Le président américain, Barack Obama, a reçu, vendredi dernier, pour la première fois, à la Maison-Blanche, le roi du Maroc Mohammed VI. Les deux chefs d’état s’étaient rencontrés pour des entretiens officiels sur la «sécurité et l’économie». Mais l’important, quant au fond de cette visite, résidait surtout dans les éléments nouveaux qu’elle allait fournir en ce qui concerne l’épineux dossier du Sahara occidental.
La visite, assez furtive, du souverain marocain à Washington a été sanctionnée par un communiqué commun dans lequel les Américains déploient un remarquable exercice d’équilibrisme. Il y a deux phrases clés dans ce communiqué.
La première contient l’assertion que les Etats-Unis continueront à soutenir les efforts pour la recherche d’une «solution pacifique, durable et mutuellement convenue» à la question du Sahara occidental. La seconde comporte un jugement sur le plan d’autonomie marocain qui est qualifié de «sérieux, réaliste, crédible» et représentant une «approche potentielle qui pourrait satisfaire les aspirations du peuple du Sahara occidental». Ces deux phrases clés s’annulent, car elles n’énoncent aucune politique active. Le roi du Maroc pourra rentrer à Rabat en déclarant qu’il a fait la conquête de l’Amérique et que Barack Obama approuve son plan d’autonomie. C’est clairement ce qui est déjà mis en exergue au Maroc. Mais c’est une victoire à la Pyrrhus quand même. Le Roi du Maroc pense son «plan» comme une alternative définitive au référendum d’autodétermination, Barack Obama n’y voit qu’une «approche potentielle». Les mots ayant leur importance, cela signifie que les Etats-Unis ont une vraie «préférence» pour le plan d’autonomie du Maroc, mais qu’ils ne ferment pas le jeu. Il faut pour que cette approche «potentielle» devienne effective qu’elle soit «mutuellement» convenue ou acceptée. En clair, il faudrait que le Polisario l’accepte.
En 2003, le Conseil de sécurité avait adopté à l’unanimité le plan Baker 2… Même Paris avait voté pour… Mais, le Maroc l’a refusé. Paris, très «compréhensif», est arrivé à convaincre ses pairs au Conseil de sécurité qu’aucune solution ne doit être «imposée» aux parties. Rabat pouvait souffler… Mais, l’ONU se créait une «règle» qui allait créer une impuissance durable à résoudre le problème. Les négociations sans fin entre le Maroc et le Polisario destinées à trouver une solution «mutuellement acceptable» le montrent.
En 2008, enfreignant cette règle qui veut que l’on cherche une solution mutuellement acceptable, le diplomate néerlandais Peter Van Walsum, médiateur de l’Organisation des Nations unies pour le conflit du Sahara occidental, a tenté de forcer la main aux Sahraouis en déclarant publiquement qu’un « Sahara occidental indépendant n’était pas une proposition réaliste ». C’était un « coup de poker » et une pression sur les Sahraouis… qui n’est pas passée. Peter Van Walsum a été limogé pour impartialité. La règle du « mutuellement acceptable » s’impose. Toute tentative d’imposer une solution est rejetée. Les Américains sont ainsi dans un jeu à somme nulle. Ils ont bien un avis positif sur le plan marocain, mais il faut que les Sahraouis l’approuvent. Et il n’y a aucune raison, jusqu’à preuve du contraire, pour que le Polisario change d’avis sur le droit à l’autodétermination. Washington satisfait en définitive tout le monde. Le Roi rentre chez lui avec un soutien renouvelé au plan d’autonomie. Les Sahraouis, eux, constatent que ce n’est qu’une option «potentielle» parmi d’autres, mais qu’en tout état de cause, il faut un accord «mutuellement acceptable». Washington fait dans un équilibrisme qui n’annonce aucune action. Le Maghreb est bien loin et on n’y a que des « amis » à ne pas contrarier. On leur donne à entendre ce qu’ils veulent bien entendre. Cela ne coûte rien. Ce n’est pas Washington qui va créer une percée dans le dossier du Sahara occidental…
par Lena azizi
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