Selon les universitaires réunis à Amiens, les accords de pêche ne résistent pas au droit à l’autodétermination du Sahara Occidental
Trois questions à… Marjorie Beulay, maître de conférences en droit public à l’université Picardie-Jules-Verne.
Pourquoi un colloque juridique sur la question du Sahara Occidental ?
C’est un sujet latent, depuis plus de 40a ns, sur lequel nous n’avions pas de doctrine juridique en France.
Avec nos étudiants en droit international, nous abordons régulièrement la question, mais il manquait une approche scientifique et juridique. En organisant ce colloque, les 27 et 28 mai à Amines, nous avons voulu qu’elle soit aussi pluridisciplinaire.
Quelle est votre analyse sur les accords de pêche entre l’UE et le Maroc ?
Les débats ont permis d’éclairer les deux argumentaires qui s’opposent. D’un côté, la Commission Européenne considère que le droit international n’impose pas l’accord des populations du Sahara Occidental pour l’exploitation des ressources locales « à condition que ce ne soit pas à leur détriment ». Ce que le Maroc s’engage à s’assurer.
D’un autre côté, les récents arrêts de la Cour de Justice de l’UE contredisent cette approche qui, estimons-nous, résiste en effet mal au principe fondamental du droit à l’autodétermination. Droit reconnu de manière indiscutable par les Nations Unies. En fait, il y a une guerre économique autour des ressources du Sahara Occidental dont les 134 millions d’euros d’importations de produits de la pềche sont un des éléments.
Quelle issue peut-on espérer ?
Ce dossier est toxique et nous sommes assez pessimistes sur la survenue d’une issue politique. Le fait que ni le Maroc, ni le ministère français des affaires étrangères n’ont répondu à mon invitation n’est pas un bon signe. Pas plus que la nouvelle démission, le mois dernier, d’un représentant personnel du SG de la l’ONU chargé de trouver une solution pour le Sahara Occidental.
Il est donc probable que le Front Polisario (qui milite pour l’indépendance du Sahara Occidental, NDLR) va continuer à harceler juridiquement les entreprises et institutions qui commercent avec le Maroc sur le territoire qu’il revendique et dans les eaux adjacentes…
Recueilli par Stéphane GALLOIS.
Ouest-France, 25 jun 2019
Tags : Sahara Occidental, Maroc, Front Polisario, Union Européenne, UE, Cour de Justice de l’UE,