Selon une étude conjointe publiée par Egmont Institute et la Fondation Konrad Adenauer Stiftung, deux think tanks belge et allemand respectivement, les autorités marocaines procèdent incessament au démantèlement de cellules terroristes avant qu’ils ne passent à l’acte, ce qui pourrait induire à des erreurs et à « l’emprisonnment de personnes qui n’ont été impliquées dans aucune activité terroriste ».
Le Maroc a renforcé son dispositif sécuritaire en créant le Bureau central d’investigation judiciaire (BCIJ) et en déployant 50.000 informateurs gérés par le Ministère de l’Intérieur. Ces mesures pourraient imposer un contrôle excessif sur la société marocaine allant jusqu’à affecter le liberté d’expression, la liberté de la presse et d’autres libertés civiles au nom de la lutte contre le terrorisme. L’étude cite un rapport de Human Rights Watch publié en 2017 dénonçant la pratique de la torture sur des personnes soupçonnées de terrorisme.
En 2014, les autorités marocaines ont renforcé le code pénal avec des lois plus sévères dont des peines allant de 5 à 15 ans de prison et 45 000 euros d’amende pour tout Marocain qui rejoint ou tente de rejoindre une organisation armée non étatique, à l’intérieur ou à l’extérieur du Maroc. Dans cette même lignée, il a mis en place un programme de dé-radicalisation dans les prisons connu sous le nom de « Reconciliation » conçu pour les djihadistes marocains rapatriés ainsi que ceux qui n’ont jamais quitté le pays.
Le programme, qui dure quatre mois, comprend des conseils psychologiques, des enseignements théologiques et des outils nécessaires à la réinsertion dans la société. Dans sa première version en 2016, 25 détenus volontaires ont bénéficié de ce programme. En 2018, ce chiffre est passé à 300. Ceux qui réussissent le programme sont libérés par décret royal de grâce.
Mais, selon les analystes européens, ce programme est limité au séjour en prison des personnes concernées, mais, une fois libérés, il leur est difficile de réintégrer la société en raison du manque d’emploi et d’une position économique et culturelle leur permettant de faire partie de la société. Après tout, beaucoup de Marocains qui ont rejoint les rangs de l’État islamique n’avaient pas ce sentiment d’appartenance à la société et étaient issus d’un milieu social, économique et culturel très bas.
A part ce programme de réconciliation, ajoute l’analyse, le Maroc n’a pas conçu d’autre programme spécifique pour les ex-combattants rapatriés. A cela il convient d’ajouter que le royaume chérifien n’a pas résolu le problème des citoyens à double nationalité ni répondu au débat sur les femmes et les enfants. Ni celui des orphelins des ex-combattants, car dans les camps syriens, plus de 2500 enfants solitaires sont en train d’attendre une réponse des gouvernements européens ainsi que de ceux d’Afrique du Nord.
Une autre particularité du cas marocain est que 80% des recrutements de djihadistes ont été effectués via les réseaux sociaux, Facebook et Twitter, car en raison du contrôle serré de la situation dans les rues et dans la société marocaine, il est difficile de le faire en personne comme c’était le cas dans d’autres pays du Maghreb tels que la Tunisie et l’Égypte.
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