Adhésion par effraction à l’UA du Maroc : Début de la vraie bataille diplomatique

Après un intense lobbying diplomatique, mené par le souverain marocain en personne qui a visité plus de 24 pays africains en l’espace de moins de deux ans pour les pousser à agréer sa demande d’adhésion à l’Union africaine et l’achat de consciences africaines , grâce aux fonds octroyés généreusement par les monarchies des pays du golfe, le Maroc a réussi à se faire admettre par effraction au sein de la grande famille africaine . Car c’est bel et bien par effraction que le « royaume enchanté » de M6 a obtenu aux forceps son admission a l’UA , contre l’avis très circonstancié du conseiller juridique de l’UA, qui explicite clairement dans un très long document pourquoi le Maroc n’était pas éligible à l’adhésion. 
Sans entrer dans le détail de ce document qui fera date , on relève que le Maroc a outrepasse le sacré saint principe de l’intangibilité des frontières et qu’il occupe militairement une partie du territoire d’un État membre fondateur de l’Union africaine. L’on reviendra plus longuement sur les conséquences et l’implication qu’induit l’admission d’un État néocolonial au sein d’une organisation panafricaine dont l’objectif premier est de parachever la libération du continent. Une libération totale contrariée par le Maroc qui colonise et il n’ y a pas d’autre mot la Rasd depuis plus de 40 ans.
Quant au discours ronflant et pompeux de M6 qui n’aura jamais autant travaillé pour berner les dirigeants africains , on ne peut que douter de sa contribution à l’émancipation économique du continent quant on connait ses qualités de grand prédateur qui ont fait du royaume pratiquement sa propriété personnelle. Dans l’immédiat on peut se demander ce qui a poussé le Maroc à faire des pieds et des mains pour adhérer à l’UA et comment il accepte de siéger aux côtés de la Rasd . Est-ce une reconnaissance implicite qui augure d’un règlement négocié qui l’oppose aux Sahraouis et que la communauté internationale appelle de ses vœux ? Ou alors y-a-t –il volonté cachée de paralyser l’UA après l’avoir fait pour l’ONU. 
La démarche marocaine réfléchie et mise en application par ses sponsors , dont Israel et la France , quant on connait la médiocrité de la diplomatie marocaine , laisse penser que le Maroc va sans doute pousser à expulsion ou au gel la RASD , aux instances de l’UA . Comment s’y prendra-t-il alors que les instruments juridiques de l’UA ne permettent pas la mise à l’écart d’un État membre-fondateur ? Il suffit de lire attentivement l’acte constitutif de l’Union africaine, pour se rendre compte que le Maroc sera dans l’impossibilité de la faire. L’article 32 de cet Acte est on ne peut plus clair : « Les amendements ou révisions sont adoptés par la Conférence de l’Union par consensus ou, à défaut, à la majorité des deux tiers, et soumis à la ratification de Tous les États membres ». C’est-à-dire qu’on peut modifier les statuts de l’UA, et inclure un alinéa prévoyant l’expulsion d’un État membre, la RASD en l’occurrence, mais cet amendement ne sera valide que s’il est ratifié par tous les États.
À moins que la RASD ratifie d’elle-même un changement qui signe son expulsion de l’Union africaine, on voit mal comment pourrait le Maroc et ses parrains l’’expulser. Mais comme l’explique un des rares journalistes marocains lucide et crédible , Ali Lemtabet , le Maroc a adhéré à L’UA « pour foutre le « t’barzit », à l’intérieur de l’UA. » Mettre le chaos pour perpétuer son occupation coloniale du Sahara occidental , réprimer férocement le peuple sahraoui et exploiter ses richesses alors que la communauté internationale s’y oppose. Pour sa part l’Algérie, contrairement à la propagande haineuse marocaine a montré qu’elle n’a aucun problème avec son voisin de l’ouest et qu’elle demeure attachée à la légalité et au droit à l’autodétermination des peuples. Ramtane Lamamra, a d’ailleurs souhaité la bienvenue au Maroc au sein de l’organisation continentale en précisant que l’Algérie n’a strictement aucune réserve sur le retour du royaume dans la communauté africaine. 
Mais le Maroc n’aura pas les coudées franches une fois à l’intérieur de l’U.A. Et c’est là la principale condition à laquelle est soumis ce nouveau venu. En effet l’acte constitutif de l’UA qui impose à tout pays membre de s’astreindre au «respect des frontières existant au moment de l’accession à l’indépendance» et «défendre la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’indépendance de ses États membres». Or, cette disposition phare de l’Union africaine est clairement foulée aux pieds par le Maroc qui colonise le territoire de la République sahraouie depuis 1975 alors que la RASD est membre à part entière de l’organisation depuis 1982 ! 
Le parlement marocain a avalisé cet acte constitutif au début de ce mois en toute connaissance de cause à savoir qu’il est légalement tenu de défendre tous les membres de l’UA y compris la République sahraouie qu’il a annexée dans les faits. Il s’est engagé aussi à ne pas remettre en cause les frontières des pays membres. De fait, c’est une situation inédite car la Constitution marocaine de 2011 , comme le relève l’avis du conseiller juridique de l’UA , stipule : la « défense de l’intégrité territoriale [du MAROC ] dans ses frontières+ authentiques+», comprendre celles qui englobent le territoire du Sahara occidental. Cet état de fait crée un problème juridique quasi insoluble. Le Maroc va faire du lobbying avec ses amis francophones pour réunir les deux tiers des membres de l’organisation pour exiger l’amendement de l’acte constitutif de l’Union africaine qui lui permettrait, rêve –t-il de pouvoir voter l’exclusion ou le gel de la RASD. 
L’Algérie et tous les pays qui soutiennent le droit du peuple sahraoui à s’autodéterminer n’ignorent pas ce plan du royaume qui est un secret de polichinelle. Rabat va tout mettre en œuvre avec ses nombreux alliés en Afrique pour obtenir le vote d’une motion excluant la RASD. Mais ceci n’est simple que sur papier. Les amis de la RASD ne resteront pas les bras croisés. La vraie bataille diplomatique pour les Sahraouis ne fait que commencer.
Mokhtar Bendib

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