Monde arabe, ces révoltes oubliées du Golfe

par Djamal Boukrine
Qui a entendu parler des Bahreïnis qui, ce mardi, ont voulu commémorer leur première sortie, il y a un an à Manama, pour exiger des élections libres et la fin des discriminations ? Qui a vu les heurts nocturnes entre les «Jeunes du 14-Février» et les forces de sécurité qui ont eu recours aux tirs de grenades lacrymogènes et de balles en caoutchouc et les interpellations en séries, dont des «des femmes et des enfants âgés de 13 à 16 ans»? Qui a compris l’expulsion de huit activistes américains des droits de l’Homme en quatre jours pour participation à des manifestations illégales ? Peu ou presque. Le Conseil de coopération du Golfe qui n’aime pas les «contestations» chez lui, n’apprécie pas ce mouvement. D’où l’envoi, le 14 mars dernier, de 1.500 soldats pour réprimer dans l’œuf cet intolérable «printemps». 35 morts plus tard, 55 selon Amnesty International, l’Occident n’a pas protesté. Et les grands médias occidentaux et les chaines satellitaires arabes si promptes à relayer le moindre fait et geste en Syrie et Yémen après leur campagne d’Egypte et de Tunisie, restent silencieux sur la révolution de la Perle, les émeutes qui secouent depuis mars 2011 la région orientale et riche en pétrole de l’Arabie Saoudite et les crises politiques à répétition qui menacent le Koweït. Normal. Al Djazeera et Al Arabya aiment les révoltes quand celles-ci ne sont pas à leurs portes. 
«Vérité en deçà des Pyrénées, erreur audelà», disait Blaise Pascal. Au grand dam de ces deux chaines, cette révolte oubliée des Printemps arabes ne se limiterait plus au seul «siège de la Ve Flotte» où le discours se radicalise. Dans tout le Golfe, on assiste à un retour à des manifestations revendicatives. Les jeunes réclament des monarchies constitutionnelles, des Parlements aux pleins pouvoirs, des gouvernements issus d’élections et un système judiciaire indépendant. Pointé du doigt comme le timonier des révoltes dans les monarchies, l’Iran préconise comme solution aux émeutes «l’établissement d’un dialogue juste entre le peuple et le pouvoir». Au rythme des réformes engagées dans cette région, les populations vont-elles finir par «imposer» leurs soulèvements aux grands médias occidentaux et arabes ?
Horizons, 16/2/2012

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