par R. N.
Les services secrets israéliens auraient joué un rôle dans l’affaire de l’assassinat de l’opposant marocain, Mehdi Ben Barka. Dans son édition du 23 mars, le quotidien français Le Monde’ attribue au Mossad un rôle dans l’affaire Ben Barka, enlevé en plein Paris, le 29 octobre 1965, puis assassiné.
Dans un entretien au journal français, Ronen Bergman, «célèbre journaliste d’investigation en Israël, spécialisé dans les questions militaires et les services de renseignement», a révélé que le «Mossad ne souhaitait pas être impliqué» mais voulait aussi «satisfaire» les services secrets marocains. «Le Mossad a réussi à créer des intérêts communs avec le roi Hassan II et ses services», a-t-il déclaré. «Cela a commencé en convainquant le roi de laisser les juifs de son pays émigrer vers Israël. Puis Israël a fourni une aide militaire et en matière de renseignement. En échange, on a obtenu un accès à des informations par le Maroc». L’échange concernait la position des pays arabes, lors du «sommet arabe, en septembre 1965», lors duquel «le Mossad a obtenu la possibilité d’observer». «Les Marocains ont fourni au Mossad des documents décrivant les délibérations», affirme Ronen Bergman.
«Trois jours après le sommet, les Marocains ont réclamé le paiement pour ces informations : il s’agissait d’aider à localiser et à tuer Ben Barka», ajoute le journaliste israélien qui fait état de travaux d’historiens, citant de «nombreux témoignages auprès des services marocains et israéliens». «Les documents rapportant les entretiens entre le directeur du Mossad, Meïr Amit, et le Premier ministre, Lévi Eshkol, suggèrent clairement qu’Amit avait appris des Marocains qu’ils voulaient le tuer». Le Mossad s’est donc vu demander «à deux reprises» de fournir aux Marocains «des poisons différents».
Mais, dit-il, citant Amit, que «ce ne sont pas des mains israéliennes qui ont serré le cou, le Mossad n’était pas présent, au moment des faits, et n’a pas autorisé sa mise à mort». Le Mossad a, selon lui, fourni «de faux documents pour louer des voitures» et a donné «des passeports aux Marocains et aux mercenaires français pour pouvoir prendre, rapidement, la fuite, après les faits». «Il est clair, aussi, que le Mossad a fourni un appartement, une cache aux Marocains, mais on n’est pas certain que ce fut celui où Ben Barka a été conduit», dit-il.
«Quelques minutes», après la mort de Ben Barka, «Ahmed Dlimi [adjoint du ministre de l’Intérieur, Mohammed Oufkir] a appelé le Mossad de l’appartement, en disant : «Je ne voulais pas, il est mort», ajoute le journaliste israélien.
Selon lui, c’est le Mossad qui «s’est chargé d’évacuer le corps». «Les agents connaissaient une forêt près de Paris, très prisée pour les pique-niques familiaux. Le service a eu l’idée de dissoudre le corps avant de l’enterrer avec de l’acide, à base de produits chimiques achetés dans plusieurs pharmacies. Cette nuit-là, il a plu. La pluie a accéléré le processus. C’est l’aspect le plus visuel, le plus dramatique de l’implication du Mossad», affirme-t-il.
Il poursuit : «le service était très réticent à l’idée d’être impliqué dans l’opération. Au début des années 1960, Ben Barka avait été en contact avec les Israéliens, notamment les services, qui n’avaient aucune hostilité contre lui. Mais ils avaient une énorme dette envers les Marocains».
LE QUOTIDIEN D’ORAN, 25/03/2015
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