Je l’ai connu, comme nombre de Mauritaniens, à l’occasion de la crise politique qui a secoué le pays en 2008, prenant une dimension internationale au lendemain du coup d’Etat du 6 août qui a mis fin au régime de Sidi Ould Cheikh Abdallahi. Comme envoyé spécial de l’Union africaine à titre de président du CPS (Conseil de paix et de sécurité), il venait fréquemment essayer de rapprocher les points de vue des différents pôles politiques mauritaniens. Dans un premier temps, il fut boudé par les autorités qui l’accusaient d’épouser la position officielle algérienne au début «peu compréhensive».
Au bout de quelques voyages, il gagna la confiance de tous.
Diplomate aguerri, Ramtane Lamamra a cette faculté de vous mettre à l’aise tout restant intraitable sur les principes. Il savait convaincre et pouvait rester le temps nécessaire pour écouter son interlocuteur. Le genre de responsable que les journalistes apprécient pour sa disponibilité et son ouverture sur eux.
Des nuits durant, nous avons discuté dans le hall de l’hôtel Méridien où se déroulaient les négociations entre les trois pôles mauritaniens (Pôle du pouvoir, celui du Front national de défense de la démocratie et celui du Rassemblement des forces démocratiques). On avait l’impression qu’il nous donnait la primeur des informations liées à l’évolution des pourparlers. Il comprenait parfaitement – il nous l’a dit – que le plus dur des négociateurs était Mohamed Ould Maouloud. Mais l’habitude des longues discussions des gauchistes lui permettaient de comprendre qu’il fallait l’user par le temps et la pression extérieure. Le reste viendra quand le négociateur sentira que les autres ont le temps de l’écouter et qu’ils ne se lasseront pas de lui objecter tel ou tel argument.
Je l’ai rencontré plusieurs fois – je l’ai même interviewé pour La Tribune – après la normalisation de la situation en Mauritanie. Toujours la même courtoisie, la même convivialité, la même prestance… Ramtane Lamamra incarne parfaitement cette image que nous avons de la redoutable diplomatie algérienne toute en lui donnant un visage humain.
Sa nomination, à ce moment précis, à la tête du département des affaires étrangères du pays le plus dynamique en matière de diplomatie dans notre aire, cette nomination n’est pas le fruit du hasard. Il marque certainement un tournant dans un monde où les turbulences créent un chao indescriptible dans le Monde Arabe et Musulman, où l’Algérie a intérêt à ancrer son versant Sud dans les profondeurs africaines et où les enjeux mondiaux demandent un savoir-faire «diplomatique» performant.
Ceci est un clin d’œil destiné à saluer la nomination d’un ami de la Mauritanie, un ami qui connait désormais la classe politique et qui a une affection certaine et un respect profond pour notre pays.
L’ancien secrétaire général du ministère des affaires étrangères, ancien Ambassadeur et surtout ancien président du CPS, trouvera certainement les moyens de recadrer la diplomatie algérienne, de la recentrer sur le Maghreb et l’espace sahélo-saharien. Avec humilité et sans condescendance.
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