L’Algérie, dont le PIB s’élève à 215 milliards USD et dont les réserves de change sont estimées à 186 milliards USD, est la plus grande puissance économique de la région. Son économie se porte bien en raison de sa position de principal producteur gazier et pétrolier d’Afrique du Nord, ce qui a permis au régime d’Abdelaziz Bouteflika de rester stable en dépit de l’instabilité de ces deux dernières années dans les pays voisins comme le Mali, la Libye et la Tunisie.
Son économie reste extrêmement dépendante des hydrocarbures, qui représentent 98 % de l’ensemble de ses exportations et près de 60 % des recettes publiques. Cette richesse a permis à l’Algérie d’investir dans le secteur de la sécurité – le pays possède le plus gros budget militaire du continent africain – et le gouvernement algérien a pour ambition d’améliorer ses équipements et d’être encore plus efficace dans le domaine de la lutte contre le terrorisme. Certains experts considèrent que le Département algérien du renseignement et de la sécurité (2) est « l’un des services de renseignement les plus efficaces pour lutter contre Al-Qaïda au Sahel »(3) .
Même si certaines personnes font également observer que le DRS emploie des méthodes peu orthodoxes dans ses activités de lutte contre le terrorisme, dont l’infiltration des groupes terroristes(4) , la politique algérienne de lutte contre le terrorisme, délibérément intransigeante, résulte de son expérience en matière de conflit armé intérieur qu’elle a acquise au cours des années 90. D’après les estimations, la guerre civile entre le régime militaire algérien et les groupes islamistes armés a fait à l’époque 200 000 victimes et a façonné l’approche de cet État d’Afrique du Nord en matière de lutte contre les groupes terroristes.
Compte tenu de cette expérience, l’Algérie est devenue un allié important des États-Unis et de nombreux pays de l’UE, tels que la France, dans la lutte contre le terrorisme au Sahel depuis le début des années 2000. On peut citer parmi les exemples de collaboration dans ce domaine l’initiative pansahélienne de 2002, qui est devenue le partenariat transsaharien de lutte contre le terrorisme en 2005 et qui est actuellement coordonnée par le commandement militaire américain pour l’Afrique (AFRICOM) basé à Stuttgart.
L’Algérie a également participé à certaines initiatives régionales majeures visant à lutter contre le terrorisme. Elle a notamment participé à la décision prise en avril 2010 par les quatre pays les plus directement concernés par Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) – l’Algérie, le Mali, la Mauritanie et le Niger – visant à créer le Comité d’état-major opérationnel conjoint (CEMOC) (5), qui est basé à Tamanrasset dans le Sud de l’Algérie, à 400 km de sa frontière méridionale. Son mandat est de renforcer la coopération entre ces pays pour lutter contre le terrorisme, les enlèvements et le trafic, et de mener des opérations conjointes dans chacun des États participants.
En septembre 2011, une conférence internationale sur la lutte contre le terrorisme au Sahel a été organisée en Algérie en vue de renforcer encore la coopération entre les pays.
Le budget de la défense de l’Algérie est le plus élevé des pays d’Afrique du Nord avec un montant total de 6,41 milliards EUR en 2011, ce qui représente environ 3,1 % du produit intérieur brut (PIB). Ces dix dernières années, les dépenses militaires ont fortement augmenté en Algérie: leur valeur absolue a triplé depuis 2000(6) . Les forces armées algériennes (Armée nationale populaire, ANP) comptent 130 000 soldats. Les effectifs se constituent de 110 000 hommes dans l’armée de terre (contingent), 6 000 hommes dans la marine, 14 000 hommes dans l’armée de l’air, et 150 000 réservistes. On peut ajouter à cela les 187 200 hommes des forces paramilitaires: les 20 000 hommes de la gendarmerie sous le contrôle du ministère de la défense, les 16 000 hommes de la Direction générale de la sûreté nationale, les 1 200 hommes de la garde républicaine du Président, et les 150 000 membres des milices d’auto-défense et des gardes communaux (7) .
Évaluation de la capacité militaire algérienne
Les forces armées algériennes sont assez bien équipées par rapport à celles des voisins du Maghreb et notamment par rapport à celles des pays de la CEDEAO dont les forces militaires participent aux opérations au Mali.
La Russie et la Chine sont les principaux fournisseurs d’armements de l’Algérie. Toutefois, depuis quelques années, l’Algérie diversifie ses stratégies d’armement en s’approvisionnant auprès des pays occidentaux et en mettant en place des partenariats industriels pour développer son industrie de l’armement. Les programmes actuels comprennent l’achat de chars de combat T90, d’avions d’attaque au sol SU-30 et d’avions d’entraînement YAK-130, ainsi que de systèmes de missiles et de défense aérienne S-300 et PANTSIR-S1 à de la Russie, d’une grande plate-forme de guerre amphibie (avec des hélicoptères) et de frégates à l’Italie, ainsi que de corvettes, et d’une usine complète de fabrication de véhicules de combat d’infanterie et de services de formation d’officiers et pour les équipements électroniques à l’Allemagne 8 . L’Algérie investit énormément de ressources dans la modernisation de sa capacité militaire, mais ces investissements ne se sont pas encore traduits par des capacités opérationnelles.
La majeure partie des forces armées algériennes sert sur la frontière occidentale avec le Maroc et le Sahara occidental. Aucune opération militaire symétrique n’a été menée par l’Algérie depuis la guerre des sables avec le Maroc en 1963, à l’exception de quelques opérations air-air contre les forces de défense israéliennes (FDI) pendant la guerre du Kippour en 1973. Depuis cette période, l’Algérie n’a pas déployé beaucoup de troupes sur des théâtres d’opérations extérieurs 9 . L’armée nationale populaire (ANP) possède une certaine expérience en matière d’opérations internes de lutte anti-insurrectionnelle et antiterroriste, et les forces de l’ANP ont acquis leurs premières expériences dans des opérations conjointes. Les officiers d’état-major et les forces spéciales de l’ANP ont suivi des formations bilatérales auprès de la Belgique, de la France, du Royaume-Uni et des États-Unis. La force de réaction rapide de l’armée de terre a la taille d’une division, mais les moyens de déploiement rapide de cette force ne sont pas adaptés à cette taille 10.
Les forces armées algériennes sont les plus importantes d’Afrique du Nord et les dépenses en matière de défense sont les plus élevées des quatre pays, mais les récents programmes de modernisation et de transformation ne se sont pas encore traduits en capacités opérationnelles. La stratégie d’acquisition de matériel lourd et sophistiqué pour les opérations militaires conventionnelles est destinée à contrer le Maroc, rival de longue date de l’Algérie, et devrait lui garantir un rôle de chef de file dans la région. Cela pourrait également aider l’Algérie à jouer un rôle plus important, quoique limité, sur la scène internationale. Toutefois, comme le pays ne possède aucune expérience en matière d’opérations extérieures, il ne pourrait développer ce rôle qu’en faisant appel à des partenaires stratégiques et en s’appuyant sur une coopération multilatérale. À l’heure actuelle, comme les derniers événements l’ont démontré au cours de la crise des otages d’In Amenas, les capacités de lutte anti-insurrectionnelle et antiterroriste restent cruciales pour les forces armées algériennes.
L’armée est un acteur politique important en Algérie et son intervention sur le site gazier d’In Amenas a été perçue comme une réussite dans le pays, même si ces opérations ont été vivement critiquées à l’étranger. Cette intervention a renforcé la réputation de l’armée et pourrait consolider sa position vis-à-vis des autres institutions gouvernementales.
(2) Département du renseignement et de la sécurité (DRS).
(3) Citation de John R. Schindler, ancien officier de l’Agence de sécurité nationale des ÉtatsUnis, dans Boukhars, A., « The Paranoid Neighbour. Algeria and the Conflict in Mali ».
(4) http://www.brookings.edu/research/opinions/2013/02/03-algeriariedel?rssid=sub+saharan+africa 5 Comité d’état-major opérationnel conjoint.
(6) Base de données des dépenses militaires du SIPRI (http://milexdata.sipri.org/)
(7) Chapitre sept: Moyen-Orient et Afrique du Nord, The Military Balance, 112:1, pp. 303-360.
(8) Ibidem 9 http://countrystudies.us/algeria/157.htm 10 Chapitre sept: Moyen-Orient et Afrique du Nord, The Military Balance, 112:1, pp. 303-360.
Source : Parlement Européen, juin 2013
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