par Mahdi Boukhalfa
Le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a, une nouvelle fois lundi soir, appelé le Maroc dans un rapport sur la situation au Sahara occidental, à coopérer pour accélérer une solution politique pour ce territoire colonisé.
Après une première visite dans la région qui lui a permis de tâter le pouls de cette question de décolonisation au Sahara occidental encore pendante, M. Ban a estimé dans son rapport qu’il était «temps d’engager des négociations sérieuses sans conditions préalables et de bonne foi pour parvenir à une solution politique mutuellement acceptable qui permet l’autodétermination du peuple (du Sahara occidental)». Il a souligné dans ses recommandations au Conseil de sécurité de l’ONU contenues dans son rapport périodique sur le Sahara occidental qui sera examiné le 27 avril prochain, qu’une «solution politique doit impérativement inclure la résolution du conflit au Sahara occidental» et a au passage dit «regretter» le blocage du processus politique entamé en 2007, qui n’avait pas abouti à l’ouverture de vraies négociations entre les deux parties au conflit. Selon le SG de l’ONU qui a été violemment attaqué par Rabat après sa tournée en mars, «la difficulté fondamentale qui a empêché l’aboutissement de ce processus réside dans le fait que le Maroc a toujours unilatéralement considéré son plan d’autonomie comme seule base pour les négociations». Or, sur la table des négociations, il y a les trois options soumises au Maroc et au Front Polisario: l’intégration au Maroc, l’autonomie sous administration marocaine, ou l’indépendance. Les trois options doivent être validées par le peuple sahraoui à travers un référendum d’autodétermination. Ce que le Maroc, qui a occupé le territoire en 1975, a toujours refusé d’appliquer, faisant prévaloir son option, dite «la troisième voie», ou l’autonomie.
Sur le cas de la mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO), M. Ban a rappelé que cette mission a été mise en place pour surveiller le cessez-le-feu et organiser un référendum d’autodétermination. Mais l’expulsion de sa composante civile par le Maroc, mécontent que le SG ait parlé d’occupation du Sahara occidental, «a empêché cette mission de maintien de la paix de l’ONU d’effectuer ses fonctions». Selon Ban Ki-moon, soumis à de terribles pressions depuis sa visite dans la région, «l’incapacité de la Mission à exécuter ses tâches entraînerait, à court et à moyen terme, des conséquences importantes sur la stabilité de la région et sur la crédibilité des opérations de maintien de la paix du Conseil de sécurité et des Nations unies». M. Ban a même indiqué «être très profondément préoccupé» par la situation sécuritaire dans les territoires sahraouis occupés. Il en précise les contours en relevant que «la sécurité dans ces territoires risque de se détériorer avec cette crise qui a fortement impacté la mission de la surveillance du cessez-le-feu de la Minurso». Il a de ce fait recommandé au Conseil de sécurité, qui doit se réunir sur la question à la fin du mois, de rétablir le mandat de la Minurso et «éviter de créer un précédent pour le reste des opérations de maintien de la paix de l’ONU dans le monde». Il a dans la foulée recommandé la prorogation du mandat de la Minurso d’une année, jusqu’au 30 avril 2017, avant de relever qu’il «y aura risque d’une rupture de la trêve et d’une reprise des hostilités si cette mission est contrainte de quitter les territoires sahraouis occupés». D’autre part, il a annoncé avoir proposé une rallonge du budget de la Minurso, qui va passer à 54,3 millions de dollars contre 51,1 millions de dollars pour couvrir ses besoins et les salaires du personnel pour la période allant de juillet 2016 à juin 2017. M. Ban a également relevé dans son rapport sur les droits de l’homme au Sahara occidental qu’il est important de «maintenir une compréhension indépendante et impartiale (de la situation des droits de l’homme) au Sahara occidental» et a rappelé aux autorités marocaines qu’elles doivent coopérer avec le Haut commissariat des Nations unies aux droits de l’homme.
Ce chapitre du rapport du SG de l’ONU, notamment après sa visite dans les camps des réfugiés et les territoires libérés, et les rapports des ONG des droits de l’homme, a été au centre d’une vive contestation du Maroc, qui avait refusé que la mission de la Minurso soit étendue à la surveillance des droits de l’homme dans les territoires sahraouis occupés où une véritable politique de repeuplement a été mise en place par les autorités d’occupation. Le rapport du SG de l’ONU, après l’intervention de lobbies pro-marocains pour le discréditer, confirme au moins que M. Ban est loin d’être manipulable, ni impressionné par une sauvage campagne de presse du Makhzen, encore moins par quelques soutiens de pays occidentaux pour qui le Maroc est une «dépendance» territoriale et un appendice politique au Maghreb.
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