L’auteur, Maître Taquiollah Eidda |
par Maître Takioullah Eidda
Suite à la décision historique rendue le 10 décembre 2015 par la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE), déclarant illégale l’exploitation des ressources naturelles au Sahara Occidental, l’Institut Amadeus de Rabat, sous la plume de son président, Brahim Fassi Fihri, reproche au Conseil et à la Commission de l’Union Européenne, parties défenderesses dans ce dossier, de na pas avoir apporté «une argumentation politique, totalement légitimée par la réalité sur le terrain et la crédibilité de la démarche du Maroc au Sahara».
Pour avoir été au fait de ce dossier, il est permis d’affirmer que le Maroc n’a ménagé aucun effort afin d’influencer et politiser les procédures judiciaires devant le Tribunal. Heureusement, la Cour s’était cramponnée à son devoir et à son obligation d’impartialité, ignorant par le fait même l’ensemble des multiples tractations politiques et diplomatiques pour se consacrer à deux questions fondamentales au litige: une de forme et une de fond.
Question de forme:
Dès le début des procédures, les parties défenderesses ont soulevé l’irrecevabilité du recours selon le principe du locus-standi, alléguant que le requérant, le F. Polisario, ne possède ni l’intérêt ni la capacité juridique pour ester en justice au nom du peuple sahraoui. Balayant cet argument du revers de la main, la Cour a reconnu, pour la première fois dans l’histoire juridique internationale, que ce mouvement de libération jouit du statut de «personne morale» ayant un intérêt direct dans le débat qui lui permet d’ester en justice. En d’autres termes, la Cour lui a conféré un statut de «gardien» qui tire sa légitimité dans le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.
Question de fond :
En ce qui concerne le fond, même si le Maroc considère le Sahara Occidental partie intégrante de son territoire, ou «puissance administrante », la Cour a établi clairement et sans équivoque que le Maroc est une puissance occupante de ce territoire. Territoire non-autonome encore soumis à la résolution 1514 de l’ONU. Et l’occupation de ce territoire n’est reconnue, ni même avalisée, par aucune instance internationale, y compris l’Assemblée générale de l’ONU. À ce titre, le Maroc n’a ni la capacité juridique ni la légitimité internationale de transiger sur/avec les ressources de ce territoire ni même sur tous ce qui est produit, cultivé ou transformé, à l’intérieur de ses limites géographiques. Si bien que toute transaction, entente ou convention passée à cet égard avec des tiers est nulle et ultra-vires!
Conclusion:
Tel qu’il appert de ces ratio-decidendi, il s’agit là d’une décision purement juridique, à la fine pointe du droit international, rendue par une instance judiciaire hautement impartiale, contre laquelle les tergiversations politiques et diplomatiques n’y peuvent absolument rien.
Maître Takioullah Eidda, avocat
Québec, Canada
quebec171[at]gmail.com
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