eaux usées; invite l’Agence européenne de sécurité des aliments à apporter son expertise, comme cela lui a été demandé, aux États membres afin d’évaluer la qualité des produits importés;
10. souligne que, comme de nombreux pays en développement, le Maroc fait face à des défis de taille pour garantir les droits du travail; fait observer que, malgré la ratification de la plupart des principales conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT) en la matière et l’adoption de dispositions interdisant le travail des enfants, des inquiétudes persistent quant à la liberté d’association et au travail des enfants; estime que le chapitre sur le développement durable des accords de libre-échange approfondis et complets devrait inclure une assistance pour la mise en œuvre des conventions de l’OIT, la ratification de conventions fondamentales non encore signées (notamment la convention n° 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical) et des initiatives concernant la responsabilité sociale de l’entreprise;
11. regrette que la Commission n’ait pas pu clarifier de manière convaincante le statut du Sahara occidental dans le cadre des dispositions commerciales de l’accord d’association conclu entre l’Union européenne et le Maroc; estime que cet éclaircissement est nécessaire pour mettre un terme à l’actuelle incertitude juridique et serait également bénéfique aux accords entre l’Union européenne et le Maroc dans d’autres secteurs pour lesquels des protocoles doivent souvent être renouvelés; demande dès lors instamment à la Commission d’œuvrer à l’élaboration d’une approche globale en ce qui concerne le Sahara occidental, tout en tenant compte des négociations actuellement menées par les Nations unies pour trouver une solution politique durable; invite la Commission à fournir une aide au développement conséquente au peuple sahraoui afin d’améliorer leurs conditions de vie;
12. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, à la délégation du Parlement européen pour les relations avec les pays du Maghreb, au Bureau de l’Assemblée parlementaire de l’Union pour la Méditerranée et au parlement et au gouvernement du Maroc

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