Les militants du Polisario et les cadres de la RASD ont abordé, hier, le douzième et dernier jour des travaux – la matinée d’aujourd’hui sera consacrée aux festivités de clôture — de leur 7e université d’été qu’ils organisent depuis le 10 de ce mois à Boumerdès.
Le thème débattu hier est en relation avec la résistance pacifique comme alternative à la résistance armée. Il est clair que c’est la démarche voulue et décidée par le Polisario et soutenue par les Sahraouis. Mais en discutant avec des jeunes et certains moins jeunes, même lors des éditions passées de cette université, il apparaît que bien des Sahraouis, particulièrement la frange des jeunes, ne cachent plus leur impatience.
L’intervention, à titre individuel, de Mohamed Mustapha Tlimidhi, vice-président de cette université, sur le sujet est révélatrice. Tlimidhi questionnait le docteur Ammari Tahar-Eddine, enseignant du droit international à l’université Mouloud-Mammeri de Tizi-Ouzou qui avait animé quelques minutes auparavant une conférence intitulée : «La résistance pacifique sahraouie et son impact politique et diplomatique.» «C’est vrai que la résistance pacifique est la meilleure arme des peuples civilisés, mais le Maroc fait ce qu’il veut. Ne viole-t-il pas les droits de l’Homme en massacrant femmes et enfants et violant et agressant nos femmes devant nos yeux ? Ne pille-t-il pas les richesses naturelles de notre pays ? N’a-t-il pas mis un dispositif militaire pour réprimer le peuple sahraoui et séparer notre pays en deux ? Or, pendant la confrontation armée, le Maroc ne faisait pas ce qu’il voulait. Il était défait. La lutte sahraouie était en position de force, dira Tlimidhi avant d’interpeller le conférencier. «Dites-moi docteur, est-ce qu’il y a un chemin que le Polisario n’a pas emprunté pour parvenir à recouvrer pacifiquement notre droit à l’autodétermination ?»
Le choix des armes n’est pas facile
A la fin de sa conférence, nous avons interrogé le docteur Ammari sur ce que prévoit le droit international par rapport au droit de résistance d’un peuple.
«Dans le cas sahraoui, il y a deux choix de résistance : politique et diplomatique ou le retour aux armes. La résistance qui s’appuie sur la politique et la diplomatie, forme de résistance prévue dans le chapitre 6 de la Charte des Nations-Unies, préconise l’utilisation de tous les moyens pacifiques pour aboutir à un objectif dans le respect de toutes les normes du droit international. Sauf que dans la situation du peuple sahraoui qui a cessé la guerre en 1991 en vue de participer à un référendum d’autodétermination, ce vœu n’a pas été concrétisé en 25 ans d’attente. Par ailleurs, durant ces 25 ans, les notions de droit ont beaucoup évolué. Maintenant, le choix d’opter pour la solution militaire ou de continuer sur la voie politique et diplomatique devient compliqué», car il pense qu’il est nécessaire de tenir compte, avant d’opter pour le choix des armes, des stratégies internationales, notamment celles des puissances économiques et militaires, et de la situation sécuritaire mondiale. Selon lui, en tenant compte de la situation sécuritaire dans le Nord/Ouest de l’Afrique, quelque peu stable, si elle est comparée à celle qui prévaut dans la partie Est du continent, «reprendre les armes peut déstabiliser».
Une confrontation armée ne risque-t-elle pas d’être utilisée par le terrorisme international pour se greffer dans la région, s’inquiètent bon nombre d’observateurs. Il y a également le crime transnational organisé qui ne manquera pas de prospérer dans un climat instable», précisera Ammari. Celui-ci pense, en outre, que les puissances mondiales ne manqueront pas d’exploiter ces fléaux et l’instabilité qui en découlerait pour imposer leurs propres stratégies dans la région afin de protéger leurs intérêts politiques, diplomatiques et économiques.
Ammari est certain que le Maroc fait un travail de sape et développe ses capacités de nuisance pour pousser les jeunes Sahraouis à la radicalisation et qu’il ne faudrait pas que cette jeunesse sahraouie tombe dans le piège de la stratégie du Maroc qui a derrière lui la France qui a toujours d’énormes intérêts économiques dans la région.
Les Sahraouis victimes du déséquilibre des relations internationales
De son côté, Zarouri Haddouche Ouardia, enseignante de droit international à l’université de Tizi-Ouzou, qui a soutenu une thèse de doctorat sur la cause sahraouie pense que le peuple sahraoui est victime d’un déséquilibre entre le droit international et les relations entre les Etats. Elle explique que ce déséquilibre est défavorable au Polisario «les résolutions du Conseil de sécurité stipulent que ce peuple a droit à l’autodétermination. Pour faire aboutir ce droit, il est nécessaire d’organiser un référendum. Mais dans la réalité l’aboutissement de ce droit est obstrué par certains pays comme la France ou les Etats-Unis qui utilisent le droit de veto contre tout ce qui est favorable aux Sahraouis». Pour elle, la Communauté internationale doit s’inspirer, au sujet du Sahara occidental, de l’indépendance du Timor oriental, occupé par l’Indonésie et qui a fini par acquérir son indépendance grâce au soutien de l’Australie et de l’ex-Secrétaire général de l’Onu Kofi Anann.
Abachi L.
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