Les réfugiés sahraouis vivent depuis 1975 dans des camps au milieu du
désert. Leurs enfants y naissent et y grandissent, sans rien connaître
d’autre qu’une vie de réfugiés. Bien qu’une des crises les plus longues
du monde, elle reste l’une des plus méconnues. Comment survivre dans
un désert loin de tout ? Et continuer à espérer une solution politique
après un statu quo de 4 décennies ? Allez à la rencontre de ces femmes
et de ces hommes au fil des pages de ce dossier.
Un conflit tombé dans l’oubli
La crise des réfugiés du Sahara occidental
est l’une des plus longues de l’histoire, et
l’une des plus méconnues. Cette ancienne
colonie espagnole n’a toujours pas de
statut définitif. Depuis 40 ans, les
Sahraouis attendent une solution.
Colonisé en 1884 par l’Espagne, le Sahara occidental
est un territoire situé au sud du Maroc (cf
carte), riche en eaux poissonneuses et en gisements
de phosphate. Originellement peuplé de
nomades, qui élevaient entre autres des chameaux,
leurs routes suivaient la pluie et les points d’eau.
En 1965, dans le cadre d’un mouvement de décolonisation
au niveau international, une résolution
de l’ONU mentionne le Sahara occidental dans la
liste des régions à décoloniser. Dans la colonie, des
mouvements identitaires autochtones commencent à
revendiquer l’indépendance des Sahraouis, en s’unissant
sous la bannière du Front Polisario, en 1973. Or
le Maroc et la Mauritanie revendiquent eux aussi la
souveraineté sur le Sahara occidental. Des revendications
que la communauté internationale ne reconnait
pas, suite à un avis consultatif de la Cour de justice
internationale de 1975. Le 6 novembre de la même
année, 350.000 civils marocains se mettent en route
pour le Sahara occidental, c’est « la Marche verte ».
Camps de réfugiés en Algérie
Cet évènement précipite le retrait espagnol et
marque le début d’un conflit ouvert entre le Maroc,
la Mauritanie et le Front Polisario, qui autoproclame
peu après la « République Arabe Sahraouie
Démocratique » (RASD). Pris entre deux feux, des
civils sahraouis commencent à fuir de l’autre côté
de la frontière algérienne et les premiers camps de
réfugiés y sont établis.
En 1979, la Mauritanie se retire du conflit, qui se
poursuit entre le Maroc et le Front Polisario. Le
conflit s’enlise en 1981 quand le Maroc entreprend
la construction d’un mur de sable de près de 2.000
km (bordé de champs de mines et de postes de
contrôle), qui divise encore à ce jour le territoire
du Sahara occidental en deux parties (cf carte cidessus).
En 1991, un plan de paix est enfin conclu
par l’ONU, prévoyant un cessez-le-feu garanti par des
casques bleus et l’organisation d’un référendum sur
l’autodétermination du peuple sahraoui.
Des modalités qui bloquent
Si le cessez-le-feu est depuis lors respecté, le référendum,
lui, n’a toujours pas eu lieu. Et pour cause :
si les deux camps sont bien d’accord sur la nécessité
d’organiser un référendum, ils ne sont pas d’accord
sur des modalités essentielles de son organisation,
telles que son objectif. En effet, pour le Maroc, le
territoire du Sahara occidental fait partie intégrante
du territoire marocain, mais il est prêt à lui accorder
une autonomie avancée. Le Maroc voit le référendum
comme une manière de confirmer cet état des choses.
Le Front Polisario, lui, considère que le statut du territoire
du Sahara occidental reste encore à définir, et
il voit dans le référendum le moyen de le faire, en y
présentant plusieurs options : indépendance, autonomie
élargie, appartenance au Maroc…
En cours de décolonisation
A l’heure actuelle, le territoire reste donc un « Territoire
non autonome en cours de décolonisation »
selon l’ONU. Une partie de la population sahraouie
vit dans la zone occidentale du Territoire, sous
Un conflit tombé dans l’oubli
Galuha Bahia, 64 ans, fait
partie des premiers
réfugiés, pris entre deux
feux, qui ont traversé la
frontière algérienne pour
fuir les violences. Elle se
rappelle bien du début de la guerre et raconte que
tout était allé très vite. « Je me souviens que
nous avons tout abandonné, jusqu’au lait que
nous avions. » Les troupeaux de chameaux
massacrés restent ancrés dans sa mémoire.
« Nous, nomades, étions dépendants de ces
troupeaux. Nous n’avions quasiment plus rien.
Fuir était l’unique solution. » Galuha se retrouve
sur les routes, seule avec ses trois enfants.
« Nous étions déjà loin de la ville, et pourtant
nous sentions l’impact des bombes comme lors
d’un tremblement de terre. C’était terrifiant. » Elle
raconte les mouvements de foule, la majorité des
personnes qui fuyaient à pied, sans rien, sans se
retourner. « Arrivée au camp de réfugiés, ma famille
n’avait absolument rien. Il fallait repartir de zéro. »
« Des bombes comme un tremblement de terre »
contrôle du Maroc, une autre dans la zone orientale,
sous contrôle du Front Polisario. Enfin, une troisième
et grande partie de la population sahraouie vit en dehors
du Territoire, dans des camps de réfugiés situés
au sud-ouest de l’Algérie, où ils attendent de pouvoir
un jour rentrer chez eux, avec leurs enfants et leurs
petits-enfants. Oxfam apporte de l’aide humanitaire
dans ces camps de réfugiés et relaye leurs voix au
niveau international depuis les années septante.
Aujourd’hui, la situation des réfugiés sahraouis est
considérée comme une crise oubliée : une crise humanitaire
grave et de longue durée où les populations
concernées reçoivent trop peu d’aide internationale,
où il y a un manque de volonté politique de résoudre
la crise et un faible intérêt médiatique au niveau
international.
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