Par Kamel Amghar
Les rapports entre l’Algérie et le Maroc évoluent toujours au gré des humeurs royales. Soufflant le chaud et le froid, le royaume appelle, officiellement, à la réouverture des frontières terrestres entre les pays frères et à la réactivation de l’Union du Maghreb arabe (UMA), en agissant, officieusement, dans le sens contraire. Car, à chaque fois, de curieux incidents viennent contredire cette supposée volonté concernant la normalisation des relations bilatérales. À lire ce qui s’écrit ces jours-ci à ce propos, on se croirait sur la ligne de démarcation intercoréenne. Les autorités marocaines accusent l’armée algérienne de tirer à balles réelles sur des sujets de sa majesté. L’ambassadeur d’Algérie à Rabat a été convoqué pour s’en expliquer ! Les médias locaux, dans un boucan indescriptible, crient à l’invasion !
Exerçant le principe de la réciprocité, le ministère des Affaires étrangères a auditionné, à son tour, le chargé d’affaires du royaume du Maroc à Alger, en soulignant que des gardes-frontières, harcelés à coups de pierres par des contrebandiers, avaient simplement tiré en l’air deux sommations pour éloigner les assaillants. En vérité, la situation à la frontière Ouest est beaucoup moins tendue qu’on le laisse croire. La consolidation du dispositif de lutte contre le trafic de drogue et la contrebande a, semble-t-il, mis à rude épreuve les réseaux de trafiquants de part et d’autre de la frontière.
Les provocations récurrentes à l’endroit des éléments du GGF en sont la preuve. Seulement, de l’autre côté, ces filières, qui échangent des tonnes de kif marocain contre des hectolitres de carburant algérien subventionné, n’y sont pas inquiétées du tout. En Algérie, on croit, intimement, qu’elles agissent au grand jour et qu’elles sont même encouragées à persévérer dans ce «commerce» profitable au royaume de Mohamed VI. Les actes de provocation de ce genre comprennent aussi des atteintes diverses à l’intégrité des représentations diplomatiques algériennes au Maroc et aux droits les plus élémentaires des ressortissants algériens.
Le 1er novembre 2013, date du 59e anniversaire de la révolution algérienne, un sujet de sa majesté, en violation de l’enceinte consulaire de Casablanca, avait délibérément profané le drapeau algérien. L’auteur du forfait n’a pas été ensuite inquiété. Pour une simple chamaillerie de gamins, un jeune sportif algérien, Islam Khoualed (14 ans), a purgé une peine d’un an de prison ferme. Voilà à quoi ressemble la justice marocaine ! La construction de l’espace maghrébin, en suspens depuis 1989, nécessite beaucoup d’efforts sincères et de travail bien fait. Le Maroc en sait à ce sujet plus que tous ses partenaires.
La sécurisation des frontières, la lutte contre le trafic de drogue et d’armes, la répression des réseaux de contrebande, et le règlement de divers contentieux entre les pays maghrébins sont autant de préalables et d’actes à accomplir avant de déboucher naturellement sur cette intégration tant souhaitée. À tout cela on doit rajouter le règlement définitif de la question du Sahara occidental dans le cadre des résolutions de l’ONU qui préconisent clairement l’autodétermination. Alors, et alors seulement, les économies maghrébines, et celle du Maroc en particulier, pourraient prospérer et gagner beaucoup plus que ce «maraudage» de fûts d’essence et gasoil.
K. A
La Tribune, 21/10/2014
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