« La Badil, La badil âan Taqrir el Massir (pas de substitut à l’autodétermination) » scandent les Sahraouis devant toute personne leur rendant visite pour connaître leur opinion. Et pour cause! Le territoire du Sahara occidental, classé parmi les 16 territoires non autonomes, a été envahi par le Maroc et la Mauritanie en 1975. En 1979, le royaume alaouite envahit la partie méridionale occupée par la Mauritanie. Depuis 37 ans, la communauté internationale refuse de reconnaître au Maroc la souveraineté sur l’ex-colonie espagnole. Pour preuve, la décolonisation de ce territoire est réaffirmée annuellement par l’assemblée générale des Nations unies. Si le soutien inconditionnel au Maroc affiché par la France demeure encore le principal obstacle pour la recherche d’une solution équitable au conflit, le droit du peuple sahraoui est toujours mis en avant par les différentes résolutions de l’AG de l’ONU et du Conseil de Sécurité qui prend en charge le dossier depuis plus de 21 ans.
En 1997, le nouveau SG de l’ONU, Kofi Annan, a chargé l’ancien secrétaire d’Etat américain James Baker de remettre sur les rails le plan de paix de l’ONU, en lui suggérant même d’inclure une troisième voie. James Baker parviendra à relancer le plan onusien en trouvant un compromis sur la question de l’identification du corps électoral. En 1997, ce dernier mènera une série de négociations, directes et indirectes, avec les deux parties en conflit, qui se termineront par la signature, par celles-ci, des accords de Houston. Lesquels accords seront avalisés par le Conseil de sécurité. Mais leur application est restée lettre morte ! Trois ans plus tard, James Baker a mis au point un nouveau plan, nommé « plan Baker », incluant les Marocains établis dans le territoire, de 1975 à décembre 1999, et prévoyant deux étapes : une phase d’autonomie du territoire suivie cinq ans plus tard de la tenue d’un référendum. Il remettra son tablier l’année suivante, en signe de protestation contre le blocage marocain et l’inertie de l’ONU. Cette démission a été applaudie par Rabat qui, cette fois, a décidé de tourner le dos au référendum d’autodétermination, brandissant un soi-disant plan d’autonomie. C’est l’occasion pour certains pays, membres du Conseil de sécurité, notamment la France et l’Espagne, de faire campagne pour la démarche marocaine en comptant sur le pragmatisme américain.
Après un tapage médiatique et un travail diplomatique soutenu qui ont duré près de deux années, le Maroc présentera, le 11 avril 2007, son projet d’autonomie sous souveraineté du royaume chérifien à l’ONU. Mais, quelle a été sa surprise en découvrant que le Polisario l’avait devancé en déposant, la veille, une proposition sur la table de Ban Ki-Moon ! Ce dernier a alors fait savoir qu’il traiterait de façon identique les deux propositions, recommandant au Conseil de sécurité de nouvelles négociations entre les deux parties « sans conditions préalables », sous les auspices de l’ONU, pour trouver une solution garantissant l’autodétermination du peuple du Sahara occidental. Depuis, tous les mois d’avril, le Conseil de Sécurité invite les parties à entamer des négociations visant à trouver « une solution juste, durable et mutuellement acceptable basée sur le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination ».
La nomination de Ross, qui connaît la région du Maghreb et communique parfaitement en langue arabe, avait été interprétée comme une volonté de Washington d’accélérer la recherche d’une solution «mutuellement acceptable» pour en finir avec le long statu quo. La complicité de l’équipe de Nicolas Sarkozy avec Rabat à mettre fin à l’entêtement du Maroc, qui poursuit l’occupation illégale d’un «territoire non autonome», pille ses richesses naturelles et maintient le black-out sur les territoires sahraouis occupés, en s’attaquant aux droits fondamentaux des Sahraouis, à commencer par les droits de l’homme.
Avant Ross, l’ancien secrétaire d’Etat américain James Baker a occupé le même poste pendant 8 ans. De 1997 à 2004, il a effectué plusieurs visites, s’est entretenu notamment avec les deux parties en conflit, le Maroc et le Front Polisario, ainsi qu’avec les pays voisins, avant de convaincre Marocains et Sahraouis à signer les accords de Houston. Mais une fois son projet de plan de paix pour l’autodétermination du peuple du Sahara occidental adopté à l’unanimité par le Conseil de sécurité, Baker s’est retiré : Rabat a rejeté son plan et renié tous ses engagements internationaux, même celui de l’organisation d’un référendum du peuple sahraoui. Pourtant, M. Baker, contrairement à Ross, n’a jamais exercé comme ambassadeur en Algérie. Il avait déclaré, en août 2004, qu’il ne connaissait aucun pays au monde qui, au regard du droit international, de la reconnaissance internationale, « admet la revendication du Maroc sur le Sahara ».
Rabat et Paris, nostalgiques du colonialisme, s’attendaient à ce que les émissaires onusiens forcent les négociateurs du Polisario à renoncer à l’application des résolutions des Nations unies et donc à la voie de la consultation démocratique. Peter van Valsum a été forcé par Paris et l’administration Bush à écarter la voie référendaire en affirmant que « l’indépendance du Sahara occidental n’est pas un objectif accessible ». Mais il avait aussi constaté qu’il n’y a « aucune pression sur le Maroc pour qu’il abandonne sa revendication de souveraineté sur le territoire du Sahara occidental » et que la légalité était du côté du Front Polisario.
Le Secrétaire Général de l’ONU et le Conseil de Sécurité ont bien reçu le message envoyé par Van Valsum et vont mettre pression sur le Maroc et imposer l’autodétermination comme seule solution qui respecte les aspirations du peuple du Sahara Occidental. La tâche s’est avéré difficile et a mis à l’épreuve la position du Maroc qui ne cherche qu’une légitimation internationale pour imposer sa revendication. Acculé, Rabat a retiré sa confiance à l’ambassadeur Ross. Le silence n’est pas le meilleur remède pour guérir le mécontentement sahraoui face à la passivité avec laquelle la communauté internationale laisse faire le Maroc. Après ce qui est arrivé en Lybie et au Mali, l’ONU a intérêt à ne pas épuiser la patience des sahraouis dont la frustration a été largement médiatisée.
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