En récompense à sa servilité, le Makhzen a pu recueillir des miettes, des retombées del’opération Serval au Mali. Introduit dans le pays, dans les bagages du président français, François Hollande, le monarque alaouite montre une frénésie à la mesure de ce qu’il considère comme étant un pied de nez fait à l’Algérie. Grâce au coup de pouce du » libérateur » du Nord-Mali, des groupes rebelles au pouvoir de Bamako, le Roi tente de jouer son va-tout et d’imposer son pays en tant que partie prenante dans la stabilisation du Mali, voire dans sa reconstruction.
Dans le même temps, le nouveau pouvoir Malien est obligé de donner le change et de faire croire que la politique étrangère malienne obéit à celle de la France dans la région. Ainsi M6 a pu effectuer une deuxième visite afin de marquer la réalité du rapprochement. En guise de » concrétisation » de la chose, il y a eu cette déclaration du président, Ibrahim Boubacar Keïta, qui loue le »efforts marocains dans le règlement du conflit du Sahara occidental », qui a pu laisser entrevoir une rupture avec le Front Polisario, du moins être interprétée et exploitée comme telle par la propagande du Makhzen. Il y a eu aussi la visite à Rabat du responsable de » l’aile civile » du Mouvement National de Libération de l’Azawad « MNLA ». Celle-ci pouvait laisser penser que le Maroc mettait un pied dans le processus de conciliation en cours, entre les autorités maliennes et les groupes rebelles. Une hypothèse accréditée par une grande partie de la presse, qui y voit une » victoire » de Rabat sur Alger.
Ceci sur le plan politique. Pour le reste, pour l’aide marocaine, il est fait état de la formation d’imams (sic !) de la construction de logements pour les militaires maliens et d’une opération » secrète « , mais étalée à longueur de colonnes de journaux et de bulletins télévisés, de formation de la garde républicaine malienne. Enfin, sur le plan économique, une série de petites affaires ont été conclues ou fait l’objet de protocole d’accord. Une façon de flatter quelque peu l’ego de Mohamed VI et d’indiquer à l’Elysée qu’il est obéi, autant que faire se peut.
Au moins à la mesure de ce que le Maroc peut offrir en matière de coopération. Mais, et la géographie et la réalité des rapports de forces ne peuvent laisser place à des manoeuvres pour le moins grossières
d’imposer l’intromission de Rabat dans le Sahel, quand rien ne le justifie si ce n’est une volonté impériale de contrer l’Algérie, en droite ligne du blocage des résolutions onusiennes concernant le référendum d’autodétermination des Sahraouis. Ce ne sera donc pas le Makhzen qui aura les moyens ou qui pourra objectivement jouer un quelconque rôle dans la sousrégion, même s’il peut avoir un certain niveau de nuisance, grâce aux manipulations qu’il a déjà entreprises dans l’Azawad, pour autant que le MNLA puisse représenter une force déterminante ou, à tout le moins, ignorer les rapports de forces au point de faire entière allégeance au palais royal marocain, quelle que soit la pression que peuvent exercer le pouvoir Français. Preuve en est que, selon les observateurs, l’Algérie » semble avoir repris le dessus » dans le dossier malien.
Ahmed Halfaoui
Les Débats, 05/03/2014
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