par Moncef Wafi
Comme réponse à son sévère recadrage par le SG de l’ONU après les attaques frontales dont il a été l’objet au lendemain de sa première visite dans la région pour relancer les pourparlers entre Le Maroc et le Front Polisario, Rabat a expulsé, ce week-end, 83 fonctionnaires civils de la Minurso présents à Layoune.
Le Maroc a décidé en outre de supprimer une contribution financière de trois millions de dollars à la mission onusienne. Saisi de l’affaire jeudi, le Conseil de sécurité de l’ONU, sous l’impulsion des partisans de la solution marocaine, a préféré laisser à chacun de ses membres le soin de traiter individuellement avec le Maroc pour tenter d’apaiser les esprits. De son côté, Ban Ki-moon devait réunir les 15 membres du Conseil, hier, à l’occasion d’un déjeuner pour leur demander de clarifier leur position sur cette affaire. L’ONU estime que la Minurso serait incapable de remplir son mandat avec le départ des membres civils de la mission. Créée par la résolution 690 du Conseil de sécurité, le 29 avril 1991, le mandat de la Minurso avait pour mission de surveiller le cessez-le-feu, vérifier la réduction des troupes marocaines sur le territoire, veiller à la libération de tous les prisonniers et détenus politiques sahraouis, exécuter le programme de retour des réfugiés, identifier et inscrire les électeurs habilités à voter et organiser un référendum libre et équitable et en proclamer les résultats. Jusqu’à aujourd’hui, aucun référendum n’a encore été organisé malgré l’insistance de la communauté internationale. Comme il fallait s’y attendre, la réaction sahraouie ne s’est pas fait attendre et c’est par la voix de son ministre des Affaires étrangères qu’elle est venue. Ainsi, Mohamed Salem Ould Salek a véhémentement condamné la décision «irresponsable» du Maroc. «Le gouvernement sahraoui et le Front Polisario condamnent avec véhémence cet acte irresponsable de l’occupant et lui endossent l’entière responsabilité des incidences qui en découleront si elle est appliquée», a-t-il indiqué, ce dimanche, dans un communiqué repris par l’APS. Par incidences, le représentant du gouvernement sahraoui fait référence à la reprise de la lutte armée puisque l’amputation de la Minurso de son effectif civil équivaut ni plus ni moins qu’à condamner la principale mission qui lui est dévalue en l’organisation d’un référendum. «Par cette décision, le Maroc attise les tensions et pousse le peuple sahraoui à reprendre la lutte armée», a tenu à prévenir le chef de la diplomatie sahraouie tout en appelant le Conseil de sécurité de l’ONU, garant de la Minurso, à assumer ses responsabilités. Cette offensive marocaine contre l’ONU et son SG, confortée par les assurances de certaines puissances à l’image de la France et des Etats-Unis d’Amérique, et des promesses économiques des monarchies du Golfe intervient moins d’une année après que Rabat eut applaudi des deux mains la décision de Ban de ne pas élargir le mandat de la Minurso à la surveillance des droits de l’homme. En décembre 2015, le Parlement européen a adopté un rapport appelant l’ONU à étendre le mandat de la Minurso à la surveillance des droits de l’homme après que la Cour de justice européenne eut annulé les accords agricoles avec le Maroc suite à une plainte du Polisario. Dans son rapport annuel, l’institution réclame aussi «la libération de tous les prisonniers politiques sahraouis» et un accès « aux territoires du Sahara Occidental» pour les parlementaires, observateurs indépendants, aux ONG et à la presse.
Le rapport adopté par Strasbourg soutient également « un règlement équitable et durable du conflit au Sahara Occidental sur la base du droit à l’autodétermination du peuple sahraoui, conformément aux résolutions des Nations unies en la matière». Le fait de «désarmer» la Minurso participe à la fuite du Maroc dans le dossier sahraoui pour espérer gagner du temps.
http://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5226615
PDF
Be the first to comment