Honnêteté intellectuelle

Par Mohamed Abdoun
Le rapport rendu public hier, par l’ONG Human Rignts Watch (HRW), concernant les camps de réfugiés sahraouis, a su se confiner dans les limites de la correction et de l’honnêteté intellectuelle. Même si on imagine aisément que les agents et autres diplomates du Makhzen ont dû déployer les grands moyens pour induire en erreur les enquêteurs de cette ONG, ces derniers donnent l’air, grosso-modo, d’avoir su demeurer objectifs et professionnels. Il ressort ainsi de ce rapport des faits avérés et imparables. Parmi eux, le fait que les réfugiés sahraouis sont libres de circuler, de quitter les camps et de s’exprimer librement, quitte à critiquer ouvertement le Front Polisario. Les enquêteurs ont également été autorisés à agir à leur guise. Ils ont ainsi pu interroger dans le privé, sans la moindre contrainte, autant de réfugiés et de travailleurs humanitaires de leurs choix. Il n’existe sans doute pas de meilleure preuve de la bonne foi du Front Polisario. Celui-ci, ne l’oublions pas, se trouve toujours en conflit ouvert, pour ne pas dire en guerre, avec le Maroc. Cela implique forcément quelques contraintes et restrictions sur les libertés. Même les pays les plus développés et les plus démocratiques du monde ont été amenés (jusqu’au jour d’aujourd’hui, soit dit en passant) et ont été forcés d’en faire autant dans le cadre de la lutte mondiale contre le terrorisme.
Or, les pratiques marocaines y ressemblent beaucoup. Les sahraouis vivants dans les territoires occupés sont privés de tous leurs droits. On compte des centaines de détenus d’opinion. Les cas de tortures sont légions. Il n’y a pas longtemps de cela, Rabat recourait même aux exécutions sommaires. Des charniers existent un peu partout, à commencer par la tristement célèbre Carcel Negra (prison noire). 
Est-ce le cas dans les camps de réfugiés ? Le rapport de HRW évoque certains cas. Mais uniquement par ouï-dire. En revanche, pas un cas avéré n’est mis sur le tapis. Pas une seule preuve n’est avancée. Le rapport représente une grande victoire diplomatique pour le Polisario même si la presse marocaine, et même certaines plumes françaises grassement rétribués par Mohamed VI, vont entamer une féroce campagne en ne se focalisant que sur ces rares passages où il est fait mention de  » dépassements  » sans la moindre preuve. Une riposte à la mesure de la campagne qui se profile doit donc être initiée afin de pousser l’ONU à envisager enfin des sanctions contre le Maroc afin qu’il accepte enfin la tenue d’un référendum d’autodétermination du peuple sahraoui et que la souffrance de ce dernier touche enfin à son épilogue.
Le rapport, au reste, ne laisse pas de rappeler que le cessez-le-feu entre les deux parties en conflit n’avait été conclu que contre le ferme engagement marocain, pris du vivant de Hassan II, pour la tenue d’un référendum d’autodétermination. Sa reculade ne représente rien moins qu’une grave violation du droit international.
Il est vrai qu’il est soutenu en cela par la France, membre permanent du Conseil de sécurité, et jouissant donc du droit de Veto. Paris doit cesser ce soutien car il fait d’elle la complice des graves crimes marocains toujours commis dans les territoires occupés. Mais à huis-clos. Rabat, qui a trop de choses sales à cacher, ne permettrait jamais à une ONG, ou même à un défenseur des droits humains, de se déplacer librement et d’enquêter souverainement dans les territoires occupés. 
M. A.

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