Résumé
L’exploitation et l’exportation des ressources naturelles au Sahara Occidental occupé a des conséquences graves pour la paix dans le territoire et pour l’avenir de ses habitants, le peuple sahraoui.
Les ressources naturelles ciblées par l’exploitation sont notamment le pétrole, les phosphates , les poissons et les produits agricoles.
C’est un crime international pour un occupant d’exploiter et de tirer profit des ressources naturelles d’un territoire occupé. Le droit souverain exclusif du peuple sahraoui à bénéficier des ressources naturelles du Sahara Occidental doit être respecté.
La surveillance de l’exploitation des ressources naturelles doit être inclue dans le mandat de la MINURSO lors de son renouvellement à la fin de ce mois. L’exploitation des ressources naturelles du Sahara Occidental représente actuellement un obstacle à la résolution du conflit et une préoccupation relevant des droits de l’homme.
Introduction
L’exploitation et l’exportation des ressources naturelles du Sahara Occidental occupé ont des conséquences graves pour la paix dans le territoire et pour l’avenir de ses habitants, le peuple sahraoui.
La vente à l’exportation des ressources naturelles, en particulier la pêche de l’océan Atlantique et les roches de phosphate d’une mine à l’intérieur des terres, fournit des revenus au Maroc en tant qu’occupant. Aucune des recettes n’est directement reçue par le peuple sahraoui, les habitants autochtones du Sahara Occidental.
Toutes les activités sur des ressources dans le territoire servent d’autre part de prétexte pour justifier ce qui est une occupation illégale, et la poursuite de graves violations des droits de l’Homme. Cela inclut les industries sur les ressources utilisées pour l’emploi des ressortissants marocains installés illégalement sur le territoire.
L’utilisation des ressources naturelles du Sahara Occidental sert également à renforcer le contrôle du Maroc sur le territoire en lui permettant de bâtir des infrastructures.
Aspects juridiques
Il y a deux raisons qui font que l’utilisation des ressources naturelles du Sahara Occidental occupé est illégale. La première est que, dans les circonstances de l’occupation et de ce qui a été un conflit international – démontré par l’accord 1990 /91 de cessez-le feu et de référendum pour le peuple sahraoui négocié par les Nations Unies – c’est un crime d’exploiter et de tirer des revenus des ressources extraites du territoire. L’énoncé est clair dans la Quatrième Convention de Genève de 1949, et cela relève d’une interdiction selon le Statut de Rome de 1998 de la Cour Pénale Internationale, qualifié de crime de guerre de pillage. C’est actuellement tout à fait le cas du Sahara Occidental.
Le deuxième motif qui interdit la prise des ressources du Sahara Occidental occupé -également bien établi en droit et universellement contraignant pour tous les peuples et Etats-, c’est que le peuple sahraoui, le seul peuple originaire du Sahara Occidental, détient les droit et contrôle souverains exclusifs sur ses ressources naturelles, en attendant l’exercice de son droit à l’autodétermination. L’ancien juriste principal des Nations Unies, Hans Corell (Secrétaire Général adjoint aux affaires juridiques) l’a souligné dans un avis rendu au Conseil de Sécurité, traitant spécifiquement de l’exploration et de l’exploitation des ressources sahraouies :
« si des activités de prospection et d’exploitation devaient être entreprises au mépris des intérêts et de la volonté du peuple du Sahara Occidental, elles contreviendraient aux principes de droit international applicables aux activités touchant aux ressources minérales des territoires non autonomes » (29 janvier 2002)
Se conformer à la légalité juridique exige donc deux conditions. Tout d’abord, l’exploitation des ressources doit profiter au peuple sahraoui. Un de ses corollaires est que l’activité ne doit pas bénéficier au Maroc comme occupant, ni aux personnes à qui il a permis de s’installer illégalement au Sahara Occidental. Exigence supplémentaire, une utilisation des ressources qui répondrait aux besoins des sahraouis et servait à développer les conditions sociales et économiques du peuple sahraoui, ne doit pas entraver, ni être utilisé pour lui refuser, son droit à l’autodétermination.
La deuxième exigence est que le peuple sahraoui doit de façon significative consentir à l’exploitation de ses ressources naturelles. Bien que cela soit plus ou moins impossible dans les circonstances actuelles d’une occupation qui démontre de graves violations des droits de l’Homme, le peuple sahraoui, par les chefs de son gouvernement et à travers un grand nombre d’organisations de la société civile indépendantes a déclaré qu’il rejette tout consentement ou approbation à l’utilisation de ses ressources. Dans tous les cas, une importante partie du peuple sahraoui n’est pas en mesure de tirer des avantages des ressources de son territoire car elle vit en exil dans des camps de réfugiés.
Deux autres éléments doivent être rappelés. Tout d’abord, la Cour Internationale de Justice, dans son avis consultatif de 1975 sur le Sahara Occidental, a conclu (après un examen de preuves considérables) que le Maroc ne peut émettre de revendication territoriale ni n’a de droit sur le territoire, que le peuple sahraoui bénéficie d’un droit clair à l’autodétermination, et que son peuple est sous domination coloniale.
Deuxièmement, l’utilisation continue des ressources du Sahara Occidental à la fois confisque au peuple sahraoui son avenir économique (tout en contribuant à l’occupation de son territoire) et sabote la capacité des Nations Unies à mettre en application ses accords 1990/91 d’assurer au peuple Sahraoui l’exercice de son autodétermination. C’est pourquoi la mission de l’ONU au Sahara Occidental, la MINURSO, doit être pourvue du mandat de surveiller et d’administrer les ressources naturelles dans tout ce qui s’y rapporte.
Les ressources
Le pétrole
L’intention annoncée du Maroc d’effectuer un forage pétrolier au mépris de l’avis juridique de l’ONU 2002, cité ci-dessus est potentiellement l’actualité la plus inquiétante de cette dernière année dans le conflit du Sahara Occidental.
Le forage prévu aux alentours d’octobre 2014 sera effectué par la compagnie pétrolière américaine Kosmos Energy[i]. L’opération a pour partenaire la compagnie de forage Atwood Oceanics par le biais du navire de forage mobile, le Atwood Phénix.
L’opération, dans les eaux côtières au large du Cap Boujdour, aura lieu dans l’un des nombreux blocs que le gouvernement marocain explore. La compagnie pétrolière française le groupe Total SA a annoncé en janvier 2014 son intention de procéder à de l’exploitation pétrolière dans les eaux côtières du territoire. [ii] Le Maroc a également attribué un certain nombre d’autres licences, offshore and onshore, mais aucune compagnie n’est aussi avancée que sur le bloc de Kosmos Energy. [iii]
Les Phosphates
La plus grande part des revenus financiers de l’utilisation des ressources du Sahara Occidental occupé reçu par le gouvernement marocain vient de l’exportation des minerais de phosphate. La production est assurée par une filiale de la compagnie nationale marocaine des phosphates l’OCP. Selon les estimations faites par Western Sahara Resource Watch, l’OCP a produit environ 2,2 millions de tonnes de phosphates l’an dernier, pour une valeur d’environ 300 millions de dollars US. Cela équivaut à environ 10 fois ce que les réfugiés du Sahara Occidental reçoivent de l’aide humanitaire multilatérale chaque année. Près de la moitié de la production de 2013 est revenue à trois entreprises : PotashCorp (US/Canada), Lifosa (Lituanie/Russie) et Innophos ( Mexique/Etats-Unis).
La pêche
Tout au long de 2013, les chalutiers russes ont pêché au large du Sahara Occidental. Cette activité viole l’accord Russo-marocain, qui stipule que la pêche n’aura lieu que dans la ZEE du Maroc. Les eaux du Sahara Occidental n’ont jamais été revendiquées comme faisant partie de sa ZEE par le Maroc, et ne pourraient pas l’être selon le droit international.
En novembre, les images de pratique de pêche absolument non durables ont été révélées. Un navire, qui serait utilisé par le fils de l’un des généraux marocains qui contrôle les permis de pêche, a déclaré avoir mis au rebut 1000 tonnes de sardines au cours de l’année. [iv] Ces pratiques ont également été dénoncées dans un rapport publié par Greenpeace.[v]
Le Parlement Européen et le Conseil des ministres ont approuvé en 2013 un accord de partenariat avec le Maroc pour pêcher dans les eaux du Sahara Occidental. Plusieurs Etats ont voté contre l’accord, soulignant qu’il violerait le droit international. Hans Corell a déclaré au cours des dernières années, que l’UE par une telle pratique viole le droit international et sabote les efforts de paix de l’ONU. Le nouvel accord est le premier accord de partenariat de pêche de l’Union Européenne depuis 2010 qui ne dispose pas d’un article propre sur les droits de l’Homme[vi]. Toutes les organisations sahraouies de la société civile se sont opposées à l’accord, mais leurs avis n’ont pas été écoutés. De nombreux Sahraouis ont été blessés par la police marocaine lors de manifestations sahraouies contre les projets de l’UE et au Maroc. [vii]
L’UE ni la Russie n’ont demandé son consentement au peuple du Sahara Occidental avant de conclure ces accords.
La production agricole
Il y a aujourd’hui 11 plantations agricoles dans la proximité de Dakhla qui produisent principalement pour le marché européen. [viii] Toutes les fermes sont la propriété de conglomérats marocains, de compagnies multinationales françaises ou de compagnies appartenant à la famille royale marocaine. Aucune entreprise n’est détenue par des Sahraouis, ni même à petite échelle par de colons marocains dans le territoire. Les fermes produisent surtout des tomates-cerises, mais aussi des melons et autres légumes, le tout est irrigué par de l’eau fossile non renouvelable. Presque tous les travailleurs sont signalés comme étant marocains, installés dans de nouveaux ensembles immobiliers sur les terres occupées.
Conclusion
La surveillance de l’exploitation des ressources naturelles doit être inclue dans le mandat de la MINURSO lors de son renouvellement à la fin de ce mois. L’exploitation des ressources naturelles du Sahara Occidental représente actuellement un obstacle à la résolution du conflit et une préoccupation relevant des droits de l’homme.
La loi internationale des droits de l’Homme et de la Charte des Nations Unies investissent clairement les peuples des territoires non autonomes de la souveraineté permanente sur leurs ressources naturelles.
[i] Reuters, 13.01.2014, Simmering Saharan conflict stirred by offshore oil search, http://www.reuters.com/article/2014/01/13/westernsahara-oil-idUSL6N0KN1I120140113
Kosmos Energy, Morocco – oil and gas exploration, http://www.kosmosenergy.com/operations-morocco.php
[ii] WSRW.org, Total confirme : renouvellement pour 1 an du sale deal au Sahara occupé, 03.02.2014, http://wsrw.org/a111x2836
[iii] WSRW.org, 09.09.2013, Nouveau rapport : Total SO au Sahara Occidental occupé. “Injustice Totale” http://wsrw.org/a106x2651
[iv] WSRW.org, Sahraouis, voila ce que l’on fait de vos poissons, 19.11.2013, http://wsrw.org/a111x2721
[v] Greenpeace, Exporting Exploitation: How retired EU fishing vessels are devastating West African fish stocks and undermining the rights of local people, 26.11.2013, http://www.greenpeace.org/sweden/se/rapporter-och-dokument/exporting-exploitation/
[vi] WSRW.org, La commission ne suite pas les instructions du conseil et du parlement sur les droits de l’Homme, 01.10.2013, http://wsrw.org/a111x2668
[vii] AP, 10.12.2013, Western Saharans protest EU-Morocco fishing accord, http://news.yahoo.com/western-saharans-protest-eu-morocco-fishing-accord-204809914–finance.html
[viii] WSRW.org, Rapport: Etiquette et responsabilité, 17.06.2012, http://www.wsrw.org/files/dated/2012-07-03/rapport_tomat_juin12_vf..pdf
PLUS d’INFOS RDV http://wsaforum.org
http://solidmar.blogspot.be/2014/04/un-futur-vole.html
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