Par Sofiane T.
Alors que les négociations avec le Polisario peinaient à avancer, voilà qu’un événement vient corser davantage la situation: contre toute attente, le Maroc a décidé de retirer sa confiance à l’émissaire de l’ONU au Sahara occidental M. Christopher Ross.
Le Maroc accuse l’émissaire de l’ONU de mener un travail «partial et déséquilibré». «Les comportements contrastés de M. Ross s’écartent des grandes lignes qui ont été tracées par les négociations au Conseil de sécurité. Pour cela, le Maroc a décidé de retirer sa confiance à l’émissaire de l’ONU au Sahara occidental» a indiqué jeudi un communiqué du gouvernement marocain cité par l’AFP.
«M. Ross s’est éloigné du mandat qui lui a été confié par le secrétaire général de l’ONU en sa qualité de facilitateur et qui consiste à aider les parties à parvenir à une solution politique», a ensuite déclaré à l’AFP le ministre délégué marocain aux Affaires étrangères Youssef Amrani.
Cette décision marocaine intervient quelques semaines après un rapport de l’ONU qui épingle le Maroc sur la situation des droits de l’homme au Sahara occidental. Elle intervient également à la veille d’une visite prévue de Christopher Ross dans la région. Dans une déclaration reprise par plusieurs agences de presse, le porte parole des affaires étrangères, M. Amar Belani, a indiqué que «l’Algérie a toujours soutenu les efforts inlassables menés par l’Ambassadeur Christopher Ross pour accompagner les deux parties, le Maroc et le Front Polisario, dans la recherche d’une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui pourvoie à l’autodétermination du peuple du Sahara occidental».
Le Sahara Occidental est confronté à «des défis réels» que cette étude aborde de manière «lucide» et «courageuse», a-t-il ajouté. De son côté, le secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki Moon, a réaffirmé avoir «toute confiance en Christopher Ross», selon le porte-parole de l’ONU Martin Nesirky.
Pour sa part, le Polisario estime «infondée et arbitraire» la décision du Maroc de retirer sa confiance à M. Ross «dans la poursuite de (sa) mission pour la recherche d´une solution juste et durable au conflit du Sahara occidental garantissant le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination», a déclaré le ministère sahraoui de l’Information, selon des propos repris par l’APS.
«Cette décision, aussi grave qu’injustifiée, est un nouveau défi intolérable et inadmissible du Maroc à la communauté internationale, au Secrétaire général de l’ONU et au Conseil de sécurité qui, dans sa résolution 2044 du 24 avril dernier, a considéré le statu quo inacceptable et a réaffirmé son soutien à M. Ross, et à l’action qu’il mène pour faciliter les négociations entre les parties», a ajouté le Polisario.
Tout en réitérant sa disponibilité à poursuivre le travail avec Christopher Ross, le Polisario estime que «le Maroc veut s’arroger, sans vergogne, le droit de dicter au Secrétaire général de l’ONU le contenu de ses rapports au Conseil de sécurité et de décider de la conduite que doit suivre» M. Ross.
«Rabat veut, par la même, tout faire pour réduire à néant la crédibilité et la neutralité opérationnelles de la Minurso, tel que décrié dans le dernier rapport du Secrétaire général». Visiblement contrariée, la France, alliée du Maroc, par la voix du porte parole des affaires étrangères, M.Bernard Valero, a appelé à un règlement rapide du «différend» qui oppose Rabat à l’émissaire de l’ONU.
«La France a pris note de la déclaration du Maroc, qui a décidé de retirer sa confiance à l’envoyé personnel du Secrétaire général de l’ONU pour le Sahara, Christopher Ross», a indiqué lors d’un point de presse Bernard Valero cité par l’AFP. «La recherche d’un règlement rapide de ce développement doit tenir compte des préoccupations légitimes de toutes les parties», a-t-il ajouté.
Comme toujours la France n’a pas dissimulé son penchant pour les thèses marocaines. «La France réitère son appui au plan d’autonomie marocain, qui est la seule proposition réaliste aujourd’hui sur la table des négociations et qui constitue la base sérieuse et crédible d’une solution dans le cadre des Nations Unies», a conclu le porte-parole.
Avec ce désaveu marocain, les pourparlers risquent d’être plombés et la perspective d’une solution devient aléatoire.
Ouest Tribune, 19/05/2012
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