Maroc : Avant de soigner la façade, mettons de l’ordre à l’intérieur

Le Maroc, ce pays éternellement prometteur. Ce pays qui soigne son image à l’international mais qui ne se soucie pas de l’image qu’il donne à ses propres enfants. Ces enfants qui sont arrivés à un tel stade de saturation qu’il n’attendent plus grand-chose de ce pays.

Quand on examine bien la société Marocaine, quand on essaie de l’analyser dans l’espoir de sortir avec une réponse à la question : « qu’est ce qu’un Marocain ? » on trouve que cette question se révèle être digne des plus grandes questions métaphysiques. Qui sommes-nous ? Que voulons-nous ? Où allons-nous ? Autant de questions qui restent sans apparente réponse.

Essayons d’entrer dans les détails des références idéologiques et religieuses de ce pays pour tenter d’avoir un élément de réponse.

Le Maroc se dit être un pays musulman. Mais au-delà des quelques véritables pratiquants, le Maroc donne l’air de tout sauf d’un pays religieux, avec tout ce que ce terme a comme sens au niveau comportemental et spirituel. Il suffit pour cela de faire un petit tour dans les rues des différentes villes pour en arriver à ce constat. Vous verrez un homme méprisant, nourrit de la culture du prestige, en train d’insulter un petit enfant de la rue trop collant (sans qu’il ne se demande pourquoi cet enfant est à la rue ). Vous verrez des jeunes filles loin d’être majeure sortir de la voiture d’un vieux monsieur venant d’assouvir son appétit animalier. Si vous assistez à une des soirée de l’élite de demain, ceux qu’on appelle les ingénieurs, vous trouverez tout type de débauche imaginable. Un bon religieux est quelqu’un de propre, et dans sa tête et dans son environnement, mais je ne vous apprend sûrement rien quand je vous dis que l’état des villes est lamentable, avec les poubelles débordantes, les murs sales, les trottoirs poussiéreux, les gens qui jettent les déchets sur les allées sans éprouver le moindre remord. Beaucoup de pays non déclarés officiellement comme religieux sont plus religieux que nous sur ce point là. Pour ce qui est de la propreté mentale, on peut dire que les évènements du 20 février ont bien mis à nu le niveau de l’argumentation Marocaine composée à 90% d’attaques personnelles et d’insultes. Pour ce qui est de l’éthique générale, des dirigeants, des forces de l’ordre, des éducateurs, des professeurs, le niveau est bien bas. Comportements non civilisés, débauche, morale douteuse, voilà le Maroc musulman. Faire cinq prières par jour n’est qu’un exercice physique dans ces conditions là. Etre religieux ou spirituel c’est un tout, et rituel n’équivaut pas à spirituel. Sommes-nous pour autant prêt à accepter un Maroc laïque ? loin de là. La schizophrénie général veut qu’on défende becs et ongles ce qu’on n’est même pas au fond mais que l’on croit qu’on est.

Passons maintenant à la référence temporelle et identitaire. Le Maroc dit posséder des millénaires d’Histoire et 12 siècles de civilisation. Mais en quoi cela se manifeste en 2011 ? L’aliénation n’a jamais été aussi grande, la schizophrénie n’a jamais été aussi prononcée et l’inculture n’a jamais été aussi apparente. Le Marocain ne sait plus où donner de la tête. Est-il Arabe ? Est-il Amazigh ? Est-il occidental ? Est-il Khaliji ? En quoi consiste l’héritage culturel Marocain ? Que retenons nous de notre histoire ? comment vivons-nous nos traditions ? Nous possédons certes un des plus bel héritage artisanal au monde et une architecture qui fût grandiose à son époque. Mais ceci est de plus en plus négligé. Voyez par exemple l’architecture du prochain théâtre de Rabat. Un lieu de culture qui ne représente en rien la culture Marocaine. 1,35 milliards de Dirhams pour du déconstructivisme (Théâtre de Rabat). Ce n’est pas que ce n’est pas intéressant d’avoir ce genre d’architecture chez nous, mais cela aurait été tellement plus intéressant de profiter d’un tel investissement pour moderniser notre patrimoine qui est condamné à n’être confiné que dans les lieux de luxes, ou à des bâtiments rongés par le temps. Si l’on n’insuffle pas de la modernité dans notre patrimoine, il est condamné à s’essouffler et de fait il sera de plus en plus négligé. Cet essoufflement fait que maintenant, notre culture se transforme en folklore. La culture est censée être un mode de vie, une manière d’être au quotidien. Mais non, nous ne vivons plus la culture que durant les fêtes ou quand il s’agit de divertir les touristes. Le Marocain devient le bouffon de l’étranger quitte à en perdre sa dignité. On aimerait tellement que les gens de Marrakech suivent l’exemple de ce monsieur :

Maintenant, nous confondons modernité et occidentalisation à une époque où l’occident lui-même spécule sur sa propre décadence. Nous sommes là à sans cesse vouloir imiter l’occident. Seul problème, c’est qu’on essaie de l’imiter à travers le prisme des médias. Ce qui est une forte erreur. Les médias ont pour rôle de divertir, et de ce fait nous imitons ce qui n’est au fond que leur divertissement, et en même temps nous pensons que c’est cela être moderne parcequ’on nous le répète sans cesse à travers la propagande publicitaire. Il est donc intéressant de noter sur ce point que le Marocain s’occidentalise au niveau de la débauche et dans les choses superficielles, mais pas dans ce qui est de l’ordre de la formation de l’Homme civilisé. Pas que j’adhère forcément à la pensée occidentale dans ses détails, mais l’esprit et la rigueur sont louables. Mais ce phénomène est compréhensible dans la mesure où le pays manque sérieusement de figure emblématique et d’exemple pour la jeunesse. Où sont nos penseurs ? nos intellectuels ? où sont nos prix nobel ? où sont nos sportifs ? A qui ou à quoi le Marocain peut-il s’identifier ? L’élite Marocaine se résumant trop souvent dans l’esprit du Marocain en deux mots : voleurs et corrompus. Au niveau des programmes d’éducation, on ne met pas suffisamment l’accent sur les grands noms de l’Histoire Marocaine, ou au moins les penseurs et les savant Arabo-musulmans. Eh bien non, nos cours de philosophie ont pour référence des Descartes au lieu de Ibn Khaldoun. Demandez à un Marocain de lui citer des grands noms toute époques confondues, Ils se compteront sûrement sur les doigts de la main, demandez lui ensuite de vous citer des grands noms occidentaux du 20ème siècle, là les noms fuseront de toute part. Le pire c’est quand on voit que le résultat est similaire lorsqu’il s’agit de citer des contemporains. Des noms Marocains qui percent, on en parle rarement.

Pour ce qui est des détails historique, nous avons une Histoire floue. En effet, nous savons mieux le mode de vie des européens à l’époque médiévale que celui des Marocains à la même époque. Le mérite qu’ont les occidentaux dans cela se trouve dans leur matraquage médiatique. Leur culture est cuisinée dans les médias à toute les sauces et est toujours présentée de manière héroïque. Séries, films, dessins animés, musique, jeux vidéos… tout y passe, ils savent vraiment quoi faire de leur culture. D’ailleurs dans cette même catégorie, les Japonais excellent aussi. A tel point que vous trouverez des Marocains qui ne jurent que par le Japon, alors qu’ils n’en connaissent pas grand-chose de plus que des mangas, des jeux vidéos ou des reportages présentant ce peuple comme les hôtes d’une fourmilière géante. Certains seraient prêts à tout laisser pour aller y vivre. Ceux là sont ceux à qui on a vendu du rêves et à qui on a oublié de dire qu’une fois au Japon, il faudra du travail, chercher à manger, acheter des fève à 10 dh la gousse de trois graines (ayah lefwilat temma 10 dh 3 dyal 7ebbat, bi ma3na tebsil dyal bissara mo7al wach i koun b jouj drahem :D). Tout ça pour dire que nos repères identitaires sont très confus.

De ce fait, vu que nous ne donnons pas grande valeur à notre passé, ni à notre présent, vu que nous n’avons pas grande référence idéologique, religieuse, temporelle, comment pouvons-nous espérer constituer une conscience collective ? Comme on le dit classiquement, si nous ne savons pas d’où nous venons, comment peut-on savoir où nous allons ? Somme nous condamnés à éternellement singer ce que font les autres ? sommes-nous condamnés à sans cesse nous inspirer et à ne jamais inspirer ? pourquoi voulons-nous toujours être les bons élèves de l’étranger ? pourquoi voulons-nous être bien vu à leurs yeux quitte à négliger nos propres enfants, nos propres personnes ? Pouvons-nous être au devant de la scène internationale ? ou le voulons-nous ? Pouvez-vous dire à un Marocain que vous rêvez d’un Maroc qui inspire le monde sans qu’on vous rie à la figure ? Sommes-nous obligé de nous prostitué à la cause étrangère pour espérer survivre ? Si le moindre bout de tradition qui nous caractérise est nommé rétrograde, alors autant jeter toute notre histoire à la poubelle. Si le but est de devenir occidentaux dans le fond et dans la forme, alors au diable toute ces luttes pour la dignité, puisque la pire des humiliation est de ne plus accepter ce qui nous caractérise et de vouloir devenir comme le sont les autres ou comme les autres voudraient que l’on soit.

Mais à qui la faute ? au colonialisme ? Il a joué un rôle dans notre décadence, certes, mais n’est ce pas là une excuse trop facile pour justifier notre éternelle passivité ? Le monde regorge d’exemples qui montrent que la réussite est possible même avec peu de moyens (même s’il est trompeur de croire que le Maroc a peu de moyens).

Normalement ce qui transcende un pays, ce qui lui montre le chemin, ce sont ses penseurs, son élite, mais surtout son dirigeant. On ne l’appelle pas dirigeant pour rien. Il a pour rôle de faire sortir le peuple de l’aliénation, de lui montrer le chemin, puisqu’il est sa première référence. Un dirigeant qui s’éloigne du peuple et qui ne lui parle que rarement crée un conflit entre lui et ce dit peuple. Le peuple se sent négligé, méprisé. Nos dirigeants gagneraient donc à être de meilleurs représentants de la culture et de l’Histoire Marocaines dans les faits et pas seulement sur papier.

La solution des problèmes fondamentaux du Maroc ne sont donc pas dans la démocratisation aveugle ou dans l’individualisation de la société. La priorité n’est pas là. Ce pays est trop corrompu, la dent a été gâtée jusqu’aux nerfs. Il faut une réforme profonde des mentalités. Et pour cela il faudrait retrouver nos repères identitaires, sinon nous ne ferons que singer sans cesse les autres à défaut de référence. Il faut une réformes radicale de l’éducation. Il faut que les médias se trouvent un autre rôle que celui de l’abêtissement du peuple. Parceque à la longue, à défaut de l’abêtir, ils l’aliènent, ce qui revient fondamentalement à la même chose, puisque se crée de ce fait une schizophrénie qui crée un climat de tension au niveau de toute une population : Mépris, prestigisme, paternalisme, fermeture d’esprit, immunité contre toute amélioration, ou substitution radicale du mode de pensée et du mode de vie.

Ce sont à mon avis ces points là que nous devons toucher dans les débats. Au lieu de répéter sans cesse des termes dont nous ne mesurons pas la portée comme ceux de monarchie parlementaire, de république, libertés individuelles. De une ceci ne résoudra pas les problèmes de fond cités précédemment, secundo ces termes là découlent justement de ces problèmes de fond, vu que lorsqu’on demande en quoi ces modèles pourraient nous réussir, on nous répond que « puisque ça marche ailleurs, ça devrait marcher chez nous ». Vous n’êtes sûrement pas sans savoir que la plupart des démocraties du monde sont dirigées par une oligarchie technocratique et économique, la démocratie n’étant que de la poudre aux yeux visant à donner un sentiment de satisfaction au peuple en lui faisant croire qu’il a un certain pouvoir sur les affaires de son pays. Il est clair qu’il faut nuancer ces propos mais il est certain que la véritable démocratie reste à inventer. Alors avant d’en arriver à discuter ces questions, essayons de résoudre ce qui a pourri nos pays jusqu’à la moelle. Avant de soigner la façade, mettons de l’ordre et de la propreté à l’intérieur.

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