La presse marocaine en a souvent parlé. Elle reproche au Maroc de prendre des décisions dans la précipitation pour ensuite faire marche arrière. C’était le cas en 2009 avec la militante sahraouie Aminatou Haidar suite à l’intervention de Nicolas Sarkozy.
En 2012, le Maroc retira sa confiance à l’Envoyé Personnel de l’ONU pour le Sahara Occidental, Christopher Ross. Il finira par être accueilli par le roi Mohammed VI en personne.
Pour ceux qui ont la mémoire courte, voici deux article du Soir d’Algérie sur le bras de fer de Mme Haidar contre Mohammed VI.
1. La militante sahraouie Aminatou Haïder boucle, aujourd’hui, un mois de grève de la faim. Sa situation risque de tourner au drame à tout moment
Alger (Le Soir) – Ce qui d’ailleurs finira par arracher une «inquiétude» du département d’Etat américain, l’un des alliés les plus sûrs de Rabat. La réaction américaine intervient après celle, non moins lourde, de la présidence de l’Union européenne. A n’en pas douter, le Royaume chérifien est, dans cette histoire humanitaire du moins, dans la posture d’accusé. Un cas de figure qu’il était loin d’imaginer il y a de cela un mois lorsque, le 16 novembre dernier, il décidait de refouler Aminatou Haïder de l’aéroport d’El Ayoun.
Une banalité pour les services de sécurité de «sa majesté» vire au scandale international lorsque la militante sahraouie eut recours à la grève de la faim pour obtenir son droit de rentrer chez elle, depuis son «exil» à Lanzarote, aux îles Canaris, en Espagne.
Acculées par le temps et bien sûr par des pressions diplomatiques de plus en plus prononcées, les autorités marocaines tentent désespérément de trouver une sortie honorable. Et ce sera sans surprise qu’elles se défouleront sur le grand voisin de l’Est : l’Algérie. Hier encore, le ministre de la Communication et porteparole du gouvernement marocain, Khlid Naciri, «remet ça» via une déclaration à l’AFP. Pour lui, l’affaire Aminatou Haïder «est un complot systématique, méthodique ourdi par l’Algérie».
Et pour mieux faire avaler cette grosse couleuvre, il ressort son refrain que le monde entier a fini par connaître par cœur : «Le timing est significatif. L’Algérie est en position de faiblesse par rapport au plan d’autonomie mis en œuvre par le Maroc pour le Sahara occidental et qui est bien accueilli par la communauté internationale (…) C’est une instrumentalisation odieuse et l’Algérie croit avoir trouvé un filon pour s’attirer à bon compte la sympathie de l’opinion publique internationale. L’Algérie s’en tient au discours éculé de la guerre froide. Le mur de Berlin est tombé en Europe et un autre est érigé par l’Algérie.»
Ne reculant même pas devant le ridicule, ce sujet de Mohammed VI a tenu à assurer… l’Espagne de son soutien. «Nous sommes solidaires de l’Espagne. Elle peut être assurée de l’amitié et de la considération du Maroc.» Surtout que Ceuta et Melila demeurent toujours sous occupation espagnole… K. A
Le Soir d’Algérie, 15 décembre 2009
2. MOHAMED VI A FINI PAR CÉDER – Aminatou Haïdar est retournée à El-Ayoun
Après trente-quatre jours de grève de la faim, Aminatou Haïdar a regagné, hier, El-Ayoun, capitale des territoires du Sahara occidental occupés. Le retour de la militante sahraouie est l’objet d’une opération de récupération orchestrée par Rabat et Paris.
Tarek Hafid – Alger
(Le Soir) – Elle a réussi ! La détermination et le courage de Aminatou Haïdar sont arrivés à bout de l’entêtement du roi du Maroc. La militante des droits humains a pu retrouver, hier, les siens après une grève de la faim de 34 jours menée à l’aéroport de Lanzarote, dans l’archipel des îles Canaries. Affaiblie par cette longue période de jeûn, Aminatou Haïdar a embarqué dans un avion médicalisé qui a atterri, vendredi, à El-Ayoun. «Mme Haïdar a accompli normalement les formalités d’entrée à l’aéroport», a indiqué l’Agence France Presse en précisant qu’«elle est ensuite partie dans une voiture conduite par son oncle maternel, cheikh Mohamed Boussoula».
Ce dénouement en faveur de la Gandhi sahraouie constitue une véritable humiliation pour le monarque marocain et son gouvernement. Ce retour, qui est avant tout l’œuvre de la militante et de la solidarité internationale dont elle a bénéficié, fait toutefois l’objet d’une opération de récupération politique de la part de la France. Une opération où Nicolas Sarkozy et Mohammed VI sont censés jouer le beau rôle.
«Le président de la République a reçu le mardi 15 décembre 2009 le ministre marocain des Affaires étrangères et de la Coopération, M. Tayeb Fassi Fihri, porteur d’un message de Sa Majesté Mohammed VI, roi du Maroc (…). Le président de la République a exprimé le vœu que le Royaume du Maroc puisse, dans sa tradition d’ouverture et de générosité, faire remettre à Mme Aminatou Haïdar son passeport marocain à son arrivée sur le territoire du Royaume. Comme suite à cet entretien, Sa Majesté Mohammed VI a informé le président Sarkozy, par message, le 17 décembre 2009, de l’accord de l’Etat marocain. Dans ces conditions, Mme Aminatou Haïdar peut regagner le Maroc», précise un communiqué de presse de la présidence française rendu public jeudi soir.
Allié traditionnel du Maroc, la France n’hésite pas à mettre en avant la «tradition d’ouverture et de générosité» pour tenter de sauver la face à son «ami le Roi». La secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton, tout en se déclarant «contente» du retour de Aminatou Haïdar, aura une position similaire en saluant le «geste humanitaire» de Rabat.
Pour sa part, le ministre espagnol des Affaires étrangères s’est montré plus ferme. «Je veux simplement exprimer ma satisfaction sur le fait qu’elle ait pu rentrer chez elle. Nous sommes contents. Cela a été une longue lutte pour elle. Le gouvernement espagnol s’est battu pour faire en sorte que ce retour puisse avoir lieu aussi vite que possible», a déclaré Miguel Angel Moratinos en insistant sur le fait que son gouvernement n’ait fait aucune «concession» au Maroc. Il est vrai que l’Espagne a été dans l’obligation de gérer une affaire aussi gênante que compromettante puisque la militante sahraouie a mené sa grève de la faim sur son sol. La responsabilité de l’Espagne était donc engagée tout au long de cette grève. Le décès d’Aminatou Haïdar aurait été un véritable drame humanitaire, politique et diplomatique pour ce pays. Sa victoire aura eu également pour effet de remettre le dossier du Sahara occidental sur le devant de la scène internationale. Il y aura un avant et un après Aminatou Haïdar. «J’aime mes enfants plus que tout. Mais mes enfants pourront vivre sans mère, mais pas sans dignité», disait-elle alors qu’elle était à l’orée de la mort.
Le Soir d’Algérie, 19 décembre 2009
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