Ceux qui ont douté un moment, un seul, que le traitement médiatique à la sauce française des «Panama Papers» allait annuler, ou du moins retarder, la visite de Valls en Algérie en sont pour leurs frais. Qu’Alger proteste contre la une du Monde, que Lamamra convoque l’ambassadeur de France ou que les Algériens trouvent excessive la position de Paris sur le dossier sahraoui ne changent pas grand-chose lorsqu’il faut signer les contrats. Et ce sont les contrats qui seront au centre de la visite du Premier ministre français avec, dans ses bagages, une forte délégation ministérielle à la sauce marocaine.
Dans l’avion, se trouveront deux ministres françaises d’origine marocaine, Najet Vallaud-Belkacem et surtout Audrey Azoulay, promue à la tête de la Culture en remplacement de Fleur Pellerin. Une nomination, rappelons-le, qui avait soulevé des commentaires en Algérie, son père n’étant autre que André Azoulay, l’un des anciens conseillers des rois du Maroc, Hassan II puis Mohammed VI. C’est lui qui avait œuvré en 1994 au rétablissement des relations diplomatiques entre Israël et le Maroc, recevant la Légion d’honneur des mains de Michel Rocard pour services rendus. Cette appréhension s’est cristallisée lors de la venue d’Ayrault interpellé par Lamamra, le chef de la diplomatie algérienne, du soutien inconditionnel de Paris à la marocanité du Sahara occidental au détriment du droit international. La France ne donnera aucune suite à l’appel de l’Algérie. Outre le dossier sahraoui et le suivisme français, cette visite sera sous haute tension, non pas à cause de Bouchouareb cité dans l’enquête médiatique, mais de l’intrusion intentionnelle ou maladroite de la photo de Bouteflika dans l’illustration d’un article sur l’affaire Sonatrach-Saipem. Les Algériens qui crient au complot savent pertinemment, et ils l’ont dénoncé, que Le Monde roule pour le Quai d’Orsay lequel est complètement inféodé aux thèses marocaines sur le Sahara.
Sur les «Panama Papers», les Français s’interrogent naïvement si leur ministre de l’Economie et des Finances allait rencontrer Bouchouareb cité dans cette affaire. La réponse est à chercher du côté de Hollande qui a remis la Légion d’honneur au prince héritier saoudien, ministre de l’Intérieur d’un régime responsable de 70 exécutions depuis le début de l’année. C’est dire que la realpolitik est le premier levier des relations entre les pays en attendant de voir la réaction de l’Algérie en face de ce pragmatisme cynique. L’opinion publique s’interroge également sur ce besoin tout algérien de dépendre économiquement d’un pays qui ne fait pas trop cas de la dignité des Algériens. Comme s’il n’y avait pas d’autres partenaires économiques beaucoup plus stratégiques que les contrats français.
Soyez le premier à commenter