Le Comité de Décolonisation examine les questions de Gibraltar et du Sahara Occidental

LE COMITÉ SPÉCIAL DE LA DÉCOLONISATION EXAMINE LES QUESTIONS DE GIBRALTAR ET DU SAHARA OCCIDENTAL
Des délégations exhortent la communauté internationale à faire en sorte que le Sahara occidental ne soit plus le dernier territoire colonisé du continent africain
Le Comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, dit « Comité spécial des Vingt-Quatre », a examiné ce matin les questions de Gibraltar et du Sahara, après avoir conclu en début de matinée son débat entamé hier sur la situation des îles Falkland (Malvinas).
« La persistance de la colonisation du Sahara occidental –dernier pays encore colonisé en Afrique- constitue un déni de l’Acte constitutif de l’Union africaine et une entrave grave au développement économique et social du continent », a déclaré le représentant de l’Afrique du Sud au cours de l’examen de la situation de ce territoire non autonome. Sur le même ton, les représentants de Cuba, du Venezuela et de l’Équateur ont apporté l’appui de leurs délégations au droit de la population du Sahara occidental à pouvoir s’exprimer et choisir son destin dans le cadre d’un référendum d’autodétermination dont la tenue a été promise aux Sahraouis depuis plusieurs décennies. 
De son côté, M. Ahmed Boukhari, chef du Front Polisario, a dénoncé les exactions commises par le Maroc à l’encontre de la population sahraouie et a accusé le Gouvernement du Maroc de s’opposer à toute recherche d’une solution juste et pérenne à la question du Sahara occidental. M. Boukhari a pris la communauté internationale à témoin, tout en lui demandant d’enquêter sur la disparition de plus de 600 civils sahraouis, parmi lesquels des enfants, dont il a rendu le Maroc responsable.
« Gibraltar ne sera jamais espagnol », a pour sa part déclaré le Chef du Gouvernement de Gibraltar, M. Fabian Picardo, qui s’est présenté comme étant le quatrième chef de gouvernement né à Gibraltar. Il a accusé l’Espagne de violer les eaux territoriales de Gibraltar et a menacé de porter l’affaire devant le Tribunal international du droit de la mer et les autres juridictions internationales pertinentes. « La peur qu’a la diplomatie espagnole de soumettre aux institutions internationales pertinentes la question de l’autodétermination de Gibraltar témoigne de la faiblesse de ses arguments », a estimé M. Picardo. 
De son côté, le représentant de l’Espagne, M. Juan Pablo de Laiglesia, a fustigé la persistance à Gibraltar, et ailleurs dans le monde, d’une forme de « colonialisme consenti qui prétend se perpétuer, en marge des activités de ce Comité, au détriment des droits légitimes d’autres États comme cela est le cas à Gibraltar ». Le représentant faisait ainsi référence à la position adoptée par le Royaume-Uni, selon laquelle la question du statut de Gibraltar ne devrait dépendre que du choix des Gibraltariens eux-mêmes. Établissant un parallèle avec d’autres situations comparables, le représentant de l’Espagne a insisté qu’il ne serait pas réaliste pour le Royaume-Uni de lancer à Gibraltar des initiatives qui prétendraient ignorer les droits de l’Espagne sur ce territoire, droits qui relèvent des termes du Traité d’Utrecht et des résolutions pertinentes adoptées par les Nations Unies sur la question.
Outre les questions de Gibraltar et du Sahara occidental, le Comité spécial a conclu ce matin son débat sur la question des îles Falkland (Malvinas) qu’il avait entamé hier et au cours duquel est intervenue la Présidente de l’Argentine, Mme Cristina Fernández de Kirchner. « Aux îles Malvinas, nous sommes face à un territoire colonisé et non pas face à une population colonisée », a déclaré le représentant du Guatemala, en rappelant que la réunion des ministres des affaires extérieures du Groupe des 77 et de la Chine, réunie à New York le 23 septembre 2011, a exhorté les Gouvernements de l’Argentine et du Royaume-Uni à s’abstenir de toute décision unilatérale et de reprendre leurs négociations, afin de trouver une solution pacifique à la question des îles Falkland (Malvinas).
De son côté, la représentante du Pérou a dit que la position de son pays est basée sur des critères historiques, géographiques et juridiques qui démontrent que l’Argentine a hérité de ses îles à son indépendance. Le représentant du Paraguay, parlant au nom de l’Union des nations de l’Amérique du Sud(UNASUR), a exhorté les parties à s’abstenir de toute décision et initiative unilatérales en fustigeant notamment la décision qu’a prise le Royaume-Uni d’exploiter des ressources naturelles non renouvelables dans les eaux entourant l’archipel des îles Malvinas.
Pour l’examen de la question de Gibraltar, le Comité était saisi d’un document de travail* établi par le Secrétariat. Ce documentrappelle que les négociations sur Gibraltar conduites par le Royaume-Uni et l’Espagne ont abouti à l’établissement, en 2004, du « Forum pour le dialogue », dont les délibérations ont donné lieu en 2008 à l’établissement des « Accords de Cordoue » qui portent sur six domaines de coopération, à savoir: les questions liées à l’environnement; les services financiers et les impôts; la coopération entre le système judiciaire, les douanes et la police; l’éducation; les communications et la sécurité maritime; et les questions de visa. Selon le document de travail, si le Gouvernement du territoire de Gibraltar confirme qu’il ne fera jamais de concessions sur la question de la souveraineté, y compris concernant les eaux territoriales, le Gouvernement espagnol considère pour sa part que le principe de l’autodétermination ne peut être appliqué à la décolonisation de Gibraltar parce que dans leur majorité, les habitants actuels de ce territoire ne sont pas un peuple colonisé, mais représentant plutôt un des principaux instruments utilisés par le Royaume-Uni « pour spolier la population espagnole autochtone ». 
Pour la question du Sahara occidental, le Comité était saisi d’un document de travail** qui note qu’à la fin des quatre cycles de pourparlers informels tenus par les parties entre mars 2010 et mars 2011, aucun progrès n’a été enregistré concernant les questions fondamentales du statut futur du Sahara occidental et des moyens de parvenir à l’autodétermination du peuple du Sahara occidental.
Le Comité spécial des Vingt-Quatre poursuivra ses travaux lundi, le 18 juin 2012.
QUESTION DES ÎLES FALKLAND (MALVINAS) (A/AC.109/2012/12 et A/AC.109/2012/L.6)
Déclarations
M. RAFAEL ARCHONDO (Bolivie) a salué le discours, qu’il a qualifié de « courageux » que la Présidente de l’Argentine a fait hier au sujet des « îles Malvinas » et qui a été l’occasion de montrer les relations compliquées entre l’Europe et l’Amérique du Sud. Il a déclaré que les « îles Malvinas » faisaient partie du territoire du Rio de la Plata en 1776, avant que les habitants deviennent des citoyens de l’Argentine en 1833. En chassant les habitants des îles Malvinas pour les remplacer par des colons britanniques, le Royaume-Uni y a depuis imposé son empreinte coloniale, a ajouté le représentant de la Bolivie. Rappelant que tous les États d’Amérique latine appuyaient les revendications de l’Argentine, le représentant de la Bolivie a exhorté le Royaume-Uni à reprendre le dialogue sur cette question, afin de trouver une solution pacifique au conflit de souveraineté qui l’oppose à l’Argentine, conformément aux dispositions des résolutions pertinentes de l’Assemblée générale.
Mme ELLEONORA TAMBUNAN (Indonésie) a estimé que des critères uniformes ne peuvent être appliqués à tous les cas de décolonisation, puisque chaque cas de décolonisation est unique. Elle a appelé les parties à trouver une solution rapide tenant compte de l’intérêt de la population des îles. Elle a appuyé la résolution adoptée hier qui appelle à unrèglement pacifique et négocié du conflit de souveraineté entre les Gouvernements de l’Argentine et du Royaume-Uni comme seul moyen de mettre fin à la situation coloniale particulière propre aux îles Falkland (Malvinas).
M. YOUSSOUFOU BAMBA (Côte d’Ivoire) a réitéré l’appui de son pays au droit à l’autodétermination des habitants des îles Falkland (Malvinas), et ce en conformité avec la résolution 637 (VII) de l’Assemblée générale. La Côte d’Ivoire réaffirme qu’il est de l’intérêt des deux parties et de la communauté internationale de créer les conditions favorables à la reprise des négociations bilatérales sur cette question. 
Mme JENNY LALAMA-FERNANDEZ(Équateur) a souligné les caractéristiques particulières du cas des îles Malvinas et exhorté les deux parties au conflit de souveraineté à ouvrir des négociations sans conditions préalables. L’Équateur soutient les revendications et les droits légitimes de l’Argentine sur les îles Malvinas et les autres îles environnantes, a dit la représentante. Elle s’est aussi inquiétée de la militarisation et des activités unilatérales menées par la partie britannique dans la région et qui portent atteinte à sa sécurité. Elle a demandé au Royaume-Uni de respecter toutes les résolutions des Nations Unies pour parvenir à une solution pacifique de cette question.
M. JOSÉ ALBERTO BRIZGUTIÉRREZ (Guatemala) a souligné que les succès du processus de décolonisation mené par les Nations Unies sont assombris par le caractère inacceptable de l’occupation des îles Malvinas par le Royaume Uni. Cette question demeure spéciale et spécifique, compte tenu de « l’acte d’agression par la force perpétré par le Royaume-Uni sur cette partie du territoire argentin en 1829 », a estimé le représentant du Guatemala qui s’est aussi dit inquiet des activités unilatérales menées par le Royaume-Uni sur le plateau continental argentin et qui sont « dénoncées par tous les pays d’Amérique du Sud et même par le Groupe des 77 et de la Chine ». Cette situation porte gravement préjudice aux intérêts de l’Argentine et des pays voisins, a-t-il dit. Enfin, le Guatemala espère l’ouverture de négociations directes entre les deux parties le plus rapidement possible, a-t-il conclu.
Intervenant au nom de l’Union des nations de l’Amérique du Sud (UNASUR), M. JOSÉ ANTONIO DOS SANTOS (Paraguay) a rappelé qu’à la date du 29 octobre 2011, réunis dans la ville d’Asunción, les États membres de l’UNASUR ont condamné la présence militaire du Royaume-Uni dans les îles Malvinas et les îles environnantes. Il a rappelé que cette présence militaire était contraire aux dispositions de la résolution 31/49 de l’Assemblée générale. Il a appuyé les droits légitimes de l’Argentine en matière de souveraineté sur les îles Malvinas et les espaces maritimes qui les entourent. Il a dit qu’il était de l’intérêt de la région de l’Amérique du Sud que le Gouvernement du Royaume-Uni accepte de reprendre les négociations avec l’Argentine, afin de trouver une solution pacifique au conflit de souveraineté sur les îles Falkland (Malvinas).
M. JOSÉ LUIS CANCELA (Uruguay) a déclaré que l’Uruguay apportait son appui à l’exercice des droits légitimes de l’Argentine concernant la souveraineté sur les îles Malvinas et les espaces maritimes qui les entourent. Il a dit que de nombreuses études démontrent que l’Argentine possède des titres de propriété irréfutables sur ces îles. M. Cancela a noté que depuis 1965, l’Assemblée générale et le Comité de la décolonisation ont rappelé clairement qu’il s’agissait d’une question coloniale spéciale et particulière, avec un différend sur la question de la souveraineté opposant les Gouvernements de l’Argentine et du Royaume-Uni. Il a rappelé que les résolutions pertinentes soulignent que le seul moyen de régler la question des Malvinas est de passer par un processus de règlement pacifique et négocié du conflit de souveraineté entre les Gouvernements de l’Argentine et du Royaume-Uni. C’est pourquoi, a-t-il indiqué, l’Uruguay a apporté son soutien à la résolution adoptée hier par le Comité et qui exhorte les deux parties à reprendre leurs négociations, afin de trouver, dans les meilleurs délais, une solution pacifique au conflit qui les oppose sur le statut des îles Falkland (Malvinas). M. Cancela a exhorté les parties à s’abstenir de toute décision et initiative unilatérale tout en fustigeant la décision prise par le Royaume-Uni d’exploiter les ressources naturelles non renouvelables de la région.
M. SAUL WEISLEDER (Costa Rica) a déclaré que depuis 1831, le territoire argentin fait l’objet de violations par le Royaume-Uni. Les activités unilatérales britanniques sur les îles dont il est question aujourd’hui accentuent par ailleurs les différends entre les deux parties et rendent les recherches de solutions encore plus complexes. Ces activités ne contribuent en rien à la recherche d’une solution, a accusé M. Weisleder. À cet égard, le Costa Rica reste solidaire des revendications de l’Argentine sur les îles Malvinas, a-t-il précisé. Il a cité une résolution du vingt et unième Sommet des chefs d’État ibéro- américains qui demande aux deux parties de reprendre dans les plus brefs délais les discussions sur les îles Malvinas, avec comme base de travail la souveraineté de l’Argentine sur ce territoire. Il est revenu ensuite, pour les condamner, sur les activités militaires britanniques dans les îles Malvinas notamment sur les tirs de missiles.
M. JOAQUIM ALEXANDER MAZA MARTELLI (El Salvador) a réitéré la position de principe de son pays qui veut que la question des îles Malvinas doit être réglée sur la base de la souveraineté de l’Argentine sur ces îles en tenant compte de la géographie, de l’histoire et des faits politiques pertinents. La Conférence des États américains qui s’est déroulée en Bolivie, en avril dernier, a consolidé dans ses résolutions les droits légitimes de l’Argentine sur ces îles, a rappelé le représentant. L’argument de la puissance administrante est dépassé et ne se conforme pas aux résolutions des Nations Unies. À cet égard, El Salvador lance un appel au Royaume-Uni pour qu’il trouve une solution à la question des îles à travers un dialogue avec l’Argentine, conformément aux résolutions de l’ONU et à la Charte de l’Organisation.
Mme ROJAS (Pérou) a dit qu’il était nécessaire de trouver une solution pacifique et négociée au conflit de souveraineté entre les Gouvernements de l’Argentine et du Royaume-Uni et à la situation coloniale particulière des îles. Elle a dit que la position du Pérou se base sur des critères historiques, géographiques et juridiques, qui démontrent que l’Argentine a hérité de ces îles à son indépendance. Elle a exhorté les deux Gouvernements à reprendre leurs négociations dans les meilleurs délais, afin de trouver une solution pacifique au conflit de souveraineté sur les îles Malvinas. En attendant, elle a exhorté les deux parties à s’abstenir de toute initiative unilatérale de nature à modifier la situation des îles. Elle a rappelé que la résolution 37/9 de l’Assemblée générale invite le Secrétaire général à mener une mission de bons offices, afin d’aider les parties à répondre à la demande formulée par l’Assemblée générale dans ses résolutions relatives à la question des îles Malvinas. Elle a invité le Secrétaire général à informer les États Membres de tout progrès sur la question.
M. DONOSO (Colombie) a déclaré que la Colombie apportait tout son appui à l’exercice des droits légitimes de l’Argentine concernant la souveraineté sur les îles Malvinas et les espaces maritimes qui les entourent. Il a souscrit à la déclaration de l’UNASUR condamnant les activités militaires du Royaume-Uni dans la région. Il a regretté que malgré l’adoption des résolutions 31/49, 37/9, 38/12, 39/6, 40/21, 41/40, 42/19 et 43/25 de l’Assemblée générale, ce différend n’a toujours pas été réglé. C’est pourquoi la Colombie exhorte les Gouvernements de l’Argentine et du Royaume-Uni de reprendre leurs négociations afin de trouver, dans les meilleurs délais, une solution pacifique au conflit de souveraineté sur les îles Malvinas.
QUESTION DE GIBRALTAR (A/AC.109/2012/14)
Pour l’examen de cette question, le Comité spécial des Vingt-Quatre était saisi d’un document de travail établi par le Secrétariat (A/AC.109/2012/14). Le document rappelle que Gibraltar est un territoire non autonome administré par le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord formé d’une étroite péninsule qui s’étend vers le sud à partir de la côte sud-ouest de l’Espagne. Selon le Royaume-Uni, la puissance administrante, la superficie de Gibraltar est de 5,8 kilomètres carrés et selon l’Espagne, qui revendique sa souveraineté sur le territoire, elle est de 4,8 kilomètres carrés. La question des eaux territoriales situées au large des côtes de Gibraltar continue de faire l’objet d’un litige. En juin 2004 les Gibraltariens ont pris part aux élections parlementaires européennes.
Le Gouvernement espagnol maintient que l’entrée en vigueur de la Constitution de 2006 correspondait à une modernisation gouvernementale qui n’affectait en rien la capacité internationale de Gibraltar et que l’adoption de la Constitution de 2006 apportait une réforme au régime colonial qui n’en subsistait pas moins, et qu’elle n’altérait en rien le processus de décolonisation en cours de Gibraltar auquel le principe d’autodétermination ne s’appliquait pas. Les négociations sur Gibraltar entre le Royaume-Uni et l’Espagne ont abouti à l’établissement, en 2004, du Forum de dialogue.
La première réunion ministérielle du Forum, qui s’est tenue en 2006, a abouti à une série d’accords, appelés « Déclarations de Cordoue ». La seconde réunion, qui a eu lieu en 2008, à Londres, a permis de définir six nouveaux domaines de coopération, à savoir les questions liées à l’environnement; les services financiers et les impôts; la coopération en matière judiciaire, douanière et policière; l’éducation; les communications et la sécurité maritime; ainsi que les questions de visa. En 2010, le Forum a organisé une Réunion de haut niveau à Gibraltar pour évoquer les progrès réalisés par les groupes de travail dans ces six domaines.
La réunion ministérielle qui devait se tenir la même année n’a pas eu lieu. Aucune autre réunion n’a été organisée depuis 2010. Dans une déclaration faite devant la Commission des questions politiques spéciales et de la décolonisation (Quatrième Commission) de l’Assemblée générale, le 4 octobre 2011, le Représentant permanent adjoint du Royaume-Uni auprès de l’Organisation des Nations Unies, exerçant son droit de réponse, a notamment réaffirmé la position de longue date de la puissance administrante, qui refuse de laisser le peuple de Gibraltar passer contre son gré sous la souveraineté d’un autre État ou s’engager dans un processus de négociations sur la souveraineté auquel il est opposé. Le 4 octobre 2011, prenant la parole devant la Quatrième Commission, le Ministre principal en exercice de Gibraltar a déclaré, entre autres, qu’il était incompréhensible que l’Espagne continue de refuser à Gibraltar son droit à l’autodétermination.
L’Espagne ayant perdu Gibraltar en 1704, l’exercice par ce dernier de son droit à l’autodétermination ne pouvait porter atteinte à l’intégrité territoriale de l’Espagne, a-t-il estimé. Le Ministre a poursuivi en déclarant que l’appel lancé par l’Espagne au Royaume-Uni pour débattre du transfert de la souveraineté de Gibraltar dans le cadre de négociations bilatérales constituait une violation de la Charte de l’ONU et ne serait jamais accepté par le peuple de Gibraltar. Le territoire ne pouvait être ni revendiqué par l’Espagne, ni cédé par le Royaume-Uni, a-t-il estimé.
Le 4 octobre 2011, le Représentant permanent de l’Espagne auprès de l’Organisation des Nations Unies, s’exprimant face à la Quatrième Commission, a déclaré que le principe de l’intégrité territoriale était essentiel dans le cas de Gibraltar, comme l’Assemblée générale l’avait clairement indiqué dans les résolutions et décisions pertinentes. Il a de plus rappelé que l’Espagne et le Royaume-Uni négociaient afin de trouver la solution la plus pratique à leur unique différend bilatéral. Pour l’Espagne, a-t-il continué, la solution résidait dans la restitution, d’une part, du territoire transféré par l’Espagne en vertu du Traité d’Utrecht et, d’autre part, du sol occupé illégalement par la suite par le Royaume-Uni. En 2011, la question de Gibraltar n’a fait l’objet d’aucune négociation bilatérale dans le cadre du Processus de Bruxelles, qui est distinct du Forum de dialogue sur Gibraltar. Au début de 2012, le Gouvernement espagnol a de nouveau demandé la reprise des pourparlers bilatéraux sur la souveraineté avec le Gouvernement britannique.
De son côté, le Royaume-Uni a clairement fait savoir qu’aucune négociation à ce sujet n’aurait lieu sans l’accord de Gibraltar. Les Gouvernements du Royaume-Uni et de Gibraltar ont tous deux reconnu que la Constitution en vigueur offrait aux deux parties la possibilité d’entretenir des relations constitutionnelles modernes et matures ne reposant pas sur le colonialisme. Le Gouvernement britannique comme celui du territoire considère que les critères utilisés par l’Organisation des Nations Unies pour procéder au retrait d’un territoire de la liste des territoires non autonomes sont anachroniques.
Déclarations
M. FABIAN PICARDO, Chef du Gouvernement de Gibraltar, qui s’est présenté comme étant le « quatrième Chef de Gouvernement né et ayant grandi à Gibraltar », salue « le sentiment d’urgence » éprouvé par le Comité spécial des Vingt-Quatre sur le cas de Gibraltar. « Depuis la première déclaration du premier Chef du Gouvernement de Gibraltar devant le Comité spécial, certaines choses ont évolué et d’autres ont été répétées jusqu’à aujourd’hui », a déclaré le Chef du Gouvernement. « Le Royaume d’Espagne tente de freiner notre décolonisation depuis le régime fasciste de Franco jusqu’à aujourd’hui », a-t-il indiqué. « La position du Gouvernement d’Espagne, qui n’acceptera jamais un statut juridique spécial pour Gibraltar, reste désespérément toujours la même », a-t-il regretté. Il a ajouté que cette attitude est « antidémocratique et contraire à la Charte des Nations Unies ».
Il a ensuite dit qu’un ancien représentant permanent de l’Espagne aux Nations Unies aurait reconnu que les stratégies de son pays concernant la question de Gibraltar ont toutes échoué. « Gibraltar ne sera jamais espagnol », a-t-il affirmé. Il a aussi regretté que « les négociations tripartites aient été suspendues par l’Espagne. » Puis, il a attiré l’attention du Comité sur ce qui se passe sur les eaux territoriales de Gibraltar où « la Garde civile espagnole viole les eaux et les territoires marins de Gibraltar. » Ce faisant, l’Espagne viole le Traité d’Utrecht, a dénoncé le Chef du Gouvernement de Gibraltar. Il a indiqué qu’il avait l’intention de soumettre cette question au Tribunal international du droit de la mer « pour régler le problème une fois pour toute ».
M. JUAN PABLO DE LAIGLESIA (Espagne) a souligné la nécessité de faire des progrès pour faire évoluer la situation des 16 territoires non autonomes qui doivent encore être décolonisés. Il a mis l’accent sur la situation particulière dans laquelle sont certains cas de décolonisation où la légitimité de la puissance administrante fait l’objet d’un différend avec d’autres États Membres. Il est nécessaire d’explorer des nouvelles formules pour atteindre les objectifs de ce Comité tout en s’assurant que cet exercice respecte les principes de l’Organisation des Nations Unies, de la Charte, et des résolutions déjà adoptées sur chacun des cas qui nous intéressent, a-t-il souligné. M. de Laiglesia. a fustigé la persistance d’une forme de « colonialisme consenti qui prétend se perpétuer en marge des activités de ce Comité au détriment des droits légitimes d’autres États, comme cela est le cas à Gibraltar ». Il ne serait pas réaliste pour qui que ce soit de lancer des initiatives qui prétendraient ignorer les droits de l’Espagne sur Gibraltar, droits qui sont conformes aux termes du Traité d’Utrecht et à la doctrine des Nations Unies, a dit le représentant de l’Espagne. Il a rappelé que les Nations Unies demandent depuis trois décennies au Royaume-Uni de régler la question de Gibraltar avec l’Espagne, conformément à la déclaration signée entre les deux pays le 27 novembre 1984 et qui est connue depuis sous l’appellation de « Processus de Bruxelles sur Gibraltar ». Il s’est opposé à ce que la question de Gibraltar soit retirée de la liste des territoires non autonomes à décoloniser, tant qu’elle n’aura pas été traitée conformément aux objectifs de ce Comité.
QUESTION DU SAHARA OCCIDENTAL ( A/AC.109/2012/16 )
Le Comité spécial des Vingt-Quatre était saisi du document de travail établi par le Secrétariat (A/AC.109/2012/16). En application de la résolution 65/112 de l’Assemblée générale, le Secrétaire général a présenté à l’Assemblée, à sa soixante-sixième session, un rapport sur la question du Sahara occidental (A/66/260). Ce rapport couvre la période allant du 1er juillet 2010 au 30 juin 2011. Dans cette résolution, le Conseil de sécurité, ayant examiné le rapport du Secrétaire général (S/2010/175), a, entre autres, réaffirmé que les accords militaires de cessez-le-feu devaient être pleinement respectés et a exhorté les parties à y adhérer pleinement.
Il s’est félicité de ce que les parties se soient engagées, sur proposition de l’Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Sahara occidental, à tenir des pourparlers informels restreints dans la perspective d’une cinquième série de négociations et a demandé aux parties de continuer de faire preuve de volonté politique et de travailler dans une atmosphère propice au dialogue afin d’engager plus résolument des négociations de fond et de garantir ainsi l’application des résolutions pertinentes. En application de la résolution 1920 (2010), le Secrétaire général a soumis au Conseil de sécurité un rapport daté du 1er avril 2011 (S/2011/249), dans lequel il l’a informé qu’à la fin des quatre cycles de pourparlers informels tenus par les parties entre mars 2010 et mars 2011, aucun progrès n’avait été enregistré concernant les questions fondamentales du statut futur du Sahara occidental et des moyens de parvenir à l’autodétermination du peuple du Sahara occidental.
L’Envoyé personnel et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) avaient discuté sans succès avec les parties pour trouver une solution qui ouvrirait la voie à la reprise des vols, suspendus en mars 2010. En juillet, l’Envoyé personnel s’était rendu à Londres, Paris et Madrid, où il avait constaté que ses interlocuteurs étaient conscients de la nécessité de dépasser le statu quo et étaient disposés à œuvrer avec lui et avec les parties pour promouvoir un engagement plus profond et des discussions plus souples, et qu’ils s’accordaient sur la nécessité d’intensifier le travail relatif aux mesures de confiance.
Le troisième cycle de pourparlers informels, organisé du 7 au 10 novembre 2010 à Long Island (État de New York), avait coïncidé avec les mesures prises par le Maroc pour démanteler le camp de Gdim Izik, établi à des fins revendicatives à l’extérieur de Laayoune. Tout au long de la réunion, le Front Polisario et le Maroc s’étaient à maintes reprises mutuellement accusés d’intensifier les tensions et de commettre des violations des droits de l’homme dans le Sahara occidental et dans les camps de réfugiés de la région de Tindouf. À la fin de la première séance, il était clair, comme dans le passé, qu’aucune des parties n’acceptait la proposition de l’autre comme seule base des futures négociations. L’Envoyé personnel avait alors proposé aux parties de réfléchir aux moyens de créer une nouvelle dynamique lors des réunions futures en envisageant des approches novatrices au processus de négociation et en définissant des sujets à examiner quel que soit le statut final du Sahara occidental.
Ayant examiné le rapport du Secrétaire général concernant le Sahara occidental (S/2011/249), le Conseil de sécurité a adopté à l’unanimité, le 27 avril 2011, la résolution 1979 (2011), par laquelle il a notamment réaffirmé que les accords militaires devaient être pleinement respectés, demandé à toutes les parties de coopérer pleinement aux opérations de la MINURSO (Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental) et de garantir la sécurité, ainsi qu’un accès sans entrave et immédiat, au personnel des Nations Unies et au personnel associé dans l’exécution de leur mandat. Il a demandé également aux parties de continuer de faire preuve de volonté politique, de travailler dans une atmosphère propice au dialogue et de poursuivre les négociations sous les auspices du Secrétaire général, sans conditions préalables et de bonne foi, en vue de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui pourvoit à l’autodétermination du peuple du Sahara occidental dans le contexte d’arrangements conformes aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies, et a pris note du rôle et des responsabilités des parties à cet égard.
Le 9 décembre 2011, l’Assemblée générale a adopté le projet de résolution intitulé « Question du Sahara occidental » (A/C.4/66/L.5) sans le mettre aux voix en tant que résolution 66/86. Dans cette résolution, elle s’est notamment félicitée de ce que les parties se soient engagées à continuer de faire preuve de volonté politique et de travailler dans une atmosphère propice au dialogue. Elle s’est félicitée également des négociations qui avaient eu lieu entre les parties, a prié le Comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux de continuer à suivre la situation au Sahara occidental et de lui présenter un rapport sur la question à sa soixante-septième session, et elle a invité le Secrétaire général à lui présenter, à sa soixante-septième session, un rapport sur l’application de la résolution.
Déclarations
Mme COMESAÑA PERDOMO (Cuba) a reconnu qu’au Sahara occidental, les négociations entre les parties n’ont pas connu de progrès depuis plusieurs années. Elle a rappelé le droit inaliénable du peuple sahraoui à l’autodétermination et à l’indépendance. La représentante a ensuite indiqué que Cuba continue d’offrir des formations et des études à 300 jeunes Sahraouis, conformément aux résolutions des Nations Unies qui appellent la communauté internationale à fournir une aide à ce peuple.
Mme MARIAELENA MARGARITA ANZOLA PADRÓN (Venezuela) a vigoureusement plaidé en faveur du respect des droits du peuple sahraoui à l’autodétermination et a demandé l’application stricte de la résolution 1514 (1960) des Nations Unies. Elle a déploré l’absence de débat approfondi sur la question du Sahara occidental et a invité le Comité spécial des Vingt-Quatre à examiner la question lors de sa prochaine session, notamment en ce qui concerne la réalité de la vie quotidienne des Sahraouis. Elle a aussi regretté que le travail de l’Envoyé personnel du Secrétaire général soit suspendu après la décision unilatérale prise par l’une des parties qui a décidé de ne plus travailler avec lui. Le peuple sahraoui doit pourtant pouvoir exercer son droit à l’autodétermination et à son indépendance dans les plus brefs délais. 
Mme JENNY LALAMA-FERNANDEZ(Équateur) a appuyé la volonté du peuple sahraoui du Sahara occidental d’obtenir un référendum pour l’exercice de son droit inaliénable à l’autodétermination. Elle a noté qu’un rapport du Conseil de sécurité du mois d’avril 2012 a mis en évidence les restrictions imposées par le Maroc à la Mission de l’ONU, la MINURSO, qui n’a aucune liberté de circulation et aucun accès direct aux populations ou aux organisations locales de défense des droits de l’homme. Il faut intensifier les contacts et organiser plus de réunions, a-t-elle insisté en regrettant qu’aucun accord n’ait été respecté par le Maroc concernant l’envoi d’un Envoyé spécial du Secrétaire général. Nous sommes devant une situation grave de violation des attributions de l’Organisation, a-t-elle estimé en notant que les droits de l’homme continuent d’être violés au Sahara occidental dont les ressources sont illégalement exploitées par le Maroc. Elle a jugé urgent de tout mettre en œuvre pour permettre la décolonisation du dernier pays africain encore colonisé.
M. MANIEMAGEN GOVENDER(Afrique du Sud) a indiqué que le Département des affaires juridiques de l’ONU a appuyé la demande du peuple du Sahara occidental d’exercer son droit à l’autodétermination. Il a exhorté le Conseil de sécurité à soutenir le processus politique entre les parties en s’assurant que le mandat de la MINURSO soit respecté autour de ses trois priorités qui sont: agir en tant qu’instrument de stabilité; agir en tant que mécanisme de mise en œuvre d’un référendum et fournir des informations indépendantes au Secrétariat de l’ONU, au Conseil de sécurité, et à la communauté internationale. Il a souhaité que la dernière colonie située sur le territoire du continent africain puisse enfin être décolonisée. Il a estimé que la persistance de la colonisation du Sahara occidental constituait un déni de l’Acte constitutif de l’Union africaine et une entrave grave au développement économique et social du continent. 
M. AHMED BOUKHARI, du Front Polisario, a parlé de la situation qui se dégrade sur le terrain au Sahara occidental, et des prisons du Maroc qui sont pleines de détenus politiques sahraouis. Cette situation reflète la dureté de la présence coloniale du Maroc au Sahara occidental. La répression devient féroce, a dit M. Boukhari, en évoquant « la disparition toujours non éclaircie de jeunes Sahraouis ». En 2010, 600 civils sahraouis ont disparu et restent introuvables. Parmi eux on compte des enfants âgés de trois mois à 14 ans, introuvables depuis 2004. Des tombes clandestines de Sahraouis ont été découvertes en 2010, a indiqué M. Boukhari. Ces crimes de guerre restent désespérément impunis, a-t-il déploré. Le Parlement européen et les organisations non gouvernementales « Human Rights Watch » et Amnesty international avaient saisi le Conseil de sécurité des Nations Unies sur ces crimes, mais en vain, a-t-il regretté.
M. Boukhari a ainsi dénoncé la « politique de deux poids deux mesures », que pratiquent certaines puissances au sein de l’ONU. Il a déploré que la MINURSO ne dispose pas de toutes les prérogatives requises pour mener sa mission. Il a mis en doute l’impartialité et la neutralité de la MINURSO s’agissant de peuple sahraoui. De même, il a déploré l’obstruction systématique du Maroc qui bloque le processus que devrait mener l’Envoyé personnel du Secrétaire général. En définitive, a-t-il dit, la question du Sahara occidental doit être réglée par l’exercice du droit à l’autodétermination auquel a droit le peuple sahraoui. Le Comité spécial des Vingt-Quatre devrait engager des débats approfondis sur la question et se rendre sur le terrain dans les plus brefs délais, car le Sahara occidental reste le dernier pays colonisé de l’Afrique, a rappelé M. Boukhari.

Département de l’information de l’ONU, 15/06/2012

Be the first to comment

Leave a Reply

Your email address will not be published.


*