Les «petites bonnes» marocaines, des filles mineures pour la plupart, originaires de régions reculées du royaume et soumises au bon vouloir de familles citadines aisées, qui les ont embauchées pour travailler comme des forcenées, posent un vrai problème au Maroc. Selon l’Unicef, elles seraient plus de 80 000 âgées de moins de quinze ans. Leurs conditions de vie inacceptables sont souvent montrées du doigt, surtout quand un fait divers les concerne directement.
Divers projets de loi visant à améliorer leurs conditions de travail ont d’ailleurs été proposés, sans effet concret à ce jour. Un collectif pour l’éradication du travail de ces »petites bonnes”, rassemblant 34 associations et réseaux marocains qui se battent pour la promotion de la justice et de la dignité humaine, a d’ailleurs été créé en 2009, il s’est donné pour objectif de mobiliser l’opinion publique face à l’ampleur de ce phénomène social et de garantir une meilleure protection juridique aux enfants de moins de 15 ans soumis à toutes formes d’exploitation.
Un autre problème du même genre, celui des « petites bonnes » venues des Philippines, est beaucoup moins connu. Depuis quelques années on assiste, en effet, à la migration d’employées de maison originaires de ce pays, ver le Maroc. Ces femmes ou ces filles, dont le nombre dépasserait les trois mille, sont comme leurs consœurs marocaines souvent confrontées à l’esclavage moderne. Mal traitées elles vivent, en outre, dans la clandestinité.
Devant l’abondance de main-d’œuvre locale elles n’ont d’ailleurs aucune chance d’obtenir un jour des permis de travail et de sortir de leur condition d’esclave, non payées ou sous payées, sans passeport, celui-ci leur ayant été supprimé. Depuis quelques mois, toutefois, le voile se lève sur ce tabou, grâce notamment à l’action de l’Organisation démocratique du travail (ODT), qui a rendu publics certains témoignages accablants. Pour la première fois, des bonnes philippines ont pu raconter leur calvaire à visage découvert. « Affamées, torturées, voire violées », affirme Tel Quel qui rapporte « une hideuse réalité passée sous silence».
Le magazine de Casablanca s’est demandé comment ces femmes venues d’un pays si lointain ont pu atterrir au Maroc. Pour Ali Lofti, secrétaire général de l’ODT, il s’agit d’un trafic d’êtres humains qui s’est progressivement mis en place entre les deux pays. Des intermédiaires repèrent les femmes sur place et le réseau s’active. L’ODT a déposé plusieurs plaintes, sans succès à ce jour, contre les membres marocains de ces réseaux. Des lettres ont également été envoyées au gouvernement qui n’a toujours pas répondu. Toutefois, grâce aux premiers témoignages qui ont été publiés dans la presse internationale, le Maroc est montré du doigt et de plus en plus de victimes osent se manifester.
Il faut dire qu’aux Philippines l’exportation de main d’oeuvre est un véritable business. On estime à plus de neuf millions le nombre de Philippines exilées de par le monde soit 10% de la population de l’archipel. Devant le chômage endémique qui y sévit, l’hémorragie n’est pas prête de s’arrêter et le Maroc pourra continuer à loisir d’ accueillir des femmes, considérées comme des sauveuses de l’économie par le gouvernement philippin, pour leur servir de nounous à bon compte.
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