Wade risque de l’emporter.

Quand on suit la campagne électorale de la présidentielle au Sénégal, on ne peut que relever l’attitude équivoque – ce n’est pas fort – de l’opposition démocratique dans ce pays. D’abord le choix de candidatures multiples qui révèle l’incapacité de cette opposition à venir à bout de ses égoïsmes pour faire face à celui qui est perçu par elle comme «un ennemi principal». 
On se demande comment se fait-il que cette opposition n’ait pas mis l’intérêt de la démocratie sénégalaise en avant. La classe politique sénégalaise est sans doute la plus consciente de la sous-région. Sans doute aussi la plus «expérimentée» – en termes de confrontation avec les pouvoirs successifs, de compromission aussi avec ces pouvoirs. 
Sans doute enfin la classe politique la plus outillée pour juger de la voie à suivre. Là où a échoué cette classe, il n’y a pas d’espoir pour ceux de la région…
Deuxième erreur de l’opposition sénégalaise, c’est certainement le fait de s’attarder encore sur la légalité ou non de la candidature de Abdoulaye Wade. Il est déjà candidat et il faut dépenser toute son énergie pour le battre par les urnes pas en cherchant à interpréter les textes pour récuser un fait consommé. 
Cela rappelle toute l’énergie dépensée ici avant le 18 juillet 2009 pour savoir si les délais sont légaux, si la communauté internationale peut être convaincue de faire reculer les échéances… Alors que le candidat Ould Abdel Aziz sillonnait le pays et faisait la démonstration de sa toute-puissance, ses protagonistes restaient à Nouakchott à disserter sur la légalité ou non des délais. Cela leur a coûté cher, très cher.
Troisième erreur : le fait de parler français dans les meetings de l’intérieur. Là où le Sénégalrural attend le Wolof, le Pulaar, le Soninké ou le Diola, les candidats n’hésitent pas à discourir dans français très recherché où les mise en apposition et les subjonctifs sont utilisés à profusion.
En suivant chaque nuit une tranche de la campagne, l’impression est celle-là : le risque de voirWade l’emporter – même dès le premier tour – est trop grand. C’est ainsi que «l’exception sénégalaise» finit d’elle-même. Parce que la vieille garde politique aura choisi de cultiver ses égoïsmes au détriment de l’intérêt de la démocratie et du raffermissement des acquis en la matière. 
Mohamed Fall Oumeir 
CRIDEM, 19/2/2012

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