L’ONG américaine, Humain Rights Watch (HRW), désavoue les autorités marocaines sur la situation des réfugiés sahraouis dans les camps de Tindouf. Dans un rapport présenté, hier à Alger, par le directeur adjoint du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, Eric Goldstein, l’ONG affi rme que les allégations marocaines, selon lesquelles les réfugiés sahraouis sont séquestrés par le Front Polisario et les autorités algériennes, n’ont aucun fondement.
L’enquête menée par cette dernière a démontré que les « réfugiés du conflit au Sahara occidental, qui vivent depuis quatre décennies dans des camps situés dans le désert algérien, semblent être généralement en mesure de quitter ces camps s’ils le souhaitent », a indiqué Eric Goldstein lors d’une conférence de presse animée au centre commercial du Hamma. Il a fait savoir que toutes les person- nes rencontrées dans les camps nient que leur liberté de mouvement est suspendue. « Les personnes que nous avons rencontrées nous ont indiqué qu’elles voyagent librement à l’intérieur de l’Algérie, en Mauritanie et même à l’intérieur des territoires sahraouis », a-t-il indiqué. Les mesures de contrôle imposées par l’Algérie aux réfugiés sont loin d’être des restrictions de mouvement.
« Après l’enlèvement de trois travailleurs humanitaires, des mesures sécuritaires ont été prises pour contrôler le mouvement, mais c’est loin d’être une séquestration », a-t-il tenu à préciser. Sur ce point, il dit comprendre la décision de l’Algérie de renforcer les contrôles sécuritaires dans cette région qui connaît une recrudescence de la contrebande. En outre, il dit que la liberté d’ex- pression et d’opinion est globalement respectée dans les camps de réfugiés. Ce qui désavoue encore une fois les thèses marocaines qui présentent le Front Polisario et l’Algérie comme deux dictatures qui interdisent toute expression libre à l’intérieur des camps de réfugiés. « Il existe des cas d’abus dans les camps, mais il y a eu aussi des exagérations de la part de certaines parties », a-t-il déclaré. Il note dans ce cadre que des manifestations et des sit-in ont été tolérés au sein de ces camps. Evoquant l’Algérie, le conférencier a souligné que l’Algérie accorde l’accès aux écoles, aux universités et aux hôpitaux aux réfugiés sahraouis.
Toutefois, il a mis l’accent sur des in- suffisances et certains dépassements qui n’auraient pas lieu d’être. Il s’agit d’abord de la compétence des tribunaux militaires créés par l’Etat sahraoui. « Depuis 2012, les tribunaux militaires sont rendus compétents de juger des civils. C’est une violation des droits de l’homme. Nous demandons la révision de cette disposition de sorte que des civils ne soient plus traduits devant des tribunaux militaires », a-t-il fait remarquer. Il a également estimé nécessaire de créer un mécanisme de protection des droits de l’homme à l’intérieur des camps. Une demande qui a eu un écho favorable auprès des responsables du Polisario, selon l’orateur. L’autre point peu confortable signalé est le cas d’esclavagisme isolé. « Nous avons appris que des familles au sein des camps emploient chez elles des per- sonnes en tant qu’esclaves.
Ce sont des cas isolés, mais ils existent », a-t- il averti. Comme solution, il exhorte les autorités algériennes à prendre les dispositions qu’il faut pour éradi- quer cette pratique abolie partout dans le monde. « Les camps de réfu- giés se trouvent en Algérie, du coup, les autorités de ce pays doivent veiller au respect des lois sur leur ter- ritoire », a-t-il souligné. S’agissant de la mission de l’ONG dans les territoires occupés, Eric Goldstein indiquera que les autorités marocaines ne leur imposent pas de visas pour rentrer dans les territoires occupés, mais leurs missions se font sous la surveillance serrée de la poli- ce marocaine.
« Nous sommes gênés par le fait que nous effectuons nos missions sous la surveillance de la police. On nous a même empêchés de nous rendre à une manifestation or- ganisée dans la ville de Laâyoun », a-t-il déploré. Au fi nal, il a présenté une série de recommandations. Il s’agit d’abord de l’élargissement de la mission des Nations unies à la surveillance des droits de l’homme, la suppression des tribunaux militaires par le Poli- sario et le Maroc, la création d’un mécanisme de protection des droits de l’homme dans les camps de réfu- giés, permettre aux ONG de défense des droits de l’homme de se rendre dans ces camps sans restriction et lutter contre toutes les formes d’es- clavagisme.
Younès Saadi
RepotersDZ, 19 oct 2014
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