Le Maroc s’entête à organiser dans la ville occupée le Forum de Crans Montana: Polisario-Maroc, la «bataille» de Dakhla

L’affrontement diplomatique que se livrent Sahraouis et Marocains à l’Organisation des Nations unies et sur les grandes tribunes internationales autour du Sahara occidental a aujourd’hui pour théâtre la ville occupée de Dakhla, dans laquelle Rabat a l’intention d’y tenir le forum économique de Crans Montana. 
Un forum qui fait de moins en moins l’unanimité auprès de la communauté internationale, mais à la veille de sa tenue, à partir du 12 mars, les autorités marocaines tentent de le « vendre » aux délégations étrangères encore hésitantes à y prendre part, malgré les appels au boycott lancés tant par le Front Polisario que des organisations internationales, y compris sous bannière onusienne. 
Le Maroc recourt à l’aura du forum, traditionnellement abrité par le canton touristique suisse et qui accueille de hauts dirigeants, des chefs d’Etat et de gouvernement, des ministres, des organisations internationales et régionales, parlementaires, des institutions financières et organisations patronales, ainsi que des acteurs de la société civile dans le cadre de conférences thématiques. Il s’investit dans une stratégie du « fait accompli » qu’il impose à la communauté internationale pour faire valoir et admettre sa « souveraineté » sur une ville occupée de même qu’il fait concourir ses entreprises qui ont quasi entièrement financé l’événement. 
L’affrontement est également animé par les délégations participantes qui considèrent le choix de Dakhla comme le « meilleur choix » pour y tenir le forum. C’est du moins l’impression de la délégation du think tank italien Il comunicatore italiano dont le président, Pier Dominico Garrone, encense le Maroc auquel il attribue « une histoire millénaire et du dialogue qui sont les principaux traits de ce pays ». Il est relayé par le président de l’Institut italien pour l’Asie et la Méditerranée (Isiamed) et ancien sénateur, Gian Guido Folloni, pour lequel le Maroc est un « modèle ». Pour les Marocains, la tenue du Forum de Crans Montana à Dakhla reflète la vision de Mohamed VI faisant « des provinces du sud du royaume une plate-forme pour un décollage socio-économique et pour la coopération sud-sud », à en croire Abdelfettah Fathi, chercheur des questions du Sahara et des affaires maghrébines, qui en profite pour écorcher l’Algérie dont « les organisateurs du forum ont réduit à néant ses allégations et celles du Polisario qui prétendaient que cette manifestation ne serait pas la bienvenue pour la population locale ». 
L’Algérie a effectivement dénoncé la tenue du forum dans une ville occupée et a même mis à contribution sa diplomatie pour l’avorter, mais sur ce terrain, ce sont les Britanniques qui lui ont emboîté le pas en décidant de faire appel à la justice afin d’interdire l’importation « illégale » de produits sahraouis au Royaume-Uni. Le cabinet d’avocats britannique, Leigh Day, qui représente l’organisation Western Sahara Compaign (WSC), a menacé le gouvernement d’agir en justice contre le ministère de l’Environnement, de l’Alimentation et des Affaires rurales (DEFRA) et l’administration fiscale et douanière (HMRC) sur l’importation illégale de produits originaires du Sahara occidental, précise la même source, citant un communiqué de WSC. Ils ont rappelé que la souveraineté du Maroc « ne s’étend pas au territoire du Sahara occidental ou la mer territoriale adjacente », ajoutant que « les biens et les produits fabriqués au Sahara occidental ne devraient pas être traités comme étant originaires du Maroc aux fins de tarifs préférentiels ou autres avantages conférés par l’accord d’association ». 
Si le Maroc a réussi à trouver chez certains de ses partenaires régionaux un « cautionnement » à sa politique expansionniste, il n’en demeure pas moins que des pays influents ainsi que des organisations régionales et internationales boycotteront le Forum de Crans Montana. L’ambassadeur de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) à Alger, Ibrahim Ghali, l’a assuré hier. Il a révélé que « des correspondances de plusieurs pays influents, d’organisations régionales et internationales ainsi que de personnalités actives faisant part de leur boycott officiel du forum de Crans Montana » ont été reçues par la RASD, citant « la Suisse où se trouve le siège du forum de Crans Montana, la Grande-Bretagne et bien d’autres pays d’Afrique, d’Europe, d’Amérique et d’Asie ». L’ambassadeur sahraoui a également indiqué que « les campagnes appelant au boycott du forum se poursuivent », ce qui dénote, a-t-il dit, « une large solidarité internationale avec la question sahraouie conformément aux principes de la légalité internationale et au droit du peuple sahraoui à l’autodétermination ».

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