Il omet également de nous rappeler que l’affaire du Sahara occidental est aussi prise en charge par les Nations unies depuis près d’un demi-siècle.
L’écrivain marocain Tahar Benjelloun aime beaucoup son pays. Les souvenirs et les odeurs de Fès où il est né en 1944, les légendes et les mythes du royaume parsèment ses livres depuis qu’il a commencé à écrire à la fin des années 1970.
Il est arrivé en France vers 1971 fuyant le régime de Hassen II et fait des études en psychiatrie. Sa thèse sur la misère sexuelle des émigrés l’inspire d’ailleurs pour publier en 1977 « la plus haute des solitudes » qui le fit connaître. L’homme qui était longtemps collaborateur du journal Le Monde ne manque jamais de s’exprimer sur les faits politiques et les sujets qui alimentent l’actualité sociale comme le racisme, l’islamophobie. Il a été sollicité récemment pour faire partie de la fondation pour l’islam de France que dirige l’ex-ministre Jean-Pierre Chevènement.
En apparence, les avis de l’écrivain sont marqués au coin par le bon sens et la modération. Sauf quand il s’agit de l’Algérie. Comme à chaque fois, il se déleste de sa liberté de jugement, de sa clairvoyance supposée d’intellectuel qui depuis toujours invite ses lecteurs à se méfier des pouvoirs et des faux-semblants. Mais il est connu des poètes qu’ils disent souvent ce qu’ils ne font pas. On n’a d’ailleurs pas manqué de lui faire le reproche d’avoir attendu des années après la disparition de Hassen II pour publier en 2002 « cette aveuglante absence de lumière » plongée dans l’univers impitoyable du pénitencier de Tazmamart. Les dernières positions de l’auteur de « La Nuit sacrée » sont dégoulinantes de fiel vis-à-vis de l’Algérie. Il ne rate pas une occasion de se montrer le défenseur acharné des positions du royaume sur le dossier sahraoui. Il ne met aucune distance entre Benjelloun et lui et semble ignorer qu’un processus de négociations entre le Polisario et son pays existe depuis plus de vingt ans. Il omet également de nous rappeler que l’affaire du Sahara occidental est aussi prise en charge par les Nations unies depuis près d’un demi-siècle. Emporté sans doute par son imagination de romancier, il suggère que si ce conflit n’existait pas, il n’y aura ni Daesh, ni instabilité en Libye ou en Tunisie. Fouillant dans l’histoire, il ressort la fraternité des Marocains durant la guerre de libération. C’est un fait avéré. En tant que Monsieur qui chausse des lunettes marocaines, il est dans la posture d’un Albert Camus qui préférait sa mère à la justice. Etrange et paradoxale filiation, le moins que l’on puisse dire sur un auteur dont la force et la qualité de l’écriture ne semblent pas protéger de la passion politique.
Rachid H.
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