Un haut fonctionnaire algérien : «L’Algérie ne cède ni aux crises, ni au chantage, ni aux pressions»
«En reprenant chronologiquement le fil des événements qui ont marqué la question du Sahara Occidental au cours des six derniers mois, on distingue deux développements significatifs», a affirmé un haut fonctionnaire algérien au magazine Afrique Asie.
«Le premier est l’arrêt rendu le 10 décembre 2015 par la Cour de justice de l’Union européenne qui annule partiellement, en ce qu’il s’applique au territoire du Sahara Occidental, l’accord agricole UE-Maroc signé en 2012.
Cette décision prononcée par une instance judiciaire indépendante a donné lieu à une réaction prévisible qui, à travers une dramatisation outrée propre la stratégie de la tension que nous connaissons bien, qui vise à influer sur le déroulement normal des procédures internes propres à l’UE», a expliqué le haut fonctionnaire qui a requis l’anonymat.
«Le deuxième fait marquant de ces derniers mois est la crise entre le Maroc et le système de Nations unies, consécutive à la visite du secrétaire général de l’ONU dans les camps de réfugiés sahraouis et en territoire sahraoui libéré, en mars 2016», rappelle cette source qui estime que «Ban Ki-moon fait les frais d’une constante dans la démarche de la partie marocaine». Celle de «gagner du temps, perpétuer le statu quo, épuiser la patience des Sahraouis et la mobilisation de la communauté internationale», explique-t-elle.
Revenant sur le traitement réservé à Ban Ki-moon par le Makhzen, le haut fonctionnaire algérien affirme que ce n’est pas la première fois que Rabat agit ainsi : «Je rappelle que ce même pays a déjà tenté, en vain, de débarquer l’envoyé personnel du SG de l’ONU, Christopher Ross, en 2012», a souligné la source interrogée par Afrique Asie.
Le haut fonctionnaire algérien pointe «la passivité du Conseil de sécurité» qui a, jusque-là, «encouragé le Maroc dans son intransigeance et dans son refus d’appliquer les résolutions de l’ONU sur le Sahara Occidental». Interrogé sur la résolution que vient d’adopter le Conseil de sécurité après l’expulsion par le Maroc des experts civils de la Minurso, le haut fonctionnaire algérien indique que «l’Algérie y a surtout vu un engagement renouvelé de la part du Conseil de sécurité pour un règlement politique juste, durable et mutuellement acceptable qui pourvoit à l’autodétermination du peuple du Sahara Occidental», appelant à «la mise en œuvre scrupuleuse de cette résolution».
«De la pure propagande !»
Répondant à une question sur les accusations marocaines dirigées vers l’Algérie, la source autorisée algérienne affirme que cela relève d’une «pure propagande», soulignant que «la constance et la cohérence de la position de l’Algérie s’inscrivent dans le droit fil de son propre cheminement historique».
La position algérienne, a encore affirmé le haut fonctionnaire algérien, «se recoupe avec la position de la communauté internationale». «Dans cet esprit, a-t-il dit, l’Algérie défend cette position, ne cédant ni aux crises, ni aux chantages, ni aux pressions étrangères, ni à l’usure du temps». La source algérienne a, par ailleurs, fustigé «certains eurodéputés zélés, connus pour leur soutien indéfectible au Maroc» dont il ne faut pas confondre les positions avec celles de l’institution parlementaire européenne.
Les allégations de détournement de l’assistance humanitaire aux réfugiés sahraouis, argument fallacieux d’une poignée d’eurodéputés à la solde du Makhzen conduite par la Franco-Marocaine Rachida Dati, «ont été battues en brèche par les responsables européens eux-mêmes ainsi que par les représentants d’organes des Nations unies en charge de superviser l’acheminement et la distribution de l’aide», note la haute personnalité algérienne qui souligne que ces institutions «ne font pas le jeu des calculs politiciens du Maroc».
La source algérienne révèle, dans ce sillage, «le niveau de corruption et les pratiques de clientélisme auxquelles ont recours certains représentants du Maroc dans leurs relations avec les représentants des institutions régionales et internationales», citant le représentant permanent du Makhzen aux Nations unies, Omar Hilale, cité dans les révélations de Chris Coleman sur les pratiques douteuses de la monarchie marocaine. Omar Hilale est traité par la source algérienne de «troll habillé en costume de diplomate» qui «est passé maître dans la mystification».
Le haut fonctionnaire algérien rappelle, à juste titre, que l’Union européenne ne reconnaît pas la souveraineté du Maroc sur le Sahara Occidental, appelant l’Europe «à renoncer à sa présence au Sahara Occidental», à «annuler les licences qu’elle a octroyées à des sociétés exportatrices basées au Sahara Occidental» et à «refuser tous les produits qui viennent du Sahara Occidental et sont exportés avec un certificat d’origine marocain».
L’Europe, conclut la source algérienne, «devrait pouvoir jouer un rôle actif en engageant la partie marocaine qui refuse obstinément d’entrer dans des négociations directes de bonne foi et sans précondition», pour régler la question du Sahara Occidental une fois pour toutes.
Karim Bouali
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